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Hypnose en entreprise : transformation expresse !

C’est la nouvelle coqueluche des managers. L’hypnose est de plus en plus utilisée pour accélérer des transformations chez les managers, pour gagner en “confiance en soi”, en “charisme” et parfois même en “aisance sociale”. par Noréddine El Abbassi

Rachid se présente devant la porte du cabinet lumineux jouxtant le glacier Oliveri.  L’hypnotiseur Zhor Amrani l’accueille cordialement dans son spacieux bureau et l’introduit dans son cabinet de consultation, où l’air est exempt de toute trace de cigarettes, dont   Rachid veut se débarrasser justement. Une ambiance de confidence s’installe rapidement,  les quelques détails préalables de la séance mis au point, Rachid prend enfin place dans le fauteuil style “rocking chair”, dans une position quasiment allongée, avant de plonger dans un état profond de transe. La transe hypnotique, c’est cet état de profonde relaxation, au cours duquel on peut accéder à son inconscient, et lui suggérer les changements que l’on veut opérer.
“L’hypnose, c’est l’un des moyens les plus rapides pour obtenir des transformations désirées. Cela va de l’arrêt du tabac à des applications pour managers et employés. On demande des aides à la prise de parole en public, à la gestion du stress, mais aussi pour la confiance en soi”, explique Zhor Amrani, hypnothérapeuthe coach. Le conférencier Kevin Finel, Directeur de l’Académie d’hypnose A.R.C.H.E, une école d’hypnose qui donne ses cours à Casablanca développe: “c’est le «travail personnel», dont le but est d’optimiser les comportements : c’est par exemple  le travail sur la confiance, sur le passage à l’action, la gestion de la pression et du stress. L’amélioration du sommeil et de la récupération, le développement de la créativité et de la flexibilité. Ce sont les premières applications qui se sont développées avec l’hypnose et qui sont même devenues assez courantes dans certains pays anglo-saxons.”

Un usage qui se répand dans tous les milieux

Courante? “L’engouement pour l’hypnose dans le monde du travail est spectaculaire. Depuis les hauts cadres aux employés, on voit de tout dans les séminaires et dans les cabinets,” confirme Zhor Amrani. Pourtant, lorsque l’on en parle dans le milieu des affaires, le clivage entre ceux qui sont “pour” et les autres, est assez marqué. “Les hypnotiseurs peuvent causer beaucoup de dégâts”, explique un trentenaire casablancais, entre deux bouffées de cigarette et une gorgée de café. Par expérience, Rachid lui, explique: “on nous fait signer un “contrat” avant la séance. Globalement, cela signifie que l’on se “laisse guider” dans cet état de concentration”. Concentration. C’est ainsi que les interrogés décrivent cet état de transe, lorsque pour les autres c’est un “sommeil conscient”, et selon les professionnels un “état naturel”.
Alors, pourquoi cette mauvaise réputation? “Cela provient des films, des dessins animés et de la culture populaire, qui associe l’hypnose à de l’ésotérisme. Historiquement, c’est parce que les premiers hypnotiseurs tels que Mesmer, travaillaient avec des gens malades, tels des épileptiques”, poursuit l’hypnotiseur Zhor Amrani. Pourtant, il suffit de faire un tour sur le web, lire les écrits de scientifiques américains, Noam Chomsky en tête, pour se rendre compte que, l’hypnose est souvent associée au “contrôle mental”. “On croit le plus souvent que nos décisions sont prises de façon rationnelle. Mais plus on étudie le cerveau et plus on se rend compte que nos perceptions sont biaisées par des mécanismes inconscients, et par nos émotions : nous sommes bien plus des êtres émotionnels que des êtres rationnels au fond ! Une fois cela compris, il est logique que les hommes politiques et autres professionnels du marketing, cherchent à atteindre nos centres émotionnels avant tout: ils savent qu’au moment d’un vote ou d’un achat, ce sont nos ressentis inconscients, qui vont influencer notre choix”, pointe Kevin Finel.
Au cours de notre travail, il est arrivé assez souvent, que des experts comptables, ou des entrepreneurs du BTP, utilisent ces techniques pour le moins peu communes. Un bref tour des annonces sur les sites de développement personnel, permet de constater la multiplication des séminaires de développement du charisme et autres propositions, mais à un prix qui sélectionne les “apprenants” par le salaire. “Depuis quelques années, l’hypnose est de plus en plus vue comme une discipline liée à la communication. Elle est transmise dans des formations spécifiques, le plus souvent pour les «top managers» : négociations, influence, leadership, développement du charisme… Dans ces formations on apprend des techniques qui changent vraiment la façon de communiquer, pour la rendre à la fois plus éthique et plus efficace. Ce qui séduit beaucoup”, pointe Finel.
Youssef, complotiste convaincu, vit entre la pollution et le stress casablancais d’une part, et le silence de la campagne d’autre part. Pourtant, il est un adepte de l’hypnose et explique: “les agences de publicité utilisent notre inconscient à leur avantage. Il est donc normal que j’utilise le mien, pour mon propre bénéfice”.  Mais là, il faut bien l’admettre, ce sont des théories hasardeuses, et des stars du domaine telles que Igor Ledochowski, prennent bien soin d’intégrer des injonctions à “être gentil”, voire à “devenir une force pour le bien”, dans leurs séminaires.

