Portrait

Ingénieur parisien, manager chinois

Tous les «bosseurs» se ressemblent, sous tous les cieux. Timide, simple et cordial, ce manager formé à Paris et arrivé au Maroc en 2013 a progressé dans la même entreprise, depuis son arrivée dans le Royaume. Par Noréddine El Abbassi

Lorsque la Chine se réveillera, le monde tremblera, disait l’Empereur français, Napoléon Bonaparte. Dans le monde contemporain, la Chine s’est bel et bien réveillée, et le Monde n’a pas tremblé. L’idée occidentale qu’avec le pouvoir, les nations cherchent à dominer le Monde, reste au stade de la boutade. Mieux! La Chine n’a cessé d’investir en Afrique en général, et au Maroc en particulier. Dans notre pays, ZTE fait figure d’équipementier de référence. Pas un marché public n’est émis dans le domaine des télécommunications sans que le «géant» chinois n’y soumissionne.
Dans le monde de l’entreprise, ZTE a nommé comme Général Manager Maroc un profil atypique, pour la République Populaire. «J’ai fait une partie de mes études en France. C’est là où j’ai appris le français. Lorsque ZTE a cherché des collaborateurs pour son antenne au Maroc, ma candidature a été tout naturellement retenue. D’ailleurs j’avais déjà une connaissance indirecte du Maroc, à travers de nombreux ressortissants de ce pays, connus et fréquentés lors de mes études à Paris», explique-t-il dans un bon français, la touche chinoise en prime.
Dans son discours, Zhenglie a des manières simples, loin du formalisme encore en vigueur en Chine. Probablement un «acquis» de son passage en France. De cette expérience dans l’hexagone, il a également bénéficié d’un multilinguisme, doublé d’un multiculturalisme. Ce qui est un avantage, encore de nos jours.

Une enfance de fils unique
Li Zhenglie est né en 1982, à Sengyang, une ville industrielle du Nord Est de la Chine, à quelque 800 km de Pékin. «En Chine, le Nord Est est plus industriel, le Sud Est plus commerçant. Mon père était Directeur d’une entreprise de matériaux de construction, tandis que ma mère, travaillait elle, dans une entreprise de services», confie-t-il. Sa famille est assez classique pour l’époque. Comme souvent en Chine, plusieurs générations vivent sous le même toit, et Zhenglie, grandit auprès de sa grand mère, précisera-t-il. C’est d’ailleurs cette dernière qui s’était chargée de son éducation. Son enfance sera classique pour l’époque : «nous écoutions de la musique pop chinoise, et avions des loisirs simples  que connaissent d’autres de notre génération, sous d’autres cieux. Le football et la lecture étaient des occupations courantes. Sauf que peut être et contrairement aux facilités d’aujourd’hui, à l’époque, il fallait monter à la capitale pour trouver des produits de grandes marques», explique-t-il, tout en tempérant : «Certes, ce n’est pas mieux de nos jours qu’à l’époque. La vie est faite de changement, et chaque période a ses particularités, alors que les souvenirs d’enfance restent chéris et les périodes passées «embellies» dans notre mémoire et pour tout le monde. Je le pense en tout cas…», explique-t-il. Cela étant, il est vrai que la Chine est en plein essor industriel, et avance à pas de géant. Il lui a suffi d’une vingtaine d’années, pour être au niveau de ce que l’Europe a pris plusieurs siècles à réaliser.

Départ pour la France
«Dans les familles chinoises, on devient autonome après la 2e année d’études. Moi, j’ai quitté le foyer familial en 2003, pour la France», explique-t-il. Zhenglie travaille alors pour financer ses études. Il est employé dans la restauration pendant l’année, et comme ouvrier agricole pendant les vacances. «La première année, nous devions apprendre la langue. C’était la grande difficulté pour moi. Sinon, pour les matières scientifiques, je n’avais pas de difficultés», explique-t-il, la voix empreinte d’humilité. A l’écouter, on a l’impression d’avoir affaire à un Ould Ennass à la chinoise, «timide» et réservé. A croire que les films de Kung Fu ne montrent qu’un seul visage de la République Populaire.
«J’ai réussi à m’intégrer assez facilement en France. Je m’étais d’abord inscrit dans la petite ville d’Orléans, avant de m’installer à Paris, pour mon grand bonheur. Dans cette ville cosmopolite, je fréquentais des étudiants de différentes contrées, en plus des Français et de quelques Chinois. L’occasion également, de nouer des relations avec un certain nombre de Marocains dont je garde un bon souvenir. D’ailleurs, certains d’entre eux ont bien réussi leur parcours», explique-t-il. Zhenglie, une fois la langue française acquise,  poursuit des études d’ingénieur en électricité. Dès sa sortie de l’école, il commence à travailler pour une petite entreprise de panneaux photovoltaïques à Pau. «J’étais en charge de l’ingénierie commerciale pour les particuliers. J’y suis resté jusqu’en 2009, date à laquelle j’ai regagné le bercail, dans la Chine lointaine…», explique-t-il.

Un passage en Chine puis départ pour le Maroc
Retour à la réalité. Nous sommes en 2010, et Zhenglie commence à travailler dans sa ville natale. Là, il doit se frotter à la réalité chinoise: «la Chine est très différente de l’Europe. Autant la manière de travailler, que la culture d’entreprise, sont particulières. Il faut «concrètement» connaître la Chine pour être capable de travailler en Chine…», expose-t-il. Dans cet environnement codifié, Zhenglie trouve tout de même son chemin. Nous sommes en 2013, deux années après son mariage, et le géant ZTE cherche des collaborateurs pour son antenne au Maroc. Pour Zhenglie qui parle français et qui après tout, connait indirectement le Maroc à travers sa fréquentation des étudiants marocains lors de son séjour en France. Toujours est-il qu’il est recruté par ZTE, pour son antenne au Maroc, et la famille s’installe alors à Rabat : «je me suis tout de suite senti comme un poisson dans l’eau. Rabat est une ville magnifique, et dans la manière de vivre, on a l’impression d’être à 80% en France. Réellement, je me sens comme en France», affirme-t-il. ZTE est déjà implanté au Maroc depuis quelques temps, et Zhenglie débute comme responsable de comptes d’abord, avant d’être bombardé Responsable Pays. «J’ai une fille de 4 ans. J’apprécie la chance qu’elle a de connaitre cette expérience et de vivre dans ce pays. Il est vrai que tous les parents veulent ce qu’il y a de meilleur pour leurs enfants…» murmure-t-il. Depuis, Li Zhenglie renoue avec sa passion du foot, et développe des contacts avec les Marocains. Bienvenue.

BIO EXPRESS
1982 : naissance à Shenyang

2003: départ pour Orléans
2007: Master en ingénérie électrique  à l’Université Paris XI
2009: retour en Chine
2013: entrée à ZTE

 
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