Dossier

Bourse des valeurs de Casablanca : 2015, l’année de la reprise ?

Le Masi devrait se maintenir en hausse au moins jusqu’au mois de juin, il pourrait même atteindre les 15%. Une performance qui n’a pas été enregistrée depuis 2008. Les prévisions des analystes pour 2015 sont très optimistes. Zinzins nationaux, mais aussi étrangers reviennent sur le marché. Certains préfèrent tout de même ne pas céder à l’euphorie ambiante et pointent du doigt certains dysfonctionnements qui peuvent assombrir le tableau. Analyse.  Dossier réalisé par Aïda Sedrati

Bon début d’année pour la Bourse de Casablanca qui enregistre un trend haussier avec un masi qui caracole à 10 410,30 atteignant ainsi une performance de 8,21% à la clôture de la séance du 24 mars. On est loin des 3% enregistrés à la même période de l’exercice précédent, certains analystes prévoient même qu’il dépassera, d’ici la fin de l’année la barre psychologique des 10%. Du côté des transactions, la tendance est également à la hausse. Les échanges sur le marché central ont généré un volume quotidien moyen dépassant les 120 MDH, en hausse de plus de 80% comparé à l’année dernière…Que de bonnes nouvelles en dépit de l’avalanche des profits warnings qui s’est abattue sur la place de Casablanca et qui ont été publiés récemment, au nombre de 11,  et qui auraient, sous d’autres cieux, créé des perturbations. A Casablanca, il n’en est rien. Explications :
« Plusieurs sociétés ont communiqué sur d’importantes dégradations de leurs bénéfices au titre de l’exercice 2014, Samir, Managem, sa filiale SMI, la CMT, Alliances, Centrale Laitière, Involys, Zellidja, Jet Allu… Ces valeurs n’ont pas un grand poids dans la capitalisation boursière qui reste tirée par de grandes pointures comme Maroc Télécom ou encore Attijariwafa bank. Ces dernières enregistrent d’excellentes performances », souligne Asmae Alaoui, analyste financière. D’autant plus que l’effet de la baisse de ces profits warnings a déjà été partiellement consommé durant l’exercice 2014 pour Managem, SMI, CMT. La Samir, par contre, continue d’être sanctionnée par le marché. L’action était encore une fois réservée à la baisse lors de la séance du 24 mars.
En tout cas, l’optimisme est de mise. Un optimisme conforté par la bonne tenue des résultats annuels. Dans une note publiée par Eurobourse récemment, 38 sociétés cotées ont publié leurs réalisations au titre de l’exercice 2014. Soit une masse bénéficiaire de près de 22,7 milliards de dirhams (MMDH). Ce qui représente, pour le moment dans l’attente des résultats définitifs et hors profits warning, une hausse de 6,5% (hors profit-warning, et dans l’attente de publication des résultats définitifs). 26 sociétés cotées ont annoncé des résultats en hausse contre 12 en baisse et distribueront des dividendes d’un montant total de près de 17,4 MMDH, qui ressort en légère baisse de 0,2%. ‘‘La période d’’annonce des résultats cette année a enregistré un record de 11 profits warnings, touchant différents secteurs d’activité’’, note l’analyste Zineb Belafkih.

Baisse des taux

Peut-on pour autant céder à l’euphorie ambiante et parler d’une année de reprise. Une grande majorité des analystes sondés par Challenge, le confirment, «Oui, l’année 2015 sera bien une année haussière pour la place de Casablanca », annoncent-ils.
Plusieurs facteurs bénéficient à cette relance. Tout d’abord, la bonne conduite des indicateurs économiques du pays. La conjoncture connaît, en effet, un redressement progressif à en croire les taux de croissance prévus pour cette année par de nombreuses institutions notamment, le HCP qui avance le chiffre de 3,7%. Par ailleurs, les finances publiques enregistrent un excédent budgétaire de 5 milliards de DH à fin janvier, contre un léger déficit une année plus tôt. Une performance qui aura un impact certain sur l’évolution du marché financier. «Le bon comportement des finances publiques signifie que le Trésor ne sollicitera pas autant la dette domestique. Ce qui induit une baisse des taux d’emprunt », explique un analyste. BMCE Capital Research abonde dans le même sens. Ses analystes prévoient une bonne performance de la place de Casablanca boostée notamment, par la forte baisse des taux des bons de Trésor. Ce qui aura comme conséquence un arbitrage au profit du marché boursier. Ils estiment également, que la prime de risque sera stable à 7,1% contre 7% en 2014. «Au regard de la bonne performance des sociétés cotées et l’amélioration de leurs perspectives, le marché boursier aura en 2015 les faveurs des investisseurs aussi bien marocains qu’étrangers», soulignent les experts de BMCE CapitalResearch.
La perspective des introductions à venir cette année, (Mutandis, Total Maroc, Marsa Maroc), induit une certaine euphorie dans le microcosme boursier. L’arrivée de papier frais est de nature à donner un coup de fouet à une bourse atone depuis la fameuse crise de 2008. Plusieurs choses ont changé, depuis notamment la configuration des investisseurs. Ainsi, plusieurs observateurs constatent une désertion des spéculateurs au profit d’investisseurs plus mûrs qui cherchent la rentabilité à long terme et misent sur des secteurs solides comme les télécoms, les bancaires et les cimentiers.

