Economie

Coût des vacances : Une difficulté pour la classe moyenne

Pouvoir passer de bonnes vacances est un vœu que beaucoup de Marocains n’arrivent plus à réaliser. Hier encore, les plages s’offraient aux familles venant des villes non côtières et avec elles des maisons louées à des prix abordables. Les chanceux parmi les employés du secteur public peuvent bénéficier de la bénédiction des comités trop syndicalisés et, aux penchants clientélistes, des œuvres sociales et passer ainsi une semaine dans un studio pour goûter  furtivement aux plaisirs des plages.

Les vacances constituent de nos jours une composante de l’économie partagée. Louer sa maison pendant la saison estivale  permet à des familles d’assurer un revenu qui comblera les trous de caisse qu’engendrent l’inflation et la liste des dépenses incompressibles. Les estimations des chiffres de l’économie partagée ou collaborative  commence à prendre de l’ampleur. Des milliards de dollars sont avancés comme chiffre d’affaires découlant, entre autres, de la location des appartements dans ce cadre. Le fisc n’est pas toujours loin de ces niches qui commencent à être visibles. En France et aux USA, l’économie partagée est entièrement appréhendée par le fisc. Les systèmes d’information ne permettent que rarement d’échapper à l’œil du percepteur.

Le bon vieux temps

Au Maroc, les familles moyennes ou de conditions modestes avaient par le passé beaucoup de possibilités de s’évader du quotidien. Les habitants de Marrakech pouvaient, à titre d’exemple, louer des maisons à El Jadida ou à Safi, ou pendre la direction de la vallée de l’Ourika  ou celle de  Moulay Brahim. Le retour du chef de famille de son voyage de prospection d’une maison dans ces lieux était attendu avec bonheur. Les préparatifs s’intensifiaient en même temps que ceux relatifs à l’acquisition des billets de bus dans les agences à Jamnâ el fna. L’arrivée de la famille au bord de la mer n’était que la première vague qui remplit les chambres souvent exigües des maisons louées pour le mois d’août. Certains proches ou même les voisins du Derb ne se gênaient pas en débarquant chez vous  inopinément avec leurs sacs. Logés et nourris gratis, ils arrivaient à passer, sans gène, quelques jours au bord de la mer. C’était pour ces raisons que certaines familles entouraient  leur départ en vacances d’un grand secret. Les cars de 6 h du matin étaient prisés pour échapper aux « bargagas » qui étaient cette heure, plongés dans un sommeil profond.  Dans les années soixante dix, le loyer d’une grande maison à El Jadida ne dépassaient guère 500 dirhams par mois.

Les prix pratiqués par les hôteliers sont considérés très chers par les Marocains.

Des vacances pas à tout prix

De nos jours, de petits studios sont loués à plus de 800 dirhams  le jour. Les habitudes du passé sont effacées par le coût du voyage et de la location. On ne parle plus d’un mois de vacances au bord de la mer mais d’une semaine  ou  d’une dizaine de jours au maximum. Les campings étaient prisés par une catégorie sociale et offraient des conditions de sécurité et un espace sain pour les familles. De nos jours, beaucoup de familles ont renoncé aux vacances dans les campings. Les excès de l’investissement immobilier ont asséché les terrains communaux qui étaient destinés aux campings.

 Rares étaient les vacanciers qui séjournaient dans les hôtels. Les prix des nuitées dans ces établissements n’étaient accessibles qu’à une catégorie sociale aisée. La sélection par les prix s’est accentuée aujourd’hui. Le revenu de la classe moyenne oscillant entre 6000 et 20 000 dirhams ne permet pas de couvrir toutes les charges de cette classe. Le logement  et l’éducation constituent les postes les plus importants dans la structure des dépenses. La  couverture des autres postes comme les équipements électroménagers ou celles liées aux différentes fêtes ou aux vacances  se fait au moyen des crédits. Les publicités lancées par  les établissements de crédit  s’intensifient à la veille des vacances et pendant les périodes  qui coïncident avec les cérémonies liées aux fêtes. Même le mouton est présenté comme un produit stratégique à financer et partant à épaissir les marges bénéficiaires de ces établissements. Le lendemain des vacances est souvent cauchemardesque pour une grande partie des familles moyennes. Les frais liés à la rentrée scolaire et la perspective des premiers prélèvements liés aux dettes vacancières   augurent d’un mauvais départ.

 Les vacances en dehors du lieu de résidence deviennent de plus en plus courtes car  de plus en plus chères. Un budget de 10 000 dirhams ou même de 20 000 dirhams ne peut assurer une villégiature  dans le confort. Les cotes du nord du Maroc souffrent d’un manque d’offres en matière d’établissement d’hébergement. Les rares hôtels de cette cote affichent des prix exorbitants qui ne correspondent nullement à la qualité de leurs équipements ni à celles de leurs prestations. Le mois d’août est une aubaine en matière de chiffre d’affaires  pour beaucoup d’hôteliers. Il est aussi le mois ou la courbe des arnaques enregistre les plus grandes variations à la hausse.

Passer des vacances pour rompre avec les réunions, les meetings et les vicissitudes des coulisses est très important pour les hommes politiques. La ruée vers le nord du pays est stratégique. Le séjour du Roi dans cette région et la recherche de la proximité avec les centres du pouvoir fait de la recherche d’une résidence pour l’été une affaire de grande importance. Les prix parfois déboursés par  certains responsables avoisinent des seuils astronomiques. En France, les vacances des hommes politiques sont scrutées à la loupe. Les vacances «  bling bling » ou celles passées dans le grand  luxe sont déconseillés aux personnes soucieuses de leur image devant les électeurs. Chez nous, le luxe ne tue pas politiquement. Exposer les signes extérieurs de richesse est un sport national qui se pratique dopage aidant. 

 
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