L'édito

Débats escamotés


N
ous avons la mauvaise habitude
d’importer les débats français
tels quels, sans même essayer de
tenir compte du contexte. Ainsi en est-il
de la compétitivité, on ne peut qu’être
atterré par ceux, très nombreux, qui la
lient exclusivement aux charges, dans
un pays où le SMIG est inférieur à 2000
DH. Une voiture sur trois circulant en
Chine est allemande. Le coût du travail,
dans le secteur automobile est plus élevé
en Allemagne qu’en France, parce que la
bonne santé de cette branche se reflète
sur les bulletins de paie. Ce coût là n’est
pas décisif. La qualité, l’innovation
technologique  font la différence. Le débat sur 
la compétitivité doit porter sur d’autres
facteurs liés au management, au contrôle
de qualité, à l’organisation des filières
etc… Le limiter à un cahier de doléances
portant exclusivement sur la fiscalité et
le droit de travail, c’est l’escamoter et
retarder l’avènement des conditions de
l’émergence.

 


D
es paysans de la région
d’El Hoceima ont affronté les
forces de l’ordre pendant plusieurs
jours, refusant de laisser brûler
leurs récoltes de cannabis. Ces violences
sont récurrentes, le débat qui s’ensuit
aussi. Régulièrement, quelques voix,
rationnelles et courageuses revendiquent
la dépénalisation. Il ne s’agit pas de se
cacher derrière les usages médicaux, qui
ne consomment qu’une très faible partie
de la production mondiale. Il ne s’agit
pas, non plus, de qualifier ces drogues
de douces. Mais l’on sait que le tabac et
l’alcool sont néfastes pour la santé publique.
En sortant le cannabis de l’interdit

on élimine de facto les mafias et leur
puissance. Les Etats pourront récupérer
des taxes et en utiliser une partie dans la
prévention, beaucoup plus effi cace que la
répression. Dépénaliser la consommation
et réprimer les cultivateurs n’est ni cohérent,
ni efficient, cela fait cinquante ans
que cela dure, et le nombre des addicts ne
fait qu’augmenter. Il est temps de changer
de voie.

 


L
a France, pays libéral, a choisi de
créer une banque publique d’investissement.
Dédiée aux PME, elle devrait fonctionner
en synergie avec les régions. Il est trop
tôt pour en mesurer l’impact mais le
concept est séduisant, surtout l’idée de
fonds affectés à la recherche, l’innovation
et le soutien à l’export. Au Maroc,
les PME ont énormément de difficultés
à accéder au crédit, 
surtout quand le promoteur ne dispose
pas d’un patrimoine à proposer en garantie
des lignes demandées. Dans le contexte
d’une illiquidité quasi-permanente, ces
difficultés sont accrues. Cette fois, on serait
inspiré de copier la France et d’ouvrir
un débat autour de ce sujet. Les PME sont
l’avenir de l’industrialisation du pays et
donc de la lutte contre le chômage. Une
banque publique pour accompagner leurs
investissements, soutenir leurs activités a
parfaitement sa place, à condition de fixer
des règles de gouvernance très strictes,
pour ne pas faire un remake de la BNDE.
De peur d’être taxé de « ringard », aucun
parti politique ne le propose. Maintenant
que la France l’a fait, peut-être qu’ils y
penseront.

 

 
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