Entreprises & Marchés

Les TPE souffrent du foncier

Immobilier professionnel. C’est un obstacle majeur pour les petits patrons. Le foncier représente jusqu’à 60% du fonds de roulement alors que 90% des TPE n’accèdent pas au système bancaire. par Roland Amoussou

Deux millions de petites entreprises opèrent, aujourd’hui, dans l’informel selon les statistiques recueillies auprès d’associations du secteur. Parmi les causes de cette situation, qui pénalisent fortement le tissu économique national, on note les lourdes charges fiscales qui contraignent ces petits patrons à rester dans le noir, mais aussi des difficultés liées à l’accès au foncier. Ce dernier point représente un souci majeur pour la TPE(Très petite entreprise), dans la mesure où les offres disponibles sur le marché ne sont pas adaptées à ses besoins. Même si, ces dernières années, nombre de parcs industriels ont été créés pour faciliter la vie aux entreprises, il n’en demeure pas moins que ces parcs ne disposent pas d’offres adéquates pour la TPE, puisqu’ils sont dédiés aux PME(Petites et moyennes entreprises) et autres structures qui ont des activités un peu plus denses. La très petite entreprise, avec un chiffre d’affaires de 1 million à 3 millions de DH, se trouve alors écartée. «Les parcs industriels ciblent les PME et les grosses boîtes», déplore Ahmed Bouzidi, Président du Modem(Mouvement d’entreprises du Maroc), un mouvement créé en 2011 et regroupant une centaine de chefs de TPE. « Les besoins en termes de foncier pour la TPE peuvent aller de 25m2 jusqu’à 500m2, qui représentent la moitié de ce qui est offert actuellement sur la place. Sur le marché des zones industrielles, le minimum de surface, c’est 1000 m2, alors que le maximum pour la petite entreprise, c’est 500 m2 », souligne-t-il.

Absence de stratégie nationale sur les locaux professionnels adaptés aux besoins de la TPE

Dans ce cas, la seule option qui s’impose, c’est la location. Mais, là aussi, il y a également un souci. Dans l’axe Casablanca-Rabat, la concentration importante d’entreprises a fait grimper le coût du foncier. L’acquisition d’un immobilier professionnel mobilise un capital énorme au détriment du fonds de roulement. Cela peut représenter jusqu’à 60% du fonds de roulement, fait remarquer Ahmed Bouzidi. Et la location, même si cela semble être la seule option plausible pour les petits patrons, il faut souligner qu’elle représente un obstacle important sur le plan du financement lors de la constitution d’un dossier de crédit par exemple. Pour information, plus de 90% des TPE sur le plan national n’accèdent pas au système bancaire. « Avant d’accorder un crédit, la banque exige des garanties parmi lesquelles le patrimoine foncier entre autres. Cela veut dire que si la TPE n’a pas acquis son foncier et qu’elle est en location, elle a moins de chance, voire aucune d’ailleurs, de voir son dossier de financement aboutir», explique Ahmed Bouzidi. Même son de cloche du côté de la Confédération marocaine des TPE-PME. « Ce problème de financement est connu. Les banques ne donnent pas de crédit aux petites entreprises. La TPE marocaine est marginalisée», affirme Abdellah El Fergui, Président de la Confédération. Concernant le foncier, il déplore l’absence d’une stratégie nationale sur les locaux professionnels. «Les parcs industriels qui existent actuellement ne sont pas adaptés aux besoins des TPE, qui sont de petites entreprises dans l’agroalimentaire et autres secteurs. Nous avons entamé l’année passée une expérience avec Al Omrane. On vise la mise en place de locaux professionnels adaptés (jusqu’à 200m2) constitués d’ateliers et de bureaux. Mais, nous sommes encore à l’étape des discussions», explique Abdellah El Fergui. Rappelons que le ministère du Commerce avait lancé en 1993 avec les communes, une initiative pour la création de locaux professionnels adaptés aux besoins des TPE, mais cette expérience n’avait pas abouti. Abdellah El Fergui estime, lui aussi, que la solution à la portée des petits patrons est la location.

Un manque d’accompagnement et d’informations aussi

« C’est la seule solution, surtout dans les villes comme Casablanca, même si le loyer coûte cher. L’acquisition est quasiment impossible puisqu’elle coûte trop chère », soutient la Confédération marocaine des TPE-PME. Par ailleurs, pour aider ces petites structures sur le financement, la Confédération entend mettre en place une société de cautionnement, dont la mission sera de fournir des garanties pouvant appuyer les dossiers de crédit de certaines TPE vis-à-vis de leur banque. Cependant, il n’y a pas que le foncier dont souffrent les petits patrons marocains. On note également le manque d’accompagnement, le manque d’informations aussi, notamment dans les régions qui sont loin de l’axe Casablanca-Rabat. « L’information ne circule pas. La grande majorité des TPE qui sont dans les autres régions ne savent pas qu’il y a des mesures d’accompagnement destinées à leur faciliter la vie », estime Abdellah El Fergui. Et c’est d’ailleurs pour cela, que la Confédération lance une nouvelle caravane de la TPE-PME, en partenariat avec l’ANPME(Agence nationale pour la promotion de la petite et moyenne entreprise), après celle qu’elle a organisée en novembre dernier. La semaine prochaine, (27 et 28 janvier) cette caravane va sillonner Al Hoceima et Nador. Et le 21 mars, elle sera à Taza. L’objectif de la Confédération est de sillonner toutes les petites communes du Royaume.

 
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