PolitiquePolitique au Maroc

Interdit de se mettre d’accord sur les solutions à la compensation

La Caisse de compensation est un gouffre budgétaire. Sa réforme est une cause nationale qui ne peut faire l’objet de la politique politicienne. Notre confrère Andaloussi propose des pistes de solution loin des clivages politiques.

Le théâtre de la compensation

Non, votre proposition n’est réaliste …….

Non, votre initiative sent l’odeur de l’exploitation politicienne….

Non,  l’indexation nuit à l’économie et au pouvoir d’achat…..

Non,  à l’octroi d’aide directe aux plus démunis……

Non,  à l’augmentation des charges de production ……

Oui, la caisse de compensation est une bombe …..

Oui, les plus riches profitent plus que les pauvres……

Oui, les grands et luxueux véhicules traversent les kilomètres aux frais des contribuables !

Oui, les grandes exploitations agricoles utilisent des centaines de bonbonnes de gaz pour irriguer et faire chauffer les serres !

Oui, les pâtisseries de luxe produisent avec l’appui de l’argent public et vend au public à prix fort !

Oui, les caisses de l’Etat sont surchargées par les factures de la compensation ! 

Tout le monde peut dire oui et non sans franchir le pas vers les solutions. Et lorsqu’un pauvre responsable politique ose toucher le domaine de l’interdit idéologique, il est insulté pour son initiative. Au début des années quatre vingt, le défunt  roi Hassan II  avait pris l’initiative de créer une commission dans laquelle la présence des chefs des partis politiques de l’époque à été remarquée. Les travaux de cette commission devant réfléchir sur le système du pouvoir d’achat des plus démunis et partant, sur la compensation n’ont pas abouti. La solution consistant à remettre des cartes aux indigents a été soulevée, mais vite retirée en raison de la non faisabilité du système proposé et de ses dangers politiques. Les dysfonctionnements qui ont accompagné la distribution RAMED confirment ces craintes.

Abdelilah Benkirane,
Chef du gouvernement.

 La compensation a été invitée à la campagne éléctorale

La campagne électorale des législatives a remis la Caisse de compensation au centre des débats et des stratégies publicitaires des partis. On est même allé jusqu’à tracer les contours d’un cadre pour octroyer une directe sous forme de « salaire mensuel »aux familles démunies. La proposition a vite buté sur la réalité marocaine. L’aide directe n’est pas  réaliste et peut enfoncer le pays dans le gouffre de l’assistance et des différents réseaux de clientélisme politique. 

La mauvaise foi n’est pas étrangère aux différentes tentatives de réforme de la Caisse de compensation. Les semblants de débat autour de l’indexation des prix de l’essence et du gasoil sont emprunts d’une démagogie outrancière. Tout le monde pleurniche sur l’état de nos finances publiques et n’hésite pas à développer des argumentaires trop légers sur l’impact de ce système sur le pouvoir d’achat des ménages et des entreprises. Est-il raisonnable de s’endetter pour suivre l’évolution erratique des prix du baril ? 

Avançons en tant que citoyens vers des solutions de cette caisse hypertrophiée par l’ampleur de ce qu’elle doit couvrir comme différence entre les prix réels et ceux payés par les consommateurs. 

Aveux d’un citoyen appartenant à la classe moyenne supérieure

C’est pour ces raisons que j’ai décidé de passer aux aveux et de reconnaitre ce que je tire comme profit de cette caisse alors que je fais partie de la classe moyenne supérieure. Il m’arrive de consommer cinq bonbonnes de gaz par mois. Ma famille se permet de prendre quotidiennement des bains chauds grâce à la subvention. Lors des jours et nuits de l’hiver, je n’hésite pas à faire fonctionner le chauffage au gaz subventionné. Après calcul, le profit tiré de la compensation s’élève à environ 300 DH par mois. Je dispose de deux voitures qui consomment un plein par semaine soit un gain en compensation qui peut être chiffré à environ 500 DH par mois. Les boissons contenant le sucre ainsi que les pâtisseries occupent une place dans la consommation familiale qui peut être évaluée en termes de compensation à environ 100 DH. Au même moment des pâtisseries, des usines de boissons gazeuses sucrées et un grand nombre d’exploitations agricoles profitent d’un argent qui ne leur est pas, en principe, destiné. 

Alors pourquoi le gouvernement ne veut pas me faire payer ce qu’il paie indûment  pour moi et ma famille ainsi que les individus ou entreprises qui profitent comme moi de ces largesses publiques ?  Pour faciliter le travail des décideurs, je vais proposer une série de mesures qui ne vont toucher que ceux qui profitent indûment de notre Caisse de compensation. Ces propositions se caractérisent par le fait que la structure des prix restera la même. La paix sociale et le pouvoir d’achat de la classe moyenne et des plus démunis seront préservés.

 Modalités pratiques

Au niveau de la récupération des différentiels en matière du prix du gaz :

Augmenter le barème de taxation au titre de l’habitation pour les ménages habitant dans les quartiers avec prédominance des maisons moyen et haut standing. Les bases de données des directions régionales des impôts sont presque exhaustives et permettent de procéder aux réaménagements des valeurs locatives et des barèmes. Une attention particulière devrait néanmoins être accordée aux retraités afin de ne pas toucher à leurs modestes pensions. Cette opération pourrait faire contribuer des centaines de milliers de ménages. Le chiffre de cette mesure pourrait alléger la facture gazière d’une façon significative et notamment au niveau des grandes villes. Un travail d’enquête et de recensement doit être entrepris pour lister les grands exploitants qui utilisent le gaz subventionné d’une façon inconsidérée et de les faire payer au moins une partie du différentiel de prix. Une autre mesure pourrait être avancée. Elle consiste tout simplement à interdire l’utilisation du gaz  sous forme de bonbonnes dans les grandes exploitations et mettre en place des réservoirs de gaz avec compteurs pour éviter les détournements à travers les réseaux parallèles.

 Au niveau des produits pétroliers :

La solution est simple et efficace. L’assistance doit être réservée au transport en commun et à celui des marchandises. La compétitivité de certaines entreprises peut être traitée à travers un système d’exonération ciblé et partiel au niveau du prix du gasoil à l’image de certaines pratiques européennes. Les voitures personnelles soumises au paiement de la vignette(TSAVA) peuvent être soumises à des augmentations en fonction de leurs forces motrices et de leurs valeurs. Faire un voyage dans des voitures luxueuses et confortables ne doit pas se faire aux frais du contribuable. Le dédouanement des voitures doit être soumis à une taxe supplémentaire de compensation. Les frais d’immatriculation peuvent subir une légère augmentation pour faire payer les plus aisés. 

Vœux et espoirs

Il s’agit de propositions citoyennes qui ne sont animées que par le souci d’une justice sociale qui doit encourager la contribution au redressement des comptes publics selon la capacité contributive des marocains. 

J’espère qu’un débat pourra être lancé autour de ces propositions loin des carcans politiciens. Arrêtons de constater sans proposer de solution. Puisons dans l’intelligence de nos économistes citoyens pour avancer dans le terrain des réformes avec comme seul moteur l’intérêt national.  

J’ai essayé d’associer certains amis et collègues, ainsi que certaines personnes rencontrées au hasard dans des trains. La réaction que j’ai pu entendre m’a encouragée à étaler dans ce papier des idées qui circulent sans être formulées. Elles le sont maintenant, certes, d’une façon  désordonnée mais néanmoins claire et sincère.  

 
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