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Futur.e.s in Africa : les moments forts de la deuxième journée

Après avoir consacré la première journée à la santé, la première édition de Futur.e.s in Africa s’est attaquée à l’éducation lors de la deuxième journée.

Il s’agit d’une des problématiques à laquelle fait face le continent. D’ailleurs, le Rapport mondial de suivi de l’éducation 2017-2018 publié par l’Unesco pointe du doigt le manque de suivi des actions entreprises dans ce domaine de la part de plusieurs États. Le rapport ajoute qu’en Afrique subsaharienne, une partie des élèves « ne peuvent pas lire après plusieurs années d’école ». C’est absolument flagrant dans les pays du Sahel, comme au Niger et au Tchad. Aussi, sur les treize pays d’Afrique dont les budgets alloués à l’éducation ont été étudiés, seuls trois (Mali, Burkina et Côte d’Ivoire) l’ont augmenté entre 2010 et 2015. Enfin, la moitié des élèves -au mieux- commençant le lycée (premier cycle de secondaire) ne le terminent pas. Même en Afrique du Sud, une des puissances économiques du continent, le problème persiste. « L’éducation a souffert après l’indépendance à cause de l’héritage du pays, notamment les langues vernaculaires. Une des pistes de solution est sans doute l’école de demain : l’école digitale. Elle ne sera pas créée en Afrique mais elle aidera sûrement les pays du continent », témoigne Elinor Sisulu, fondatrice de la Fondation pour la littérature jeunesse Puku (Afrique du Sud). Intervenant à ses côtés à la table ronde intitulée « L’école de demain -tout au long de la vie, digitale et distribuée- est-elle en Afrique ? », Ilham Laaziz, directrice du programme GENIE (GÉNéralisation des Technologies d’Information et de Communication dans l’Enseignement au Maroc) du ministère de l’Éducation, a précisé que la technologie ne peut pas tout résoudre. « Le numérique est un leurre. Arrêtons de faire croire aux gens que le numérique peut tout régler. Par exemple, les savoirs fondamentaux ne peuvent pas être acquis en ayant recours à la technologie. Ce qu’il faut faire, c’est construire intelligemment : c’est un outil qui permettra de révolutionner l’éducation à condition de bien l’utiliser », a-t-elle expliqué. Pour Ahmed Fal Merkazi, enseignant-chercheur à l’Université Hassan 1er, deux prérequis sont fondamentaux pour l’implantation de l’école digitale. « Le premier consiste à se débarrasser des mythes comme ‘‘plus, le Nord et le futur sont mieux’’. Au contraire, moins peut s’avérer utile. La coopération entre le Nord et le Sud est essentielle au développement, tandis que le fait de se focaliser sur le futur sans capitaliser sur le présent et le passé est inefficace. Deuxième prérequis, barrer la route aux méthodes de l’école conventionnelle qui inhibent les facteurs demandés par le marché du travail. Un élève curieux dérange. Or, il faut l’encourager », a-t-il détaillé. De son côté, Baptiste Domingues, directeur du business development à OpenClassrooms (France) voit que « l’accompagnement est extrêmement important pour mettre de bonnes bases à l’école digitale, même si l’apprenant aujourd’hui doit être maître de son apprentissage. Nous ne sommes plus dans cette optique d’apprentissage descendant et le numérique y contribue ».

Autre solution préconisée pour palier à la problématique de l’éducation en Afrique : l’e-learning. La Commission européenne la définit comme étant l’utilisation des nouvelles technologies multimédias et de l’Internet pour améliorer la qualité de l’apprentissage en facilitant l’accès à des ressources et des services, ainsi que les échanges et la collaboration à distance. Cela passe par la formation en ligne, site web éducatif, téléformation, enseignement télématique, e-training, etc. D’ailleurs, la deuxième table ronde de la journée a porté sur « Quelles initiatives e-learning impactantes et viables pour le continent ? ». Rebondissant sur les réflexions des intervenants de la première table ronde, Steve Vosloo, expert EdTech à l’Unesco (France) a mis en exergue le rôle de la technologie. « La tech peut supporter l’éducation. Par exemple, le leapfrogging qui a été appliqué au Kenya. Vu le taux faible des bancarisables, les banques ont innové des solutions facilitant aux personnes les services bancaires. C’est un moyen qui permettra sûrement d’améliorer l’éducation. Aussi, il faut qu’il y ait de la volonté et de la motivation humaine pour faire réussir cette démarche. Cependant, la technologie ne va pas remplacer les enseignants qu’il faudra mentorer. L’intelligence artificielle est excellente pour exécuter plusieurs tâches. Mais elle est terrible pour se substituer à l’interaction humaine par exemple », a-t-il noté. Les deux intervenants suivants ont présenté les solutions d’e-learning qu’ils ont développé. Ainsi, Yannick Nkengne, fondateur de EduAir (Cameroun) a expliqué l’utilité sa ‘‘Box’’. « Il s’agit d’un mini-serveur qui stocke du contenu. Elle émet de la connexion Wi-Fi. Le professeur et les étudiants s’y connectent via leurs laptops et accèdent aux fichiers. Elle répond au problème d’accès à Internet et prend moins d’espace qu’une bibliothèque. Cet outil permet aux professeurs de digitaliser le contenu ce qui mène à un gain de temps et d’efficacité ». Son voisin, Bola Lawal, fondateur de ScholarX (Nigeria), a pour sa part présenté son projet. « ScholarX réduit le gap entre les étudiants et les opportunités de financement de leurs études. Il s’agit d’une plateforme qui regroupe des offres, également déclinée sous forme d’application. Elle a permis à 13.000 étudiants nigérians d’accéder aux moyens de financement de leur éducation ». Pour sa part, Fatim-Zahra Biaz, fondatrice de New Work Lab (Maroc), estime que l’e-learning ne constitue pas seul la solution. « Il faut apprendre aux étudiants les moyens d’acquisition du savoir. Ce dernier se développe rapidement au point que ce qui est valable aujourd’hui ne l’est plus demain. Donc nous devons apprendre aux étudiants la méthodologie de l’apprentissage. Ces deux initiatives (ScholarX et EduAir Box) y contribuent. Aussi, il faut investir dans les professeurs car l’e-learning ne peut se faire dans eux », a-t-elle précisé avant de jeter un pavé dans la marre. « Je suis intimement persuadée que les États ne réussiront pas à réformer l’enseignement en mettant en place l’e-learning. Ce sont les entrepreneurs qui y arriveront car le secteur privé dicte les besoins du marché du travail », a conclu la fondatrice de New Work Lab.

 
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