Agriculture

Héliciculture, dans l’attente de son contrat-programme

L’élevage d’escargots est une pratique qui vient d’émerger au Maroc, mais promis à un bel avenir compte tenu de plusieurs facteurs favorables. Le développement de l’héliciculture pourrait constituer une stratégie de choix. par Abdelfettah ALAMI

En effet, l’élevage d’escargots pourrait contribuer à l’effort national en matière de création de l’emploi pour les jeunes agriculteurs et aussi à la promotion des exportations, surtout à destination de grands pays consommateurs d’escargots tels que la France, l’Espagne et l’Italie liés au Maroc par plusieurs accords commerciaux.

Un secteur peu novateur

La production d’escargots à l’échelle internationale et même dans notre pays, reste insuffisante vu la limite dans la nature de cette matière et l’insuffisance du ramassage. Ceci est dû à l’urbanisation, l’industrialisation et à l’augmentation des surfaces cultivées et à l’utilisation des pesticides. Au Maroc, la collecte reste, comme dans les autres pays, la principale source d’approvisionnement en escargots. La production nationale d’escargots terrestres est estimée à plus de 10.000 tonnes par an dont 80 à 85% sont exportées. Les récoltes d’escargots sont effectuées par des jeunes et des femmes et après un véritable tri sélectif ; les mollusques marocains sont vendus à des intermédiaires qui les livrent vivants dans des filets aux différents exportateurs. Malheureusement, ce réseau de ramassage informel provoque la perte d’un grand nombre de gastéropodes et constitue une véritable menace pour les peuplements hélicicoles.
Actuellement, la qualité des escargots destinés à l’exportation ne peut être véritablement garantie pour de nombreuses raisons, notamment, les mauvaises conditions de ramassage, les moyens malpropres, la putréfaction et contamination des escargots d’un même lot et plus grave encore, l’absence de contrôle qui devrait être normalement réalisé par l’inspection Vétérinaire. De plus, les escargots provenant du ramassage peuvent être contaminés par des produits phytosanitaires.

De nouvelles perspectives

Si durant les années 1990 et 2000, le Maroc était le 1er exportateur mondial d’escargots, notre pays a perdu ce classement du fait que le système de la cueillette et d’exportation a beaucoup réduit les potentialités du Maroc et a même menacé la race locale « la morgeute », de disparition. En plus, l’absence d’une vision claire du gouvernement pour ce secteur a aggravé cette situation.
La création, en 2015, de la Fédération Interprofessionnelle de l’Héliciculture – FIH – vient donc à point nommé. Selon Mme Nadia Babrahim, présidente de cette organisation, «Cette création récente est le fruit d’un long processus de contacts, de longues discussions et aussi de premières expérimentations d’implantation des techniques et technologies hélicicoles au Maroc…L’opportunité de développer une filière à fortes valeurs ajoutées devenait donc une évidence, afin d’investir les marchés internationaux en très forte expansion de l’escargot et de ses produits dérivés ».
Aujourd’hui, les attentes des membres de la FIH sont la signature d’un contrat programme pour renforcer le partenariat entre le ministère de l’agriculture et les opérateurs de la filière et encourager les investissements dans le secteur.
L’objectif est que, en 2020, la filière représente environ 10 000 exploitations, pour une surface d’élevage de 1000 ha permettant une production de 40 000 tonnes d’escargots par an. Il est prévu la réalisation de 10 000 unités d’élevage pour un total d’investissement de l’ordre de 1 MMDH et un chiffre d’affaires annuel de 1,6 MMDH.
Le projet hélicicole au Maroc ouvrira, donc, des perspectives importantes dans le domaine de la commercialisation et de la valorisation et surtout d’exportation. Le développement de l’aval de la filière revêt une importance particulière en matière de valorisation et de transformation (cosmétiques, gastronomiques, …).

Nadia Babrahim, Présidente de la Fédération Interprofessionnelle de l’Héliciculture
«Nous voulons inciter les investissements dans notre secteur»

