Interview

Aziz Bouslamti, président du Groupement professionnel des prestataires de l’événementiel au Maroc : «Aujourd’hui, la situation est la même qu’il y a 6 mois»

Dans le monde entier, le confinement et les restrictions de circulation ont entraîné des annulations ou des reports de nombreux événements, notamment dans le secteur de l’évènementiel. Ce dernier a été durement touché dans le Royaume, compte tenu de l’arrêt brutal de toute activité en raison de la crise sanitaire. Depuis la reprise, quel est l’état de ce secteur ? Pourra-t-il se relever de la crise ? Aziz Bouslamti, président du Groupement professionnel des prestataires de l’événementiel au Maroc (GPPEM) nous en parle.

Challenge : Le secteur de l’événementiel était presque à terre. Après quelques mois de reprise qu’elle est l’état des lieux ?

Aziz Bouslamti : Il n’y a jamais eu de reprise pour le secteur de l’événementiel. Aujourd’hui la situation est la même qu’il y a 6 mois. Il est interdit de rassembler plus de 20 personnes. Et, donc, sans rassemblements, point d’événements. Malgré le plan de relance, le guide de relance et le protocole sanitaire, élaborés par le GPPEM et livré aux différentes autorités, malgré toutes les lettres/demandes et toutes les rencontres effectuées par les membres du Comité de Veille du GPPEM avec différents responsables du gouvernement, dont la primature, le ministère de l’industrie, le ministère de l’intérieur, le ministère de la santé… A ce jour nous n’avons eu que des promesses mais aucune proposition concrète. Même la CGEM n’a pas répondu à nos demandes.

Concernant l’état des lieux, je peux vous confirmer que la situation est dramatique. La résilience, dont a fait preuve la grande majorité des opérateurs du secteur de l’industrie de l’événementiel durant les premiers mois de l’interdiction des rassemblements, a laissé place au désespoir et à l’inquiétude. Le secteur est lourdement sinistré et les opérateurs n’arrivent plus à payer leurs salariés et leurs charges.

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Challenge : Il y a deux grands événements mondiaux organisés en 2021 par la banque mondiale et l’organisation mondiale du tourisme à Marrakech. Pouvons-nous avancer qu’il y aura une sortie de crise en 2021 pour l’événementiel ?

A.B : le Maroc a démontré durant les 25 dernières années, période qui a permis de créer une expertise nationale dans le domaine et un capital immatériel inestimable, sa capacité à organiser des événements nationaux et internationaux de grande envergure. Les deux événements que vous citez en sont la preuve. Néanmoins, quel que soit la dimension de ces deux événements, ils ne pourront sauver le secteur de l’industrie événementiel des graves conséquences de la crise qui l’impacte actuellement.

Je reste convaincu que sans la validation par le ministère de la Santé et l’application par le ministère de l’Intérieur du protocole sanitaire, élaboré par le GPPEM et Bureau Veritas avec le soutien du ministère de l’Industrie et d’IMANOR, la reprise de l’événementiel ne peut être envisagée dans le respect des mesures de sécurité sanitaire. La reprise n’a que trop tardé. Ce retard impacte directement les opérateurs du secteur dont la situation ne cesse de s’aggraver jour après jour. Donc, je ne peux pas être optimiste pour 2021. Un drame socio-économique se dessine.

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Challenge : Quelles solutions proposez-vous pour remonter la pente ?

A.B : Tout d’abord, il s’agit d’appliquer les mesures (communication, fiscales, sociales et bancaires) proposées par le GPPEM dans son plan de relance. Elles représentent une partie de la solution. Ensuite, la prise en compte de l’hypothèse décisive que nous proposons : le maintien de la commande publique qui est vitale pour la survie du secteur. Enfin, le protocole sanitaire qui permettra d’organiser des événements, malgré le Covid-19. D’un autre côté, le gouvernement doit relever le nombre de participants autorisés à se rassembler à 100 personnes voire plus. Le respect des mesures du protocole sanitaire dédié à l’événementiel le permettent.

Il est important de préciser que la reprise de l’événementiel participera à la reprise du secteur du tourisme. L’organisation d’événements de tous genres participe à hauteur de 30% à 50% de l’activité des professionnels du tourisme (agences de voyage, hôtels, transporteurs…), selon les villes et les régions. Toutes ces propositions doivent faire l’objet d’un contrat cadre à signer avec le ministère de l’Industrie qui, comme dans tous les pays disposant d’une industrie événementiel comme celle développée au Maroc, devrait offrir sa tutelle au secteur.

 
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