Politique

Elections 2021 au Maroc. La réponse à vos questions avant d’aller voter

Les électeurs marocains se rendront ce mercredi 8 septembre aux urnes pour élire les membres de la Chambre des représentants, les membres des conseils communaux et d’arrondissements, ainsi que ceux des conseils des régions, une étape importante dans la consolidation de la pratique démocratique au Maroc.

Le compte à rebours touche à sa fin pour les élections législatives, régionales et communales, organisées dans un contexte particulier qui a déteint sur la campagne électorale. Demain, les citoyens marocains auront rendez-vous aux bureaux de vote pour décider du sort de leurs communes, villes, régions, parlement et gouvernement et ce pour les 5 années à venir. Appelés à voter le même jour pour la première fois de l’histoire du Maroc afin d’élire 395 députés et plus de 31.000 élus communaux et régionaux, les marocains auront leur mot à dire demain.

Quel est le nombre des citoyens et des candidats inscrits aux élections?

Selon les listes électorales arrêtées le 30 juillet 2021, quelque 17 509 127 citoyens se sont inscrits pour participer à ce scrutin, dont 54% d’hommes et 46% de femmes. Plus de la moitié des électeurs est issue du milieu urbain soit 54% contre 46 % qui proviennent des zones rurales. Il faut noter que 25,226 millions de Marocains sont en âge de voter.

La répartition par tranche d’âge relève que 23 % des électeurs ont 60 ans ou plus, 9 % ont entre 55 et 59 ans, 20 % ont entre 45 et 54 ans, 21 % ont entre 35 et 44 ans, 19 % entre 25 et 34 ans et 8 % ont entre 18 et 24 ans.

Selon les données officielles du ministère de l’Intérieur, le nombre de listes de candidatures soumises au niveau national pour l’élection des membres de la Chambre des représentants, sur le total des circonscriptions électorales locales et régionales, a atteint un total de 1704 listes, contre 678 listes pour l’élection des membres des Conseils régionaux.

Au niveau national, ce sont 157.569 candidatures qui ont été déposées pour les élections des conseils communaux et d’arrondissements.

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A quoi servent les élections législatives, communales et régionales?

Les élections législatives ont pour but de renouveler les 395 sièges de la Chambre des représentants pour cinq ans.

La Chambre des représentants est composée de 395 députés élus pour cinq ans au scrutin proportionnel plurinominal. Sur ce total, 305 sièges sont ainsi à pourvoir dans 92 circonscriptions de 2 à 6 sièges en fonction de leur population, auxquels s’ajoutent 90 sièges pourvus dans une unique circonscription nationale. Ces derniers sont pour 60 d’entre eux réservés aux femmes, et pour les 30 restants réservés aux personnes de moins de quarante ans, dont — pour la première fois lors de ces élections — une moitié d’hommes et l’autre de femmes.

Pour l’ensemble des circonscriptions, les listes de candidats sont fermées, sans panachage ni vote préférentiel. Après décompte des voix, la répartition se fait selon la règle de la plus forte moyenne à toutes les listes ayant franchies le seuil électoral. Ce dernier est de 6 % dans les circonscriptions ordinaires, et de 3 % pour celle nationale.

Le nombre de sièges par circonscription varie entre 2 et 6 selon le poids démographique de la circonscription. Si les grandes villes telles que Casablanca, Fès, Rabat et Marrakech sont divisées en plusieurs circonscriptions, les autres villes voient leurs frontières administratives coïncider avec celles électorales.

Les élections communales de 2021 ont pour but de renouveler pour six ans les membres des conseils communaux.

Les élections régionales de 2021 ont pour but de renouveler pour six ans les membres des conseils régionaux.

Quand voter et comment voter?

Il suffit d’envoyer le numéro de sa CIN au 2727 afin de connaitre son bureau de vote. Lors du vote, seule la carte d’identité nationale est nécessaire. Les bureaux de vote seront ouverts de 8h à 19H.