NabilaVous êtes une fédération de création récente. Quels sont les éléments qui ont milité pour la création de votre organisation et quels sont les objectifs et les ambitions visés ?
Nadia Babrahim. Cette création récente est le fruit d’un long processus de contacts, de longues discussions et aussi de premières expérimentations d’implantation des techniques et technologies hélicicoles au Maroc.
De ce long processus se sont imposées deux conclusions fortes: le Maroc constitue un environnement particulièrement propice pour l’héliciculture, en plus il est le premier pays exportateur d’escargots terrestres en Europe.
L’opportunité de développer une filière à fortes valeurs ajoutées devenait donc une évidence afin d’investir les marchés internationaux en très forte expansion de l’escargot et de ses produits dérivés. En effet, partout dans le monde, la demande pour les escargots comme aliment gastronomique dépasse les capacités d’élevage et de production. De plus, les marchés pour les produits dérivés alimentaires comme le caviar d’escargot, et cosmétiques comme le mucus, explosent. De ce fait, de nouveaux concepts sont créés en permanence, diversifiant plusieurs segments du marché de l’héliciculture.
La culture de l’escargot représente donc une extraordinaire opportunité de diversification et de renforcement des activités pour les agriculteurs marocains. Mais cela demande des investissements productifs en formation, pour acquérir les expertises, compétences et des moyens techniques de production requis pour le développement d’une forte filière.
D’une part, c’est pour aider les agriculteurs à répondre à ces défis que le projet de création d’une Fédération Interprofessionnelle de l’Héliciculture a été lancé.
L’objectif est également d’associer les éleveurs, les commerçants, les exportateurs, les industriels (valorisation de la production et de la bave d’escargot: cosmétique et thérapeutique….) et toutes les coopératives et les associations hélicicoles. D’autre part, et en parallèle, l’objectif est de structurer et créer le cadre institutionnel pour le développement de la filière hélicicole. L’ambition à l’horizon 2020 est de consolider une filière hélicicole capable d’apporter les produits et les solutions à base d’escargots ou leurs dérivés aux marchés de la gastronomie et de la cosmétique.

Quelles sont les potentialités de notre pays, en héliciculture, aussi bien en termes de production, de transformation que d’exportation?
Le Maroc proche de l’Europe constitue un environnement particulièrement propice pour l’héliciculture, le cycle complet pour aboutir à des escargots à maturité pour la commercialisation est de 3 à 4 mois avec deux productions par an, alors qu’il est de 6 mois avec une seule production par an dans les autres pays, comme la France par exemple.
Le climat marocain permet donc de plus que doubler la production annuelle.
La production nationale d’escargots s’élève à plus de 10.000 tonnes par an, dont 80 à 85% sont exportés et 15 à 20% sont consommés à l’échelle nationale. De plus, le Maroc est le premier pays exportateur d’escargots terrestres en Europe, avec des exportations qui varient entre 7.000 et 8.000 tonnes par an, 80 à 85% desdites exportations sont acheminées vers l’Espagne, 10 à 15% vers le Portugal et 5% vers l’Italie.

L’ambition de votre fédération est la mise en place d’un contrat programme pour le secteur. Quelles sont vos attentes et où est-ce que vous en êtes dans la préparation de ce programme ?
Dans le cadre du Plan Maroc Vert, sa stratégie globale, les perspectives offertes de développement, le soutien apporté aux filières agricoles et son impact sur le développement de notre pays, un projet de contrat programme a été élaboré.
Et par l’étroite collaboration avec les responsables du ministère de l’Agriculture et l’encadrement de la COMADER, le projet de contrat programme de développement de la filière hélicicole est en cours de finalisation.
Aujourd’hui, les attentes des membres de la FIH sont la signature du contrat programme pour renforcer et inciter les investissements dans le secteur et contribuer au développement de notre agriculture.

Vous occupez, à coté de votre fonction de présidente de la FIH, le poste de présidente de la commission femme rurale de la COMADER. Quels liens entre les deux missions.
La femme joue un rôle très important dans le développement de la filière hélicicole. En effet, faisant partie prenante des objectifs tracés cités ci-dessus, il va de soi de valoriser le rôle de la femme comme il est impératif de l’intégrer dans les projets de l’héliciculture par la création des coopératives ou de groupements des femmes spécialistes dans l’élevage, la transformation et la valorisation.

Quelle est votre stratégie de communication pour une production et une consommation optimales des produits hélicicoles ?
Notre stratégie de communication est de s’impliquer tous comme membres de la fédération dans les objectifs tracés ci-dessus.
Nous commençons à court terme pour une production par l’organisation d’une journée nationale de l’escargot en partenariat avec le Ministère de l’Agriculture et de la pêche maritime et la COMADER, le but de ladite journée sera de recruter de nouveaux éleveurs, producteurs, transformateurs et valorisants des produits dérivés de l’escargot.
Ceci bien sûr avec la présence de médias, messages, flyers pour faire montrer notre produit et son importance.
A court et long terme, nous serons aussi à la recherche d’autres partenaires, sponsors et conventions pour pouvoir organiser des séminaires, des salons et autres dans le but de mettre en oeuvre nos objectifs. n

 
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