Dossier

Fiscalité : Faut-il criminaliser la fraude ?

Face à l’indiscipline fiscale et pour pouvoir diminuer les taux d’imposition, ne faut-il pas criminaliser la fraude?

Les Assises de la fiscalité ont retenu les mêmes thèmes récurrents depuis des années. L’idée est que la fiscalité marocaine est inéquitable et inefficace. Elle ne permet pas à l’Etat de financer correctement les services publics tout en respectant les contraintes budgétaires et la pression est trop forte pour relancer réellement les investissements. Les aménagements techniques proposés peuvent aller dans le bon sens, mais tout le monde s’accorde à dire que c’est l’élargissement de l’assiette fiscale qui permettra à la fois de baisser les taux et de conforter les recettes de l’Etat. Cela paraît être une évidence, sauf que les résultats sont très faibles malgré les incitations en direction de l’informel et que c’est plutôt le bâton qui a permis d’obtenir de maigres résultats.

« L’argument pour la criminalisation c’est l’indiscipline généralisée face à l’impôt et l’impossibilité de la juguler autrement »

La seconde intervention de Zouhair Chorfi a créé une grande émotion. Il l’a centrée sur l’incivisme fiscal en des termes forts. « Des gens diminuent de 90% leurs déclarations », s’est-il écrié. La dernière année, les contrôles sur place ont permis de récupérer 1,7 milliard de dirhams, dont une grande partie auprès des professions libérales.

Faut-il alors réfléchir à une solution plus punitive, la criminalisation de la fraude fiscale? Cette perspective évoquée dans les années 90, a soulevé un tollé général de la part du patronat. On nous a expliqué que cela va arrêter les investissements, tuer l’esprit d’entreprise, aggraver le chômage, étrangler l’économie. Et le sujet a été zappé.

On peut rétorquer qu’un bon investisseur, c’est celui qui consent à payer ses impôts et qu’il n’est pas question de criminaliser une faute comptable, mais une fraude organisée. De la même manière que les amendes concernant le code de la route ne s’appliquent qu’aux délinquants routiers, mais cela n’empêche pas le refus de toute augmentation.

Aux USA, la fraude fiscale est criminalisée depuis toujours. C’est pour ce motif qu’Al Capone a été emprisonné, alors que ses crimes sont restés impunis. Les fondateurs ont lié la citoyenneté à l’impôt et la société l’intègre parfaitement. La revendication des droits civiques s’appuyait sur le slogan « nos impôts nous donnent des droits égaux ». Depuis des décennies, même les Américains expatriés payent des impôts aux USA au nom de « l’impôt universel ».

Cela n’a pas empêché les USA d’être la première puissance économique, d’attirer le plus grand volume d’investissements étrangers, d’atteindre le plein emploi, etc.

L’argument pour la criminalisation c’est l’indiscipline généralisée face à l’impôt et l’impossibilité de la juguler autrement. Les arguments contre ne sont que des supputations sans fondement.

 
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