Le taux de participationà quoi s’attendre?

Les élections communales ont toujours enregistré des taux de participation supérieurs à ceux des législatives, et l’organisation simultanée des trois rendez-vous électoraux va aider le taux de participation aux législatives à gratter quelques points de pourcentage par rapport à son score naturel.

Un coup de pouce dont les législatives ont certainement besoin étant donné le désamour d’une grande partie des marocains pour la chose politique qui ne cesse de s’accentuer depuis des années.

Néanmoins, en raison de la pandémie et de la perte de confiance des marocains dans la politique, le taux de participation risque d’être faible.

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Les résultats des élections professionnelles peuvent-ils nous éclairer sur l’issue du scrutin du 8 septembre ? Peut-on s’attendre à un raz-de-marée du RNI ?

Il faut dissocier les élections professionnelles des élections législatives, communales et régionales. Rappelons que le PJD, arrivé premier aux législatives de 2016, avait obtenu un score très modeste aux élections des chambres professionnelles. D’après David Goeury, membre du think-thank Tafra, il est très compliqué de se prononcer sur cette question. Les élections professionnelles ont mobilisé 882.736 électeurs, alors que pour les élections communales de 2015 c’était 7,3 millions de citoyens. Cependant, lors des élections communales de 2015, à l’exception du PJD arrivé en tête grâce à ses nombreux militants urbains, l’ordre qui a été établi lors des élections professionnelles a été maintenu dans le cadre des élections communales.

Ainsi, le PAM est arrivé en deuxième position lors des communales, suivi de l’Istiqlal puis du RNI. En 2021, nous remarquons que cette situation a changé. Actuellement, il existe une forte chance pour que le RNI se place devant l’Istiqlal et le PAM lors des communales. Mais il serait difficile de faire des projections sur le positionnement du PJD lors de ces élections, parce que ce parti dispose de militants qui ne sont pas forcément concernés ou mobilisés pour ces élections professionnelles.

Toutefois, le PJD n’est plus dans une dynamique d’ascension, comme cela a été le cas depuis 1997 où, élection après élection, il élargissait son électorat. Il apparaît comme étant dans une phase de régression de son influence. Le parti de la lampe devra donc miser sur son réseau de militants.

Quelles sont les incompatibilités entre les différentes élections?

2021 est l’année de toutes les élections. Elle est aussi celle de tous les sièges à pourvoir. Mais si les partis et leurs candidats sont amenés à concourir sur plusieurs fronts, il faudra compter avec les règles d’incompatibilité. Car tous les mandats ne sont pas cumulables.

Conseillers, représentants parlementaires

Conseillers ou représentants, les incompatibilités sont globalement les mêmes quand il s’agit d’un mandat parlementaire. Celui-ci n’est pas cumulable avec les fonctions de présidence d’un conseil régional, d’un conseil de préfecture ou de province.

A ces incompatibilités, est venue tout récemment s’ajouter celles avec la présidence des conseils de communes dont le nombre dépasse les 300.000 habitants.  L’incompatibilité entre ces deux mandats vise à assurer la pleine disponibilité du président dans les grandes villes.

En exerçant son mandat, le parlementaire ne peut pas occuper « plus d’une présidence d’une chambre professionnelle ou d’un conseil communal ou d’un arrondissement ou d’un groupement constitué par des collectivités territoriales ».

Siéger au Parlement n’est, non plus, cumulable avec la qualité de membre de la Cour constitutionnelle ou de membre du Conseil Economique, Social et Environnemental. La même règle s’applique à la qualité de membre du gouvernement.

Il est également interdit au parlementaire d’exercer, durant son mandat, toutes fonctions publiques non électives dans les services de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics, des autres personnes morales de droit public ou des sociétés dont le capital appartient pour plus de 30% à l’État. Il peut néanmoins  y accomplir des missions temporaires sous certaines conditions et selon certaines modalités.