Quelles valeurs à conserver

Les recommandations des sociétés de bourse

Les banques et les télécoms demeurent sans conteste, les valeurs sûres pour bon nombre d’analystes. Le secteur bancaire affiche, en effet, des crédits et dépôts en amélioration, une marge d’intérêt en hausse, ainsi qu’une baisse significative du coût du risque. Tête de pont des bancaires, Attijariwafa bank est recommandée à l’achat par CFG avec un cours cible de 407 DH, ce qui représente une hausse de 8%. L’agroalimentaire, la distribution automobile ou encore les ciments enregistrent de bonnes performances. Les mines et les immobilières, en dépit d’une année 2014 devraient connaître un léger mieux. Tour d’horizon.

 BMCE Capital recommande de   conserver Managem et SMI et  d’acheter CMT

En dépit d’une année 2014 assez difficile, BMCE Capital se prononce positivement sur le secteur des mines en ce début d’année. Même si la poursuite de la baisse des cours des métaux précieux et de base à l’échelle internationale, en raison du ralentissement de la demande chinoise et des pays de la zone euro, devrait fortement pénaliser la rentabilité des trois compagnies minières cotées au titre de l’année dernière, elles devraient tirer profit de la hausse de la parité du dollar face à la monnaie nationale, qui est passée de 8,15 à 9 DH, soit une croissance de 10,4%. Une bonne performance haussière du dollar pourrait être davantage bénéfique en 2015. D’autant plus que les métaux précieux renouent avec un rythme de croissance soutenu avec des améliorations allant de 8% pour l’or à 16% pour l’argent. Seule ombre noire au tableau, les métaux de base traversent toujours une situation difficile avec des replis de 10,4% pour le cuivre, 3% pour le zinc et 1,3% pour le plomb
Pour BMCE Capital, Managem sera le moins impacté en termes de revenus à fin 2014 (3,8 milliards de DH, en hausse de 2%). Elle devrait profiter de la hausse escomptée de la productivité et des volumes de ventes suite au démarrage de ses projets cuprifères de Jbel Laasel et d’Oumjrane, ainsi qu’à la montée en puissance de la production d’or à Bakoudou. La société de bourse recommande de conserver le titre et le valorise à 1 206 DH, ce qui présente un potentiel de hausse de 19,4% par rapport au cours du 27 janvier. Managem devrait réaliser en 2015 un bénéfice de 390 MDH pour des revenus de 4 milliards de DH, en hausse respectivement de 14 et de 5%.
Même recommandation également pour SMI avec un cours cible de 3 625 DH, soit une croissance potentielle de 15%. Selon les analystes de la société de bourse, les indicateurs financiers de la SMI devraient se dégrader, compte tenu de leur positionnement exclusif sur l’argent qui a enregistré en 2014 une chute de 20%, et de la baisse escomptée de ses niveaux de marge. En attendant l’augmentation de sa production à 300 TM (tonnes métal), la filiale de Managem devrait renforcer ses travaux de prospection au Maroc. Ce qui devrait lui permettre de diversifier ses sources de revenus qui sont actuellement focalisées sur son unique mine d’Imiter. Ceci n’empêche pas la société de bourse de tabler sur un résultat net de 351 MDH, en hausse de 5% par rapport à 2014. En revanche, l’activité de la mine devrait générer un chiffre d’affaires en contraction de 2%, à 1 milliard de DH.
CMT, quant à elle, est recommandée à l’achat. Le cours du titre devrait croître de 22,3% pour atteindre un objectif de 1 541 DH. La compagnie devrait avoir du mal à dépasser la situation de baisse des cours de l’argent et du plomb, surtout après l’accélération du repli au second semestre de l’année dernière, sachant que les deux métaux représentent 92% des ventes de la société. Ce qui devrait grever ses résultats au titre de l’exercice passé. Pour faire face à ces difficultés, la société projette de poursuivre son projet d’augmentation de capacité de production de la mine de Tighza de 25%, projet qui, rappelons-le, serait achevé en 2018. Elle entend aussi se positionner sur d’autres minerais, notamment l’or en Guyane française à travers sa filiale Auplata ainsi que le cuivre à Tabaroucht. D’ailleurs, une étude d’impact a été commanditée et est en cours de réalisation. Dans l’attente de la concrétisation de ces ambitions, la société de bourse prévoit la réalisation par CMT d’un chiffre d’affaires de 431 MDH en 2015, en recul de 5%. Le résultat net part du groupe, lui, devrait se contracter de 19,7% pour totaliser 161,6 MDH. Vu ces résultats prévisionnels, CMT devrait offrir un taux de rendement des dividendes des plus intéressants à 8,7% contre 3,8% pour SMI et 2,8% pour sa maison mère Managem.

