Blog de Jamal Berraoui

Ecole : l’inacceptable mort


L
’on savait depuis longtemps, que la violence qui  sévit dans nos rues, ce qui est déjà un drame sociétal, avait envahi l’école. Mais qu’un enseignant en tue un autre à l’arme blanche, au sein même  d’une institution scolaire, cela dépasse l’entendement. Quelques jours après, tous les partis politiques ont assisté à une conférence qui annonce que l’école est en situation de mort clinique. Ce diagnostic n’est pas nouveau, de la même manière que la solution préconisée, une énième « Mounadara », pour réunir un très hypothétique consensus, et mettre en place un programme voué à l’échec,  c’est du déjà vu. Feu Meziane Belefquih avait tenté tout cela à travers la COSEF.

L’homme était à la fois sincère et compétent. Dès 2005, il répétait à ses contacts  «c’est un échec cuisant, on va dans le mur ». Il mettait en doute la capacité des hommes politiques à réformer, parce que cela est coûteux électoralement. Il en était tellement convaincu qu’il  a proposé au Roi de le nommer lui-même ministre de l’Education nationale. C’est Akhchichen, qui a longtemps collaboré à la COSEF, qui a hérité du poste. Son programme d’urgence a buté sur les  corporatismes de ceux-là même qui annoncent la mort clinique. La violence au sein de l’école n’est qu’un indice de la dévalorisation sociale de cette institution.

Inverser la tendance doit être le point  de départ de toute réforme. L’école doit redevenir un sanctuaire, où le savoir sous toutes ses formes est dispensé, dans le respect des valeurs  fondatrices, à savoir le respect de soi et d’autrui, l’intégration au projet collectif et aux règles qu’il impose. Ce n’est que cette école-là qui peut redevenir un moyen d’assurer l’égalité des chances et rejouer son rôle d’ascenseur social. Ce rôle, elle l’a joué par le passé, les fils du peuple ont pu diriger le pays grâce à l’école publique. Parce que la massification ne signifie pas la démocratisation  et que la recherche des chiffres sur la généralisation, dans une école en faillite, n’est en rien égalitaire, nous avons mis en place un Tchernobyl social, basé sur l’apartheid par l’argent.  

Seules les classes moyennes supérieures et les riches peuvent assurer à leurs enfants les cursus d’excellence, par le biais du privé, puis des écoles et universités étrangères. Il est naïf de croire  que des accords avec ces institutions assureront l’égalité, biaisée par le niveau de l’enseignement de base. Finalement, le meilleur moyen de sauver  l’école publique, c’est justement de la sortir du jeu politique et d’en faire un enjeu pour toute la société. Accepter qu’elle est en faillite, en mort clinique, c’est accepter la distension du lien social  avec tout ce qu’il comporte comme risques d’implosion. C’est cette attitude suicidaire qui est celle de nos décideurs depuis des décennies.

 
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