Portrait

Le Moroccan Mark Zuckerberg

Rien ne le prédestinait au monde de l’entreprenariat. Réda Berrehili a commencé par créer ses propres sites étant enfant. Aujourd’hui, il est devenu serial digital entrepreneur.

L’histoire de Réda Berrehili avec l’entreprenariat, a réellement débuté lors de son premier stage, effectué en France. Livré aux contraintes de la vie professionnelle, il a vite compris que son profil siérait mieux ailleurs, dans le monde des startups Tech. Et son histoire avec la technologie remonte à bien avant ses études supérieures.

Tout a commencé à l’âge de 11 ans. « Je créais des sites Internet chez moi que je mettais dans des disquettes. Je montais le site tout seul et la mise en ligne se faisait dans les cybercafés. Mon premier site parlait de Pokémon qui était à l’époque à la mode. Vu que je n’avais pas beaucoup de visiteurs, j’ai contacté Nadia Larguet, présentatrice d’Entr’act sur 2M. En 1998/1999, je crois être la seule personne sur terre à avoir pensé à lui envoyer un email. Et donc elle a répondu ! », se rappelle, sourire aux lèvres, Réda Berrehili. L’animatrice télé le met en contact avec son collègue Ramzi, qui lui a assuré un passage dans son émission Net+Ultra. « Je suis passé de 15/20 visites par jour à 350 visites quotidiennes. C’était le début de la gloire », dit-il amusé. Réda Berrehili ne s’est pas arrêté là. À 15 ans, il enchaîne en créant un site d’émulation de jeux-vidéos qui lui a permis d’atteindre plus de 2000 visites quotidiennes. « À cet âge j’étais toujours enfermé dans ma chambre devant mon ordinateur. D’ailleurs, mon père vient de me confier récemment qu’il voyait d’un mauvais œil mon confinement. Il croyait que j’allais devenir un tueur en série », précise avec une note d’humour le serial entrepreneur.

Parcours atypique
Réda Berrehili est né et a suivi ses études au Maroc jusqu’au baccalauréat. Un enseignement passé au sein des établissements de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) ; de l’École Arnone-Demoy & Saint Exupery au baccalauréat scientifique option mathématiques du lycée Al Jabr. « Après le bac, je suis parti en France où j’ai intégré une école d’ingénieurs, l’INSA de Lyon en choisissant la spécialité informatique. C’est à cette époque-là que j’ai fait mes vraies premières armes en tant qu’entrepreneur. Mon parcours professionnel peut être considéré comme atypique, car je n’ai jamais été salarié de ma vie. Lors de mon premier stage, j’avais alors compris que je ne pourrais jamais avoir de patron », confie la ceinture noire en taekwondo.

Voyant les quelques réticences de ses parents à choisir la voie de l’incertitude que caractérise l’entreprenariat, Réda Berrehili les rassure en leur faisant croire qu’il a choisi une filière classique dotée d’un stage de fin d’étude… Mais c’était sans compter sur son abnégation et sa volonté de suivre le chemin de l’aventure. « Ils voulaient que je fasse carrière dans le secteur bancaire. J’avais alors fait semblant d’obéir. Mais j’ai fini par me ‘‘cramer’’ tout seul. Après mon passage sur TF1 et une chaîne locale lyonnaise, j’envoie le lien à mes parents, ils étaient à la fois fiers et stupéfaits : ‘‘Comment ça, tu as monté ton entreprise ? ’’ ». L’anecdote continue à faire rire Réda Berrehili. Grâce à la subvention de 25.000 euros de l’État français destinée aux étudiants entrepreneurs, il a pu démarrer sa carrière d’entrepreneur. Il a ainsi créé 4 entreprises technologiques et participé à la création de 5 autres. « J’ai par exemple monté Tumbup, un guide TV personnalisé et social rebaptisé Mixotv. Un succès énorme : 100.000 utilisateurs dont 30.000 actifs. J’ai failli la vendre à Canal+. C’était le premier programme TV personnalisé qui choisissait ce qui était pertinent pour l’utilisateur. J’ai beaucoup travaillé avec TF1, Canal+, Prisma Media et le groupe Lagardère. J’ai aussi participé aux débuts de la création de Greendizer, startup marocaine de dématérialisation des factures, avec d’anciens collègues de Al Jabr qui étudiaient à Paris », se remémore Réda Berrehili qui compte parmi ses bébés Clopify, une startup « qui fabriquait le Nespresso de la cigarette électronique » et Hey Tom, une application d’aide à la prise de commande dans les bars et restaurants.