Karim Hajji, DG de la bourse de Casablanca

Casablanca à la troisième place

La bourse de Casablanca, est classée 3ème en Afrique avec une capitalisation boursière qui s’affichait au 20 mars 2015 à 50,7 milliards de dollars. Devançant ainsi le marché financier nigérian qui se classe à la 4ème place. A la seconde place, on retrouve l’Egyptian Exchange, 2ème avec une capitalisation boursière de 68,8 milliards de dollars au 17 mars 2015. Et  en tête de peloton,l’Afrique du Sud qui demeure à la 1ère place financière africaine avec une capitalisation boursière de 376 milliards de dollars au 20 mars 2015.

 CFG : Bon potentiel pour  les immobilières  

Les analystes de CFG Group recommandent de se positionner sur les titres Résidences Dar Saada et Addoha. RDS présente un potentiel de hausse conséquent, d’autant plus qu’elle traite avec une décote de 21% par rapport à son prix d’introduction. La société de bourse prévoit un cours cible de 280 DH. Ce qui représente une hausse de 55,5% de son cours actuel.
Concernant Addoha, les analystes estiment que la correction subie par l’immobilière suite à  l’annonce de son plan stratégique qui s’étale sur la période 2014-2017, n’est pas justifiée. Pour eux, le titre est valorisé à 45 DH avec un potentiel de croissance de 40,6%.

 Mauvaise appréciation du secteur pharmaceutique

Dans notre recherche, les experts de BMCE Capital émettent des réserves sur les performances du secteur pharmaceutique. En 2014, le chiffre d’affaires sectoriel pourrait afficher une quasi-stagnation (voir un léger repli), pénalisé par la politique de baisse des prix des médicaments instaurée par le Gouvernement et ayant porté sur 1 578 médicaments en juin 2014. Il est à noter qu’à fin septembre 2014, les revenus du secteur auraient reculé de 4,7% pour le marché privé, contre une évolution en volume de 2,8% souligne-t-on du côté de la société de bourse. Le secteur est confronté à plusieurs problèmes notamment, une production locale qui demeure insuffisante, ne couvrant que 65% des besoins de la population, une consommation moyenne par habitant qui est faible (414 DH)…

 A conserver

BMCE Capital recommande les deux valeurs cotées du secteur à conserver dans les portefeuilles. Sothema est valorisée à un cours cible de 1 262 DH, ce qui présente un potentiel de hausse de 0,4% seulement par rapport au cours du 10 février. L’opérateur devrait voir ses marges affectées par la baisse des prix de certains médicaments; quoique son positionnement sur les pathologies lourdes devrait permettre d’en atténuer l’effet. En parallèle, la société devrait redresser ses parts de marché sur le segment de l’insuline et ce, même si la contribution aux revenus demeure faible, avec un niveau de marges plutôt bas.
BMCE Capital prévoit la réalisation d’un chiffre d’affaires de 1,1 milliard de DH en 2014 et de 1,2 milliard de DH en 2015, en hausse respective de 1,5% et 4%. Les bénéfices, eux, devraient se situer à 89 MDH à fin 2014, en recul de 24,2% par rapport à 2013, avant de se redresser de 18,8%, à 105,7 MDH, à la clôture de l’exercice en cours.
Promopharm, quant à elle, devrait connaître des niveaux de marges en baisse à court terme au regard de son fort positionnement sur le segment des génériques, tout en demeurant à des niveaux confortables. Néanmoins, le laboratoire table sur une poursuite de la montée en puissance de ses écoulements sur le segment privé ainsi que sur celui de la cosmétique, marchés représentant à fin 2013 plus de 90% des ventes de la société. La société devrait également augmenter ses ventes sur le marché de l’export, tirant amplement profit de la notoriété de HIKMA à l’international. Sur le plan des perspectives, le management de la société envisage de réaliser à la fin de l’année en cours, le même niveau d’activité et de résultat qu’en 2013. Pour les perspectives, la société de bourse prévoit des revenus de 471,6 M MAD en 2014 (+5,0%) et de 495,2 M MAD en 2015 (+5,0%), pour des marges opérationnelles respectives de 15,0% et de 15,6% (contre 17,3% en 2013). La capacité bénéficiaire devrait se fixer à 47,3 M MAD en 2014 (-7,2%) et à 53,0 M MAD en 2015 (+12,0%).

 
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