Portrait

Nada Biaz, Directrice ISCAE Casablanca : 100 % ISCAE

Nada Biaz, Directrice ISCAE Casablanca

Elle aura étudié, s’est mariée et a enseigné à l’ISCAE de Casablanca avant d’en prendre la direction. Après un parcours académique centré sur l’enseignement public, cette brillante étudiante a choisi de ne jamais quitter l’école, continuer à apprendre en étant enseignante. Par Noréddine El Abbassi

On est plus souvent le produit de son milieu, que de son époque. C’est la constatation qui vient à l’esprit, quand on passe en revue le parcours de Nada Biaz.
Lorsqu’on la rencontre, la première impression, qui se confirmera d’ailleurs lors de l’entretien, est que l’on est en face de la femme active, dans toute sa splendeur. Sur le plan vestimentaire, c’est la veste en velours, qu’affectionnent les enseignants universitaires, que véhiculent les romans américains. Un pantalon sombre complète la mise, cela va de soi. L’ensemble trahit-il la personnalité ? En tout cas, on aime être confortablement vêtu, sans délaisser le sens du style. Et son style, c’est celui des étudiants, ayant  longtemps fréquenté les amphithéâtres,  par amour des concepts, sans  céder à l’appel, souvent pressant, de l’activité du “terrain”.
Nada est née en 1969, à Rabat, dans une famille qui comptait quatre enfants. Ses parents sont tous les deux, au départ,  de hauts fonctionnaires dans l’administrations centrale de la capitale. Son père sera par la suite, Directeur Général, de l’Office National des Aéroports (ONDA), lorsque sa mère est enseignante de mathématiques à l’Ecole Normale Supérieure. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer,  Nada poursuivra sa scolarité dans le système public, après avoir passé ses “petites classes” à la mission. “Nous étions très arabisants à la maison. C’est sans doute parce que mes parents ont fait leurs études en Syrie. Ils étaient très ouverts, nous faisaient totalement confiance et cultivaient l’échange entre nous. Par ailleurs, et pour les études, ils étaient très portés sur les sciences dures: les mathématiques en premier lieu”, explique-t-elle, en toute simplicité, dans un français fluide. Elle a dix années, lorsque la famille quitte la capitale pour Casablanca où son père a été affecté. Ce changement de résidence, n’influe pas sur la scolarité des enfants, qui  restent dans le même système bilingue.