Début de la gloire
L’ascension et la notoriété de Réda Berrehili dans l’Hexagone, démarrent alors. En 2013, le magazine « Le Point » le sélectionne parmi les « French Mark Zuckerberg », liste comprenant les 10 entrepreneurs susceptibles de devenir les futurs Mark Zuckerberg (fondateur de Facebook). « Moroccan Mark Zuckerberg plutôt », se défend Réda Berrehili. Deux années plus tard, il rencontre les fondateurs de Squarebreak, alors agence traditionnelle de location de maisons de vacances avec services, présente en ligne. Il contribua au changement du modèle économique en donnant l’indépendance aux gestionnaires locaux et en transformant la startup en Entreprise technologique. Il se chargea même de mener le processus de levée de fonds à ce moment-là. Le succès est au rendez-vous : en février 2016, AccorHotels investit 3 millions d’euros dans Squarebreak, devenu alors leader français de la location de maisons de vacances avec services hôteliers. AccorHotels devient ainsi actionnaire à 49% de l’entreprise. Le Groupe hôtelier vient d’ailleurs de racheter la totalité des parts de Squarebreak, fin juillet 2017. En 2016, il est nommé président du Jury de « French Tech Ticket Paris», une initiative qui vise à attirer les entrepreneurs en France. Pour ce qui est de son choix de créer et vendre les startups au lieu de les développer et d’y rester, d’où son qualificatif de serial entrepreneur, Réda Berrehili s’explique : « Il y a l’excitation de la création d’une nouvelle aventure. J’aime être au début et réaliser l’explosion. Ensuite vient l’étape de la structuration de l’entreprise, c’est moins éclatant pour moi. J’aime bien le faire, mais de loin. Pour être honnête, je crois que j’ai des troubles de l’attention. Quand on a ce caractère-là, on ne peut pas se marier avec une entreprise pendant toute sa vie ».

Un possible retour au bled ?
Quid du Maroc ? « J’ai essayé de monter ma première startup à l’âge de 15 ans au Maroc, mais sans succès. Il était impossible de louer un serveur, d’acheter un nom de domaine avec une carte bancaire marocaine…», se rappelle-t-il. Il estime qu’ « Au Maroc, nous avons un potentiel humain encore inexploité. Il suffit de structurer et de normaliser l’écosystème, car aujourd’hui, créer une startup web ne coûte rien. Par exemple, dans le e-commerce, cela passe tout simplement par l’identification d’un produit que le marché attend, par une connexion internet fiable et rapide, la possibilité de recevoir des paiements et une infrastructure solide de livraison. Du côté des applications mobiles, nous pourrions avoir une place de choix si nous avions accès à un App Store marocain. Je pense qu’au Maroc, nous avons de l’argent et des talents, mais pas de marché auquel s’adresser. Ce qui rend difficile de créer des startups au Maroc pour le Maroc. Mais rien ne nous empêche de créer des startups au Maroc pour d’autres marchés», précise celui qui a fait de l’adage « Ce qui ne me tue pas me rend plus fort» son credo. « J’ai dû faire toutes les erreurs possibles et imaginables qu’un entrepreneur puisse faire. J’ai appris à travers toutes ces erreurs. Même si je les ai commises et que j’ai eu des moments difficiles, je ne regrette aucun, mais aucun, de mes choix ».

Bio express

1987 : Naissance à Casablanca
2005 : Baccalauréat scientifique
2010 : création de eMates et Tumbup
2011 : Diplôme de l’INSA Lyon
2014 : Investisseur et Advisor de Clopify
2015 : Rejoint et développe Squarebreak
2016 : président du Jury de French Tech Ticket Paris, investisseur et membre du conseil d’administration de Hey Tom

 
Article précédent

La nouvelle série Y de Huawei désormais disponible

Article suivant

Il fait l’actu : Mostafa Terrab PDG du Groupe OCP