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La Loi 13-09, un rendez-vous raté avec la libéralisation

S’il est impossible de réécrire un passé qui s’apparente à une décennie ratée en matière de libéralisation du secteur des énergies renouvelables au Maroc, il n’est peut-être pas trop tard pour changer la trajectoire de la Loi 13-09 qui, au cours, des huit premières années de son entrée en vigueur, n’aura eu qu’un bilan très mitigé en matière d’orientation de l’investissement privé vers la production d’électricité à base d’ENR et de contribution aux objectifs ambitieux du pays en la matière à horizon 2030. En attendant les réformes promises par le ministre de tutelle, ce sont plus de 40 milliards de DH qui n’auraient pas été investis à ce jour dans des projets structurants demeurés en jachère en grande partie à cause d’un cadre réglementaire peu efficient.

La décennie en cours aura été celle du rendez-vous raté par le Maroc avec la libéralisation de son secteur énergétique. En effet, depuis son vote et sa promulgation en février 2010 et ce, au lendemain du discours du Trône de l’été 2008, qui avait placé toute une décennie, celle de 2010-2020, sous le signe de l’énergie et particulièrement de la maitrise de l’avenir énergétique du pays, la Loi 13-09 sur les énergies renouvelables, n’a eu qu’un bilan presque anecdotique alors qu’elle était censée doter le royaume d’un arsenal libéral aussi moderne qu’adapté à ses objectifs des plus ambitieux en la matière. C’est dire que malgré son esprit, à priori, favorable à l’investissement privé qui aurait eu pour vertu d’alléger le fardeau pour l’Etat incapable de répondre, à lui tout seul, aux besoins énergétiques grandissants (le Maroc doit doubler de capacité de production d’électricité chaque huit ans !), ce cadre réglementaire n’a pas eu les résultats escomptés.

Pire encore, les investisseurs privés, marocains et étrangers, qui ont succombé aux sirènes de cette loi assez attractive sur le papier, se sont retrouvés avec des projets qui se sont éternisés dans les limbes de la phase du développement. Aussi, près d’une décennie après l’entrée en vigueur de cette loi fondatrice et près de trois ans après avoir été complétée et modifiée par la Loi 58-15, seuls sept projets totalisant 626 MW ont pu franchir l’étape du closing financier (synonyme du lancement des constructions) sur une centaine de projets ayant franchi l’étape des études préliminaires et présentant une capacité de production cumulée de 3 000 MW. C’est dire que sur la vingtaine de développeurs nationaux et internationaux qui ont investi des centaines de millions de dirhams dans différents projets d’énergies renouvelables, seuls trois ont eu l’heur de franchir la ligne d’arrivée dont Nareva (la filiale d’Al Mada) qui revendique, à elle seule, près de 80% de la capacité cumulée de ces projets quand le saoudien Acwa Power avec sa ferme éolienne d’El Khalladi à Tanger et le franco-marocain Energie Terre avec des centrales de micro-hydroélectricité (au moyen Atlas) se partagent le reste. Mais si le constat du bilan (bien médiocre) de la Loi 13-09 est sans ambages, la question du pourquoi fait toujours débat…..comme ce fut le cas il y a quelques jours lors d’un conclave organisé par Aziz Rebbah, ministre de l’Energie et des Mines, et auquel a pris part le gotha des énergies renouvelables au Maroc qu’ils soient publics comme MASEN, l’ADEREE et l’ONEE ou privés dont les principaux développeurs, producteurs indépendants d’électricité, équipementiers, intégrateurs ou autres constructeurs opérant ou s’intéressant au marché marocain et qui n’ont pas raté cette occasion pour faire part de leurs griefs quant aux insuffisances du cadre réglementaire actuel et du dysfonctionnements de sa mise en œuvre. Aussi, il semblerait cette fois-ci que les autorités marocaines en charge du dossier de l’énergie ont pris réellement conscience de la nécessité de simplifier et d’amender pas mal de dispositifs, notamment ceux en rapport avec la gestion de l’excédent de production d’électricité, la définition de son tarif de vente, l’accès aux réseaux électriques propriété de l’ONEE, paramètres clefs de la bancabilité des projets des énergies renouvelables. L’autre point ayant été soulevé concerne le caractère fortement préjudiciable de l’absence à ce jour des décrets d’applications qui devaient accompagner la Loi 58-15 (qui est venue compléter la Loi 13-09) notamment en matière de définition des conditions de raccordement des producteurs privés d’énergie aux réseaux électriques urbains et ruraux de basse et moyenne tension. Enfin, selon les informations recueillies en off par la rédaction (vu que tous les dirigeants contactés par nos soins se sont abstenus de formuler officiellement leur point de vue sans doute pour ne pas embarrasser le ministre de tutelle dont ils attendent des amendements imminents allant dans le sens de leurs doléances), les acteurs privés auraient unanimement stigmatisé l’obstacle de taille incarné dans le manque de coordination entre les différentes parties prenantes publiques du long process d’autorisation, ce qui crée un véritable entonnoir administratif des plus préjudiciables pour la fluidification des projets d’énergies renouvelables déjà, par nature, aussi long et escarpé que les douze travaux d’Hercule !

 
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