D’autres dispositions interdisent au parlementaire l’exercice de fonctions (président du conseil, administrateur, membre du directoire etc.) dans des sociétés anonymes dont le capital appartient directement ou indirectement pour plus de 30% à l’État.

Le même régime s’applique aux « fonctions représentatives » rémunérées par « un État étranger, une organisation internationale ou une organisation internationale non gouvernementale ».

Régions, communes

Les incompatibilités concernant les membres des collectivités territoriales sont contenues dans la loi organique n°59.11.  Nous prendrons ici les exemples des régions et communes sans revenir sur les incompatibilités vis-à-vis des mandats parlementaires, cités plus haut.

Le mandat de membre du conseil de la région est incompatible avec tout emploi rémunéré en totalité ou en partie sur le budget de la région ou d’un établissement public régional.  La règle de non cumul vaut également pour les fonctions de concessionnaire, gérant ou entrepreneur de services publics régionaux. Il en est de même vis-à-vis des mandats de membre d’une préfecture ou de province, ainsi qu’avec la présidence d’une chambre professionnelle.

Tout membre qui, lors de son élection, se trouve dans l’un des cas d’incompatibilité est tenu dans les huit jours qui suivent son entrée en fonction d’établir qu’il s’est démis de ses fonctions incompatibles.  A défaut, il est déclaré démissionnaire de son mandat par décision du tribunal administratif à la requête du wali de la région.

Si l’intéressé accepte une fonction  ou mission incompatible postérieurement à son élection, il est considéré comme démissionnaire. Cette démission est constatée par décision du wali de la région.

On retrouve des dispositions spécifiques aux présidents et vice-présidents de ces conseils dans la loi organique n° 111-14. L’article 17 leur interdit de cumuler ces fonctions avec la présidence ou vice-présidence d’un conseil d’une autre collectivité territoriale ou d’une chambre professionnelle.  Ainsi, en cas de cumul des fonctions, « le concerné est considéré comme démis de plein droit des fonctions de la première présidence ou vice-présidence à laquelle il a été élu ».

Les fonctions de président ou de vice-président sont également incompatibles avec la qualité de membre du gouvernement, de parlementaire, du CESE, de la HACA, du conseil de la concurrence ou de l’instance nationale de la lutte contre la corruption.

Les règles d’incompatibilité sont moins touffues lorsqu’il s’agit des conseils communaux. Les plus saillantes concernent les présidents et vice-présidents de ces collectivités territoriales. Hormis la règle des 300.000 habitants, citée plus haut, l’essentiel des cas d’incompatibilité est énuméré par la loi organique n°113.14 et sont exactement similaires à celles prévues pour les conseils de régions.

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Qu’en est-il du financement des élections?

Il sera supporté en partie par l’État. 360 MDH, c’est le montant de sa contribution aux dépenses électorales des partis politiques. Des montants répartis en deux tranches, selon l’élection, le poids des formations concurrentes et ses résultats.

Dans le détail, 160 MDH financeront les campagnes des législatives. S’y ajoute une enveloppe de 180 MDH allouée aux communales (100 MDH) et régionales (80 MDH). Enfin, la somme de 20 MDH sera débloquée pour financer plus tard celles des élections de la chambre des conseillers, programmées le 5 octobre (Cette campagnes sera lancée le 25 septembre).

D’autres sources de financement ?

L’Etat contribue au financement des campagnes. Partant, cette participation n’est pas l’unique source de financement. Les partis peuvent puiser dans les ressources financières issues, notamment, des cotisations des membres ou des dons privés, legs et libéralités qu’ils sont autorisés à recevoir sous réserve de ne pas dépasser 600.000 DH annuellement et par donateur.

La loi interdit tout autre soutien public, notamment celui des collectivités territoriales, des établissements publics, des personnes morales de droit public ou des sociétés dont le capital est détenu, en totalité ou en partie, par l’État. Les fonds étrangers sont proscrits. Les fonds doivent avoir une origine nationale.

