Interview

Le Maroc, futur hub d’Eaton vers l’Afrique

Cyrille Brisson, Vice-président EMEA de la division Power Quality chez Eaton

Cyrille Brisson, Vice-président EMEA(Europe, Moyen-Orient, Afrique) de la division Power Quality chez Eaton, explique la stratégie du groupe américain pour le Maroc.

Challenge : Que représente cette nouvelle usine pour Eaton au Maroc ?

Cyrille Brisson : Cette extension représente beaucoup pour nous. Au fait depuis quinze ans, nous étions présents à Berrechid et maintenant, nous voulons étendre notre unité de production. Nous voulons transformer, ce qui, au départ, n’était qu’un atelier, en une vraie usine. C’est une extension très importante parce que la nouvelle usine est à peine à deux jours de transit de notre centre de livraison centrale à Lyon en France. Cela représente aussi pour nous, une opportunité de fabriquer au plus près de nos marchés et d’être capable de livrer très rapidement à beaucoup de clients européens. Il y avait certains de nos produits qui étaient fabriqués au Maroc depuis longtemps, mais, avec cette nouvelle usine à Midparc, nous sommes en train d’ajouter de nouveaux produits que nous allons développer et dont nous localisons la production ici, parce que l’expérience que nous avons eue au cours de ces quinze années, c’est que nous pouvons vraiment avoir le niveau de qualité et du coût de réactivité dont nous avons besoin. Pour Eaton, cela représente un intérêt énorme de mettre beaucoup plus de lignes de produits au Maroc, en vue d’être plus réactif vis-à-vis des marchés européens.  

C. Quels sont les nouveaux produits que vous comptez développer ?

C.B. Parmi les produits que nous avons déjà au Maroc, on peut citer par exemple les disjoncteurs hydromagnétiques, qui revêtent une technologie un peu particulière, conçus pour les applications difficiles. Ce que nous allons ajouter, c’est en fait des produits qui s’appellent Power Distribution Unit, qui servent à alimenter les serveurs, donc toute la partie informatique. Ce sont des produits assez techniques puisqu’ils ont un encombrement faible. Tout cela sera produit dans notre usine ici. 

 C. Quelles sont, aujourd’hui, les orientations stratégiques de Eaton au Maroc ?

C.B. Il faut savoir que la première étape de ce nous allons faire ne va pas fondamentalement concerner le marché marocain. C’est pour nous, une montée en puissance très importante puisque d’une fonction d’assemblage, on passe à une fonction d’assemblage et de contrôle des fournisseurs. Nous voulons donc avoir une chaîne d’approvisionnement qui soit beaucoup plus locale. Nous avons aussi monté une structure de management qui est beaucoup plus solide qu’avant. Je précise qu’avant, Eaton avait beaucoup d’opérateurs et de superviseurs, maintenant, il s’agit d’une vraie structure de management. Stratégiquement pour nous, cela veut dire qu’au lieu d’être simplement un atelier d’exécution, nous aurons vraiment une usine dans laquelle nous aurons de l’ingénierie, des supports avant vente et après vente. On va vraiment localiser beaucoup d’activités ici. Cela représente pour nous un changement relativement fort de la vocation de cette entité. Après, nous utiliserons une partie de cette usine pour servir les besoins du marché marocain, mais la vocation première de cette nouvelle usine est de servir un besoin au niveau européen et africain. C’est un besoin d’export d’abord. Cela ne veut pas dire que les prochaines phases de notre projet seront uniquement destinées aux besoins d’export, car il n’est pas impossible que les ressources industrielles dont nous disposons ici servent, à terme, le marché local. C’est vrai que nous avons déjà des clients marocains qui font de l’intégration. Des clients qui sont des tableautiers électriques, des intégrateurs informatiques et autres, qui prennent nos produits pour les intégrer. Eaton a une approche qui est d’aller vers un marché avec des partenaires.  

C. Quelles seront les différentes phases de cette implantation à Midparc ?

C.B. La première moitié de l’usine va concerner les activités de business unit et la deuxième moitié sera réservée à business unit électrique. En fait, à la longue, ce ne sera plus seulement les activités industrielles d’Eaton, car il y aura d’autres secteurs d’activité du groupe qui vont s’ajouter. Pour les détails, nous investissons aujourd’hui 12 millions de dollars pour cette usine, et la première moitié concerne tout ce qui est relatif à la distribution électrique et la protection électrique. Cette activité va prendre entre 40% et 50% de l’usine et on va avoir à peu près 200 personnes pour démarrer. Quand l’autre activité arrivera ( NDLR: les discussions sont entre le gouvernement et Eaton pour déterminer laquelle de ses autres activités prendra le reste de la place dans l’usine), il y aura des investissements supplémentaires en machines et autres. Je dirais qu’il y aura une rallonge pour que le bâtiment soit pleinement opérationnel, et là, il y aura un besoin de 50 à 300 personnes. Donc, dans 18 mois, on prévoit à peu près 500 personnes. 

C. Quel sera le rôle du Maroc dans votre expansion sur le continent africain ?

C.B. Il faut dire que notre base manufacturière en Afrique, est essentiellement concentrée en Afrique du sud et au Maroc. Jusque-là, celle d’Afrique du sud était la plus lourde, mais avec l’investissement que nous prévoyons, nous aurons une base marocaine qui va être au moins aussi lourde, sinon plus. Pour nous, il est clair que le Maroc est un pôle d’activité important. On a aussi vocation à implanter ici beaucoup de centres d’appel pour des clients africains. Pour le moment on démarre, mais ce n’est que le début avec moins d’une dizaine de personnes. Avec notre nouvelle usine à Midparc, on va avoir de la place pour employer une soixantaine de personnes. En termes de logistique, c’est parfois plus rapide d’avoir des expéditions directes de France, de Chine ou d’ailleurs pour les différents points du continent africain, parce que la logistique africaine n’est pas encore ce qu’il y a de plus simple à gérer. Donc pour nous, le Maroc est une base de fabrication, une base d’export et de services. Il est certain que pour l’Afrique francophone, par exemple, on aura des centres d’expertise ici. Dans notre stratégie, le Maroc a un rôle à jouer dans notre développement sur une bonne partie du continent africain. 

 
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