Sportifs et managers, même combat?

“L’hypnose est un état de conscience modifié, dans lequel on a accès à notre inconscient; qui devient plus réceptif. On lui donne des suggestions thérapeutiques, mais c’est toujours votre inconscient qui fera le tri”, poursuit Amrani.  
Au cours de notre enquête, nous rencontrons Soumiya, une jeune trentenaire, qui a fait face à un problème particulier: “j’avais peur de l’échec, peur de la réussite, et j’étais perfectionniste. Du coup, je n’étais jamais prête, lorsque j’avais une présentation en public à faire.” Elle s’est fait recommander un coaching, puis des séances d’hypnose par la DRH. “Depuis, tout va bien!” Selon elle… “Il n’existe que deux peurs primordiales dans la vie. Celle de manquer de quelques chose, et celle de ne pas être aimé. De ces deux, découlent des milliers de phobies différentes,” tranche Zhor Amrani, visiblement certaine de ce quelle avance.
Pourtant, dans le monde du sport, on constate que le recours à ces techniques est “courant”, comme nous l’a démontré un précédent article sur les “managers marathoniens”. Une brève enquête dans le monde des affaires casablancais prouve que la “force mentale” d’un cadre est souvent  sollicitée par le monde de l’entreprise. “Il s’agit d’optimisation. De nombreux sportifs sont moins performants, lors d’une compétition qu’à l’entrainement. Ils ne savent pas toujours gérer la pression, la récupération, l’enjeu… On comprend facilement ce qu’ils peuvent gagner avec un peu d’optimisation mentale. Au fond, c’est la même chose pour un manager : son mental est soumis à rude épreuve, et sans aide il se peut que ses capacités soient altérées par la fatigue, le stress, les conflits…   Avoir un outil pour gérer tout ça et se concentrer au mieux sur son cœur de métier, semble indispensable. Cela permet d’éviter les burn out qui coûtent chers à l’entreprise, et d’améliorer en même temps la qualité de vie au travail,” explique Finel. Lorsque Amrani renchérit: “pour motiver une personne, il est nécessaire parfois de faire le point, et de reconsidérer “pourquoi l’on fait tout cela”. Quelles sont nos motivations profondes? La réussite est fragile, et il suffit parfois que la motivation baisse un peu pour que l’on perde confiance en soi. L’hypnose permet de visualiser son objectif afin “d’y arriver” coûte que coûte”, tout en martelant ces mots, comme un métronome. Visualiser, de même qu’un marathonien se voit passer la ligne d’arrivée et vider son esprit pendant que son corps poursuit l’effort sans s’en rendre compte. Il suffit de s’imaginer être “le meilleur journaliste du Monde”, pour le devenir… Miraculeux non? 

 
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