Les dépenses de campagnes électorales sont-elles plafonnées ?

Pas de chèque en blanc lorsqu’il s’agit de campagne électorale. Les dépenses sont plafonnées par le législateur. Fixés par décrets, ces plafonds diffèrent selon l’échéance en question :

Depuis 2016, les dépenses électorales en vue des législatives sont plafonnées à 500.000 DH par candidat (Décret n° 2.16.668 ).

Depuis 2015, celles des membres de la Chambre des conseillers sont limitées à 300.000 DH par candidat.

Il faut observer un plafond de 150.000 DH pour les régionales, 50.000 DH pour les élections des  provinces et préfectures et 60.000 DH pour les communales (Décret n° 2.15.452).

Le plafonnement des dépenses obéit à une logique d’égalité entre les candidats. L’objectif est également de restreindre les domaines où l’argent peut être employé.

En l’occurrence, les montants sont censés couvrir les coûts de l’impression des annonces et des documents électoraux, leur affichage, diffusion ainsi que les frais des meetings, les rémunérations des prestataires de services etc. Ils couvrent aussi les charges liées au retrait des affiches électorales après le scrutin (voir les décrets susvisés). Inutile de rappeler que les dons (pécuniaires ou non) octroyés aux électeurs à l’occasion de la campagne tombent sous le coup de sanctions pénales.

Les candidats aux élections sont tenus de respecter le plafond des dépenses électorales. L’inobservation de cette règle entraîne la déchéance du candidat concerné.

Déchéance pour fonds injustifiés, restitution de l’aide « non utilisée »

L’origine des fonds et leur utilisation est soumise à un contrôle à posteriori de la Cour des comptes. Les candidats et leurs partis devront de ce fait établir des comptes de campagnes.

Le décret n°2.21.516 précise les délais d’établissement du compte de campagne et la partie qui doit l’établir à l’occasion des élections législatives générales et partielles. Le compte devra contenir un état détaillé et justifié de ressources financières et dépenses liées à ladite campagne.

Les mandataires de listes sont tenus, chacun, de préparer le compte de campagne contenant les données détaillées des sources de financements et un état des sommes dépensées. Cette démarche doit être observée à partir du 30ème jour précédant la date du scrutin jusqu’au 15ème suivant l’opération électorale. En cas d’élection partielle pour occuper un siège vacant, le compte est élaboré par le candidat concerné.

Le dépôt du compte en dehors des délais, l’absence de documents justificatifs entraînent la déchéance si, après avis transmis par la Cour des comptes, le conseiller ne régularise pas sa situation.

On retrouve ces mêmes dispositions dans le décret n°2.21.517. Il les applique aux élections des membres de la Chambre des conseillers, des conseils des régions, des conseils préfectoraux et provinciaux et des conseils des communes et arrondissements.

La seule différence réside dans la personne à l’origine du compte de campagne. Il est établi par le candidat concerné s’il s’agit d’un scrutin uninominal, et par le mandataire de la liste en cas de scrutin de liste.

En tant que bénéficiaires de l’aide étatique, les partis politiques devront, pour leur part, créer un compte bancaire spécifique aux ressources et dépenses liées à la campagne électorale. Ils sont tenus de restituer, « spontanément », les sommes « non utilisées » ou « indues », versées par l’État au titre de sa participation au financement des campagnes électorales, à l’occasion des élections générales communales, régionales et législatives.

En cas de non restitution, la formation concernée perd « son droit au soutien public » jusqu’à régularisation de sa situation. Sans préjudice des « mesures ou poursuites » prévues par les lois en vigueur.

Constatés par la Cour des comptes, les différents dysfonctionnements liés à l’usage du soutien public seront transmis par son premier président au Procureur général du Roi près la Cour de cassation, en sa qualité de président du ministère public.

 
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