Tous les chemins mènent à l’ISCAE

Nada bénéficie tout de même, d’une éducation “classique”, dans un milieu favorisé. “Ma mère était mon modèle de femme. Celui des femmes très instruites, modernes et actives de la Syrie de l’époque. Elle avait beaucoup d’activités sportives et culturelles, et m’entrainait dans son sillage”, rappelle-t-elle, ponctuant sa confidence d’une gestuelle  quelque peu nerveuse. Serait-elle animée d’un débat intérieur, qui reflèterait la profondeur de sa réflexion ? Comme si chacune de ses paroles était examinée, soupesée, avant d’être exprimée.
Les loisirs de la jeune Nada sont multiples et variés. Elle pratique autant la danse, que le piano, et s’adonne à la natation et au tennis. “A l’école publique, j’étais confrontée à la réalité marocaine, mes camarades de classes venant de différents milieux. Dans mes loisirs, je fréquentais des filles de milieux plus aisés. Cela m’a permis de connaître les deux facettes du Maroc, et d’avoir une certaine ouverture d’esprit. Rien ne m’étonnait, car je connaissais la réalité du pays. J’en suis encore reconnaissante à mes parents qui m’ont permis cette ouverture”, développe-t-elle, entre gestes des mains et haussements de sourcils. Probablement pour appuyer ses affirmations et exprimer, en quelque sorte, sa reconnaissance pour la chance que la vie lui a donnée.
Lorsque Nada décroche son Bac Sc Mathématiques au Lycée Chawki en 1987, elle opte pour des études supérieures au Maroc. Ce sera justement à l’ISCAE, Institution dont elle prendra les rênes, quelques années plus tard… L’école est alors la seule Business School Publique du Royaume, très cotée, et où l’admission se fait sur concours national. L’environnement est très différent de son lycée, et les étudiants qui y accèdent affluent de tous les horizons, de toutes les régions et même dans certains cas, d’autres pays. La concurrence  est rude et les places sont chères.
Mais Nada est une battante et le travail ne lui fait pas peur. Alors qu’elle continue à pratiquer ses loisirs pendant son temps libre, elle excelle dans les études et terminera major de promotion. Dans la foulée, elle se marie en 1990 avec un camarade de classe, une année avant l’obtention de son diplôme, en option Finances. La raison de ce choix? L’appétence presque congénitale pour les mathématiques lui a donné un goût pour le concret. Lorsqu’elle termine ses études en 1991, elle s’envole  pour Paris, suivre les cours de l’université Dauphine, mais interrompt son passage à Paris pour revenir au pays. Là, elle mène de front un Doctorat en troisième cycle en marketing au Maroc. La même année verra la naissance de son premier enfant, alors qu’elle est encore étudiante, et en même temps enseignante vacataire à l’ISCAE. “J’ai pu mener de front ces différentes activités, grâce  à l’aide de ma famille et de mon mari, qui s’occupaient de mon jeune enfant, quand j’étais prise par mes études ou par mon travail,” explique-t-elle, consciente de sa chance et sans prétention aucune. Le virage interviendra en 1995, une année après l’obtention de son diplôme. Son mari préparait l’entrée aux “Ivy leagues”, le groupe des Universités Américaines les plus prestigieuses. C’est pour cette raison que la famille déménage à Boston. Ce sera un évènement, puisqu’il sera le premier marocain diplômé, à intégrer la prestigieuse Business School en 1996. Nada, elle, se forme en continue dans l’Université. Autre évènement marquant cette même année, sa fille voit le jour à l’hôpital de Harvard et passera d’ailleurs, ses premières années à la crèche de l’université. “Nous avons déménagé sur le campus de Harvard. Pendant que mon mari suivait ses cours, j’étais en formation continue sur le campus en marketing stratégique et  ventes, en psychologie du consommateur et de l’enfant. Je participais également au Club des partenaires de Harvard,” se remémore-t-elle, cachant difficilement sa fierté pour son mari. Comme si sa réussite était le fruit d’un travail d’équipe.

Entrepreneur puis retour à l’enseignement

Nous sommes en 1998 lorsque la famille regagne le Maroc. Il était en effet grand temps d’entrer de plain-pied dans le monde de l’entreprise. Nada fonde un centre de langues avec son mari, English First. Elle fait ses premières armes comme Directrice Marketing et Commerciale, avant d’endosser la casquette de Directeur Général. Dans l’intervalle, et en 2006, son troisième enfant viendra agrandir la famille. L’aventure entrepreneuriale prendra fin en 2006, lorsqu’elle retourne à l’enseignement. Cette fois-ci, au sein de l’école casablancaise de management, HEM.
Le séjour de Nada aux USA lui aura été profitable, puisqu’elle donne des cours en anglais. Dans le processus, elle découvre le développement personnel et dévore tous les livres à sa portée: “c’était plutôt un intérêt culturel. De même que je me suis orientée en troisième cycle, vers le marketing pour exprimer mon côté artistique. Tout comme je me suis intéressée au développement personnel, pour apprendre à faire ce qui me plaît et m’épanouir professionnellement”, développe-t-elle. C’est peut-être cela qui a influencé sa vision de l’ISCAE qu’elle considère comme un lieu holistique où l’on acquiert des outils, mais surtout où l’on apprend à faire des choix en accord avec sa nature profonde. Pour elle, son école est un “melting pot” de différentes régions, de différents pays, avec une ouverture à l’international et sur le monde Anglo-saxon. C’est peut-être pour cela qu’elle a lancé des cours en arabe, français et anglais. “L’objectif, pour moi, est de permettre aux étudiants d’acquérir des savoirs, des savoir-faire, et des savoir-être. Mais dans le fond, j’ai toujours été “ISCAEiste” dans l’âme. J’y ai étudié, épousé un ISCAEiste, et je fais partie du réseau des anciens élèves avant de devenir la directrice de l’ISCAE Casablanca”, conclut-elle. Visiblement, certaines écoles arrivent à fédérer, lorsque d’autres divisent.

 
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