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Démocratie participative : un pas important sur la voie de l’Etat de droit

On n’est pas loin de l’objectif fixé par la Constitution de 2011 qui prévoit que les projets de lois organiques doivent être soumis pour approbation au Parlement, avant la fin de l’actuelle législature. Deux nouveaux projets viennent d’être rendus publics, le premier porte sur les « motions en matière législative » et le second sur le « droit de pétition ». Mais le nombre de lois organiques déjà adoptées (9) et celui des projets en cours (9), ne doivent pas nous faire oublier qu’un long chemin reste à parcourir pour respecter l’échéance constitutionnelle. En effet, les projets de lois organiques qui attendent d’être mis dans le pipeline ne sont que quatre mais ils constituent, de notre point de vue, le « noyau dur » dont la préparation exigera de la concertation et de la sagesse politique (Langue amazighe, Droit de grève, Conseil de Régence, Conseil national des langues et de la culture marocaine). par C.A.H

Avec les deux nouveaux projets de lois organiques, le Maroc s’apprête à entrer dans une nouvelle phase du processus démocratique, celle de la démocratie participative qui sera exercée à travers deux mécanismes prévus par la Constitution de 2011 ; le « droit de présenter des motions en matière législative » et le « droit de présenter des pétitions ». Cette forme d’exercice du pouvoir, empruntée au régime de la démocratie directe, est introduite pour la première fois au Maroc avec la Constitution de 2011 qui ouvre la voie à la société civile pour contribuer « dans le cadre de la démocratie participative, à l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des décisions et des projets des institutions élues et des pouvoirs publics ». En quoi consistent ces deux mécanismes et dans quelles conditions seront-ils utilisés par les citoyens ?
Selon l’article 14 de la constitution, les «citoyennes et les citoyens disposent du droit de présenter des motions en matière législative» selon les conditions et les modalités déterminées par une loi organique. En d’autres termes, les citoyens se voient attribuer par la constitution, la possibilité de proposer des lois, initiative réservée jusqu’à présent au Gouvernement et au Parlement. C’est un grand pas en avant qui contribuera, sans doute, à encourager le citoyen marocain à s’intéresser à la politique et s’investir dans des actions d’intérêt général.
Le schéma proposé par le projet de loi organique, qui ne manquera pas de faire l’objet de modifications avant son adoption par les deux Chambres du Parlement, précise que la présentation des propositions (motions) en matière législative peut être faite par tous les citoyens marocains qu’ils soient résidents ou non. Seulement, pour pouvoir initier ou participer à une initiative législative, le citoyen doit remplir certaines conditions (jouir des droits civils et politiques, être inscrit sur les listes électorales générales et être en situation fiscale régulière).
Concernant l’objet des motions, il faut préciser qu’elles ne peuvent porter que sur les matières qui entrent dans le domaine législatif tel qu’il est défini par la constitution. Celles qui portent sur des questions relevant des domaines réservés au Roi et au Gouvernement, sont en dehors des champs de la démocratie participative.
L’initiative législative s’exerce suivant une procédure bien définie ; la première contrainte concerne le nombre de signatures devant être recueillies ; le projet de loi fixe à 25.000, le nombre de signature que doit comporter chaque motion en matière législative. A titre de comparaison, l’Espagne l’a fixé à 500.000. Ceci montre bien que l’exercice de l’initiative législative populaire, n’est à la portée que des grandes organisations disposant de moyens suffisants pour pouvoir mobiliser les citoyens. Les propositions législatives sont présentées à l’une des deux Chambres du Parlement, qui dispose d’un délai de soixante jours pour statuer sur la suite à leur réserver. La décision de rejet de la motion est définitive et ne peut faire l’objet d’aucun recours.
S’agissant du « droit de présenter les pétitions », le projet de loi organique prévoit que les citoyens peuvent présenter au Chef du Gouvernement des pétitions comportant des propositions ou des recommandations sur des questions d’intérêt général. Pour être recevable, la pétition doit comporter au minimum 7500 signatures. Une « Commission des pétitions » est créée auprès du Chef du Gouvernement ; elle a pour mission d’étudier les pétitions présentées par les citoyens et de formuler des avis et des recommandations à leur sujet.
La démocratie représentative instaurée par la constitution de 2011 ne s’exerce pas uniquement à travers les deux mécanismes du droit de pétition et du droit de présenter les motions en matière législative. D’autres canaux sont prévus pour pousser la société civile à prendre part à la gestion de la chose publique. C’est dans ce sens, que les associations et les organisations non gouvernementales sont habilitées par la Constitution à prendre part à la vie publique. De même, les collectivités territoriales sont tenues selon la Constitution, de mettre en place des mécanismes participatifs de dialogue et de concertation «pour favoriser l’implication des citoyennes et des citoyens, et les associations dans l’élaboration et le suivi des programmes de développement ».
La démocratie participative peut-elle combler les lacunes de la démocratie représentative ? Est-elle capable de réduire la distance entre les gouvernants et les gouvernés ? Est-elle en mesure de convaincre le citoyen d’investir le champ politique et de s’intéresser à la chose publique ? Soyons optimistes, malgré la présence de nombreux facteurs décourageants, et en même temps conscients du fait que la démocratie est un long processus qui se déroule en phases successives. Le plus important, c’est d’avancer.

 
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