Portrait

Athlète et digital entrepreneur

Hammad Benjelloun, fondateur de Adlive

Il a commencé sa carrière dans la finance, et aujourd’hui se rêve en “Mark Zukerberg” avec le premier réseau social et “market place” dédié aux professionnels du digital. A 32 ans, cet ancien haut cadre basé à Dubaï, a fondé Adlive, et utilise le Maroc comme rampe de lancement de son empire.  
Par  Noréddine El Abbassi

Hammad Benjelloun, compte parmi ces “over achievers” qui visent les étoiles pour atteindre la lune. Ceux là même, à qui la vie a toujours donné raison, en dépit de choix, pour le moins audacieux, parfois. Dès la première rencontre, on est convaincu d’avoir affaire à un jeune chef d’entreprise, qui respire la santé, avec un physique de jeune premier, doublé d’un sportif de haut niveau. Dans un sens, ce diplômé de HEC tient un peu des deux. De fait, après avoir caressé le rêve de footballeur professionnel, il adaptera par pragmatisme ses ambitions, vers un autre type de compétition, celle de la vie professionnelle et du monde des affaires.
Il est né en 1983 à Fès, dans une famille de trois garçons, dont il est l’ainé. Le père est enseignant à l’Université, en tant que professeur de Droit International Public. L’enfance du jeune Hammad se déroule, dans un premier temps, entre sa ville natale qu’il quitte à 2 ans et la ville du Détroit où il séjournera deux années durant, pour revenir à Fès. Hammad a dix ans lorsque la famille pose enfin ses bagages à Rabat, pour de bon cette fois-ci, mettant fin à cette suite de déracinements consécutifs.
Comme pour beaucoup  de “third culture kids”, Hammad développe une adaptabilité et une stratégie sociale d’intégration dans son nouvel environnement. “Lorsque je suis arrivé à Rabat, les groupes d’amis étaient déjà formés et se continuaient dans le cycle secondaire au Lycée Descartes. J’étais certes, un outsider, mais je me suis intégré par le sport”, définit-il cette période de sa vie. Le football est alors un liant social, doublé d’une passion, et son activité sportive est au centre de ses préoccupations. La pratique des arts martiaux est une autre passion, qui ne l’a pas quitté à ce jour. Ce sont alors les années JCVD. Les films de “karaté” à petit budget de Jean Claude Van damme ont marqué toute une génération de marocains. C’est peut-être cette influence qui poussera cet athlète de haut niveau dans les bras de la boxe Thaïlandaise, le Muay Thaï.

Objectif HEC

Dans l’environnement familial, l’influence d’un père universitaire est prééminente. Hammad baigne dans le monde des classiques de la littérature française, tout en se plongeant dans les ouvrages d’histoire et de géopolitique de la bibliothèque paternelle. Les romans de vulgarisation de l’histoire des arabes, de l’écrivain et journaliste libanais Jorge Zaydan, marquent sa culture en formation, à l’image d’autres générations de lycéens marocains. Mais sa grande passion demeure le sport, Hammad se projetant  star du football. Ses parents finiront pas céder à ses rêves adolescents qui cependant, ne se réaliseront pas. C’est ainsi que, dès les tests d’admission à un centre de formation en football, Hammad n’est pas retenu. L’entraîneur responsable qui rejette sa candidature, lui en donne les raisons: “Il m’a dit que j’avais un bon niveau, mais insuffisant. Il m’a expliqué  qu’un seul postulant de la promotion, jouerait peut être, un jour, en première division. Les autres se rabattront sur une carrière de professeur de sport, ou évolueront dans une petite équipe. Avec le recul, je me demande encore aujourd’hui, si mes parents n’étaient pas derrière cette situation…”, se remémore-t-il, sans cacher son émotion, à ce souvenir.
Mais Hammad n’était pas homme à céder au découragement. Pour lui, ce n’est pas tant de traverser des crises, mais de s’en relever qui importe.  Il reprend donc, le collet de ses études, avec plus de determination. Dans son apparence soignée et ses gestes précis, on décèle un homme qui a gardé de cette époque, une passion pour la perfection du geste. En plus d’une carrure athlétique, plus appropriée pour le surf que pour un sport d’équipe.  Il obtient son Bac en Sciences économiques en 2001 et s’envole pour Paris, préparer les concours aux grandes écoles de commerce, au lycée Montaigne. Une nouvelle compétition dont l’issue est loin d’être acquise, mais qu’il entend bien remporter, envers et contre tout : “Je me suis retrouvé avec de vrais surdoués. L’exemple d‘un camarade apprenant à jouer du violon en quelques mois, pour devenir parmi les meilleurs, n’est pas exceptionnel dans cette pépinière. Pour suivre le rythme, nous devions travailler six heures par jour, en plus des cours chargés quotidiennement. Mais pour mes parents,  il n’y avait que HEC, qu’il fallait  décrocher”. Ce qui explique qu’il décide de redoubler, pour réussir le concours de l’une des “trois parisiennes”, HEC, ESSEC et Sup de Co Paris, alors qu’il avait obtenu, au premier essai,  l’admission à des écoles aussi prestigieuses que EDHEC et EM Lyon.

