High-Tech

Fintechs : Le Maroc encore à la traîne

Plus que jamais, le numérique devient un atout majeur pour mesurer la vitalité de l’économie d’un pays et un puissant vecteur d’attractivité pour les investisseurs. Plusieurs pays sur le continent ont bien compris cela, le Maroc, quant à lui, a encore du mal à décoller malgré de grandes potentialités.

La transformation digitale a émergé depuis longtemps comme un impératif pour la survie et la compétitivité de tous les acteurs. Le secteur financier ne déroge pas à la règle et voit même la mise en place de nouvelles structures innovantes appelées fintechs. Zakaria Fahim, président de BDO Maroc, explique à cet effet que « l’industrie fintech est sur une forte dynamique mondiale, portée par des levées de fonds records». En effet en 2021, les investissements mondiaux dans les startups fintech ont totalisé 2,3 milliards d’euros pour plus de 5 600 opérations. Au cours des deux premiers mois de 2022, les startups fintech africaines ont, quant à elles, levé plus de 534 millions de dollars, soit trois fois plus que les fonds levés au cours de la même période en 2021.  

Lire aussi | Africa Innovation Lab : le FinTech Accelerator 2022 présente 8 startups

Au Maroc, cette industrie mène timidement sa traversée. « On peut dire que cette timidité est sa vertu car, elle lui permet de mieux appréhender le fonctionnement de la fintech dans un contexte marocain.  Nous avons une réelle opportunité de faire du Maroc un centre de technologie financière. C’est à nous de les connecter à des fonds dédiés aux startups pour que les futures licornes restent et se développent en Afrique. Chez nous au Maroc, nous avons des futures licornes à l’instar de 2WLS », explique ce dernier. La startup marocaine est la première unité de valeur universelle pour la conversion des points de fidélité. C’est un leader africain de la gestion du capital client, 2WLS a lancé une nouvelle plateforme « Tookeez».

Même constat du côté de Karim Zaitouni, PDG de SisPay qui explique pour sa part que «le marché des fintechs en est à son tout début au Maroc. L’espoir est en train de naître dans les esprits des jeunes pour y entreprendre. La quasi-majorité des avancées des fintechs, soit 90%, sont dues aux banques et à quelques initiatives de guichets uniques de paiement pour l’Etat comme Portnet ou Rokhas. Les analystes du domaine prévoient une évolution beaucoup plus importante des paiements par carte bancaire et des services bancaires par rapport aux autres domaines, comme le crédit ou la digitalisation des opérations financières. De plus, les revenus sont très faibles par rapport aux fintechs africaines qui affichent des résultats en milliards USD ».

Forte expansion sur le continent

Pour rappel, selon un rapport publié par le cabinet McKinsey intitulé, « Fintech en Afrique : la fin du commencement », le chiffre d’affaires cumulé des fintechs en Afrique est estimé à 30,8 milliards de dollars en 2025, soit cinq à huit fois plus que celui réalisé en 2020, estimé entre 4 et 6 milliards de dollars. De plus, entre «2020 et 2021, le nombre de startups a triplé en Afrique pour atteindre quelque 5 200 entreprises dont près de la moitié sont des fintechs », peut-on lire dans le document. Dans l’ensemble, les analystes Mckinsey prévoient que «l’opportunité de croissance dans le domaine des fintechs sera probablement concentrée sur onze marchés clés : Cameroun, Côte d’Ivoire, Égypte, Ghana, Kenya, Maroc, Nigeria, Sénégal, Afrique du Sud, Tanzanie et Ouganda, qui représentent ensemble 70% du PIB de l’Afrique et la moitié de sa population.

Lire aussi | Afrique. Les Fintechs montent en flèche

Mais si les autres pays en Afrique arrivent à percer dans ce domaine, c’est pour des raisons bien évidentes comme l’explique Karim Zaitouni. Il affirme dans ce sens « qu’il y a une réelle dynamique qui est créée autour des fintechs en Afrique. Et la volonté de dynamiser le marché est mise avant celle d’avoir un retour sur investissement garanti dès les premières années. Ajoutons à cela une législation en place plus souple. De plus, l’approche des investisseurs dans ces pays est orientée surtout vers la participation de fonds étrangers au renforcement de ces pays ». Pour Zakaria Fahim, «il suffit de croire en l’Afrique et de mobiliser au-delà des aspects financiers et organisationnels notre diaspora pour plus de contribution à leur continent. Cela permettra d’apporter l’élément clé et immatériel : la veille et les talents pour faire grandir et pérenniser nos fintechs. BDO s’implique dans ce domaine en soutenant Hub Africa, la plateforme qui soutient les startups». Le constat montre un changement de paradigme avec l’accélération du digital dû à un contexte post-covid ». 

Avantages considérables

Sur un autre volet, il faut savoir que le Maroc a de gros avantages, notamment une démographie faible, un niveau d’alphabétisation élevé, et un grand secteur bancaire qui peut être dédié au développement de ce secteur technologique. «Le Royaume compte déjà 2 des plus grandes banques du continent africain et ne compte actuellement qu’environ 20 entreprises fintech», souligne Fahim. De plus, les entreprises technologiques de services financiers ne constituent pas encore une part importante de l’écosystème des startups. Dans un rapport publié par Bank Al-Maghrib, sur les 19 fintechs reçues en 2021, 42% sont des fintechs marocaines fondées par des marocains et basées au Maroc et 58% des fintechs désirant offrir des solutions de paiement mobile. Aussi, sur l’ensemble des fintechs accompagnées et conseillées, 23% ont fait part de leur souhait d’obtenir l’agrément d’établissement de paiement. 

Lire aussi | L’AMMC lance son portail Fintech

Sur un autre volet, dans un article publié en juillet 2022, le média marocain fnh.ma estime que l’une des dernières levées de fonds réalisées par une fintech marocaine remonte à juillet 2021. Il s’agissait de YallaXash, qui avait levé 6 millions de dirhams auprès du Maroc Numeric Fund. «En juin dernier, la plateforme Africa : the big deal indiquait dans une analyse que les financements levés par les startups marocaines, dont les fintechs avaient atteint près de 47 millions de dollars entre 2019 et mai 2022 », indique Fahim. En somme, un potentiel bien présent mais non encore complètement exploité.

 
Article précédent

Peace and Sport Awards 2022  : Ford Motor Company et Ford Fund nommés

Article suivant

Fouzi Lekjaa : "Plus de 50% des avocats au Maroc ne paient pas d'impôts !"