Les chroniques de Jamal BerraouiSociété

Coronavirus : la peur de l’autre

Une pétition circule à Sidi Rahal. Cette petite bourgade à quelques encablures de Casablanca a connu un développement urbain explosif.

Des immeubles, des résidences de différents standings ont poussé comme des champignons. Les acquéreurs viennent souvent des grandes villes avoisinantes, en particulier Casablanca, soit pour en faire une résidence principale, soit et c’est plus courant, une résidence secondaire. La pétition au nom des « autochtones » réclame le départ de ces « intrus » vers Casablanca. Pourquoi ? Parce qu’il y a eu des cas du Covid-19 dans ces résidences.

On a déjà vu des touristes chinois agressés à Rabat mais aussi à Paris ou à Venise. Parce qu’il est imparable, il faut bien trouver un responsable à ce fléau et c’est souvent l’autre.

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Qu’au Maroc des gens réclament le départ de leurs voisins, me révolte. Mais il y a eu pire. En Egypte, un couple atteint du Covid-19, confiné chez lui, a dû poster une vidéo pour réclamer une protection contre ses voisins d’immeubles qui ont interdit aux livreurs, y compris ceux de médicaments, de servir le couple. Pourtant ils sont voisins depuis 10 ans ! Ce genre de période révèle les deux facettes de l’humanité : l’une lumineuse, faite de solidarité, de compassion, de don de soi, l’autre hideuse faite de rejet, de haine, de repli. L’élément catalyseur de la première c’est l’espérance, pour la seconde c’est l’ignorance qui nourrit l’abjection.

Au moyen-âge, face à la peste, on a brûlé tous ceux qui avaient des comportements erratiques. Des femmes délirantes ont été accusées de sorcellerie et brûlées. Cela n’a pas empêché les ravages de la pandémie, mais le réflexe a persisté et prend les actuelles circonstances comme mode d’expression.

C’est grâce à l’explosion urbanistique que les « autochtones » de Sidi Rahal ont bénéficié d’une élévation du niveau de vie. Cela n’a pas résisté à quelques cas, très réduits, de coronavirus… Il faut réellement méditer ces épiphénomènes parce qu’ils expriment un atavisme : la peur de l’autre.

 
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