Interview

El Mehdi Fakir : « Les taxes parafiscales sont méconnues du grand public »

Le Maroc a multiplié les taxes parafiscales touchant de nombreux secteurs économiques : plusieurs matériaux de construction, tourisme… Celles-ci sont perçues dans un « intérêt économique et social » et affectées à un organisme déterminé autre que l’Etat, les collectivités territoriales… c’est-à-dire des établissements publics. Sauf que ce régime parafiscal continue d’être pointé du doigt par les opérateurs économiques.

Challenge : Comment faudrait-il percevoir la taxe parafiscale? 

El Mehdi Fakir : La taxe parafiscale est une composante du système fiscal marocain. Elle se caractérise par son soubassement à la fois légal et réglementaire, dans la mesure où les taxes et droits parafiscaux sont institués par des textes réglementaires voire administratifs (décisions – notes de service), sur la base de prérogatives légales, certains textes autorisent des entités/Etablissements publics à percevoir des droits/taxes pour renforcer leur autofinancement. Du fait de leur caractère sectoriel/spatial, ces taxes sont relativement nombreuses et méconnues du grand public.

Pourquoi les taxes parafiscales sont souvent pointées du doigt par les entreprises ?

Du fait de leur nombre et des caractéristiques propres à chacun de ces textes (règles d’assiette et de liquidation), ces taxes viennent augmenter la pression fiscale sur l’entreprise. Ces taxes font parfois (double emploi) avec des taxes conventionnelles (taxes d’Etat et taxes locales) de ce fait, les revenus de l’activité professionnelle se trouvent doublement voire triplement taxés. Par ailleurs, ces taxes ne sont pas «reconnues» comme étant des taxes déductibles par le Code Général des Impôts (CGI), ce qui crée des situations particulières et certaines de ces taxes se trouvent faisant partie de l’assiette d’imposition en créant des situations telles que «impôt sur l’impôt» : cas de la taxe de séjour faisant partie de l’assiette du chiffre d’affaires de l’hôtellerie, imposée à son tour à la TVA.

Quid de leur contrôle et de leur encadrement juridique?

Par rapport à l’encadrement juridique et s’agissant de la définition de l’assiette et des conditions d’imposition, chacune de ces taxes est régie par un ou plusieurs textes, légale, réglementaire et administrative (notamment celles instituées et prélevées par les collectivités territoriales). S’agissant du recouvrement, le texte de référence demeure le Code de Recouvrement des Créances Publiques.

Quant au contrôle, les textes définissent les entités administratives en charge du contrôle (Inspections des Départements et des Etablissements Publics) sans oublier le contrôle suprême de l’Exécutif (Inspection Générale des Finances et Inspection de l’Administration Territoriale) et le contrôle de la Cour des Comptes (Juridictions Financières).

Il arrive parfois que les ressources issues des taxes parafiscales dépassent les besoins des établissements affectataires et génèrent une trésorerie pléthorique. Dans ce cas, où va ce surplus?

Comme précisé, le Code de recouvrement des créances publiques précise les conditions de recouvrement de ces taxes. L’ensemble des départements et des établissements publics disposent de «comptes» ouverts auprès de la Trésorerie Générale du Royaume (TGR) : s’il y a excédent, celui-ci est comptabilisé (états financiers) et soumis à l’appréciation des gestionnaires qui peuvent les réaffecter (investissement ou fonctionnement) ou pas, selon les prérogatives des ordonnateurs et des spécificités d’Administration (Conseil d’Administration, Tutelle,…).

La réforme en cours à l’issu des troisièmes Assises de la fiscalité, prévoit de consolider l’ensemble des textes de la fiscalité en un Code Général de la Fiscalité qui devrait faire l’objet d’une évaluation (efficacité budgétaire notamment), dans le cadre des Loi de Finances conformément à la Loi Organique de Finances et de la tant attendue Loi de Programmation Fiscale (Loi-Cadre Fiscale).

 
Article précédent

Casablanca : la circulation très perturbée par les travaux

Article suivant

Sociétés anonymes : quelle place pour l’administrateur indépendant ?