Financier à Dubaï, businessman à Casa

Nous sommes en 2004, lorsque Hammad intègre  HEC Paris. C’était le temps  où  “trader”, était le métier qui faisait rêver tous les jeunes loups de la Finance. D’ailleurs, lui-même, s’était préparé à cette carrière, s’intéressant à la Finance de Marché, et passant des stages à la City de Londres, place boursière mondiale par excellence. A la fin d’un stage, à l’ancienne banque d’affaires Lehman Brothers, un emploi lui est proposé. Contre toute attente, il le refuse: “j’ai fait un choix que personne n’a approuvé. Mais j’ai préféré commencer dans une start-up financière à Dubaï, d’un fonds d’investissement suisse,” explique-t-il, sans jamais se justifier. L’année 2008, quand Hammad est fraîchement émoulu d’HEC, la vie rêvée de managers dans la “ville Monde” qu’est Dubaï, lui est offerte sur un plateau. Il fait partie de la faune de managers hyper qualifiés et indépendants, qui font de ce lieu une place forte des affaires internationales. Par ailleurs, les événements donneront, à posteriori, raison à son choix de carrière, quand Lehman Brothers fera faillite, peu de temps après. Le “jour de mon anniversaire”, précise Hammad, dans un éclat de rire, soulagé. Deuxième déconvenue en 2010, lorsque la filiale du fonds d’investissement Suisse, l’ Union Capital Group, qu’il avait intégré, dépose le bilan. Hammad Benjelloun retourne en Suisse, siège de la maison mère. Il prospecte alors en Orient, à Hong Kong, et à Singapour, sans négliger ni  Londres ni New-York.  Mais il doit faire face à une réalité nouvelle: “Dans le domaine de la Finance, la tendance était morose. On licenciait plutôt que l’on recrutait. Je me suis donc plongé dans le web, sans réellement m’en rendre compte. J’avais commencé par produire quelques applications, des sites. Pour finir, je me suis retrouvé avec une Agence Digitale, que j’ai officiellement montée, alors que je travaillais déjà dans le domaine depuis quelques temps”, analyse-t-il.  Hammad Benjelloun doit néanmoins, réfréner ses ambitions, pour coller de plus près aux tendances du marché marocain. Tout en suivant de près la tendance mondiale. Aujourd’hui, avec Adlive, il lance le premier réseau social dédié aux métiers digitaux avec une place de marché qui réunit les professionnels du secteur. Au final, les affaires sont comme l’amour: “tout est une question de timing”!

Bio Express

1984 : naissance à Fès
2001 : Bac ES au Lycée Descartes (Rabat)
2008 : diplôme de HEC Paris
entrée à Union Capital Group (Dubaï)
2010 : Retour en Suisse à la maison mère Union Capital Group
2011 : fondation de l’agence digitale Fusion Digital Agency
2015 : fondation de Adlive Digital Network

 
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