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Quel sens donner au taux de la pression fiscale

Mohamed Boussaid, ministre de l’Economie et des Finances.

Au Maroc, le TPF, limité au rapport entre les recettes fiscales du budget général de l’Etat et le PIB, a été de 22,3% en 2013. Cette démarche d’appréciation est-elle pertinente ?  par mohamed Amine

Le TPF permet de mesurer le poids des prélèvements obligatoires dans un pays. La pression fiscale (PF) est traduite par le rapport entre les recettes fiscales d’une part, et une grandeur représentant les ressources économiques, d’autre part : produit national brut, revenu national, PIB, population active…Le quotient le plus généralement retenu est celui du montant des prélèvements sur le PIB ; Il permet d’apprécier l’évolution dans le temps de la PF d’un pays et d’établir des comparaisons d’un pays à l’autre, malgré les difficultés dues aux différences de structures. Au sens large, la pression fiscale inclut les cotisations sociales. Dans un sens plus étroit, elle est limitée aux impôts et taxes parafiscales perçues au profit de l’Etat ou des collectivités publiques.
Au niveau macro-économique, le TPF est faiblement significatif, surtout dans une économie ravagée par l’informel. Il ne permet pas d’observer le poids effectif de la charge de l’impôt sur chaque catégorie sociale et sur chaque secteur économique. C’est un peu comme le PIB par habitant qui permet de classer certains Etats comme étant parmi les plus riches dans le monde, alors que la majorité de leur population vit dans la pauvreté extrême et une minorité infime vit dans l’opulence.
A titre d’exemple, au Maroc, le PIB/habitant tournerait autour de 5.000 dollars, soit un revenu mensuel de 3.700 dirhams ! Alors qu’un individu qui fait partie des 20% les plus pauvres dans la population, vit avec moins de 10 dirhams par jour (300 dirhams par mois), et à l’autre extrême, un individu peut  disposer de revenus supérieurs  de plusieurs centaines de fois le revenu du premier. PIB par habitant et TPF traitent les deux couples de la même façon. C’est une des raisons qui fait de la comptabilité nationale un moyen très froid d’analyse des données et des statistiques un art de mentir scientifiquement.
Sur le plan international, la comparaison entre les Etats est souvent incorrecte, car aussi bien le numérateur (total des recettes fiscales ou des prélèvements obligatoires), que le dénominateur (PIB) ne font pas l’objet d’une homogénéisation préalable. Cette comparaison peut même inciter les Etats à une compétition fiscale, voire une « concurrence fiscale internationale », nuisible surtout pour les Etats dépourvus de ressources naturelles.
Cependant, le TPF peut être désagrégé et offrir une image plus significative sur les inégalités dans la contribution à l’impôt. Cette désagrégation peut être faite par type d’impôt (Voir tableau). Dans ce cas, elle révèle la prédominance des impôts indirects, surtout ceux frappant la consommation.. En matière de TVA, elle pourra révéler la part des recettes TVA par type d’une désagrégation plus poussée, à l’intérieur de l’IR, qui montrera l’importance des prélèvements retenus à la source sur les salaires consommation, par taux (…).
Enfin, il est possible d’appliquer cette démarche de manière sectorielle, ce qui permettra d’observer et de relever les secteurs qui supportent le plus ou le moins d’impôt.
Pour l’investisseur, cela lui permettra de mieux orienter ses dépenses et d’optimiser ses choix. Pour l’Etat, cette approche analytique devrait permettre de mieux concevoir les politiques fiscales vers plus d’équité. Beaucoup plus, elle peut servir à mieux orienter la politique économique en favorisant fiscalement les secteurs stratégiques à haute valeur ajoutée.
En somme, cette voie rendrait l’économie plus intelligible et renforcerait la visibilité des décideurs. Encore faut-il qu’existent effectivement, de vrais décideurs responsables de leurs dires et de leurs actes.

 
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