Interview

Khalid ZAZOU : « La Loi de Finances de 2022 est le 1er jalon du processus de réforme fiscale »

Adoptée au mois de juillet de l’année 2021, la loi-cadre portant réforme fiscale, s’appuie à travers ses axes sur les principales recommandations retenues à l’issue des Assises nationales sur la fiscalité, tenues au mois de mai 2019 et que le gouvernement actuel s’est engagé à entamer cette réforme dès 2022. Il faut dire que la réussite des grands chantiers lancés par le Souverain, dont celui afférent à la généralisation de la protection sociale, est intimement liée à la mise en œuvre de cette réforme qui doit permettre à l’Etat de disposer de ressources financières propres, suffisantes, stables et durables. Quid aujourd’hui, de la mise en œuvre de cette loi-cadre portant réforme fiscale ? Pour Khalid ZAZOU, Directeur Général des Impôts, les mesures fiscales de la LF 2022 constituent la première étape du processus de réforme fiscale. Eclairage. 

Challenge : La loi cadre portant réforme du système fiscal a été adoptée au mois de juillet 2021, peut-on considérer l’année 2022 comme étant une «année de transition fiscale» ?  

Khalid ZAZOU : Il est à rappeler au préalable, que la loi-cadre n° 69-19 portant réforme fiscale a été élaborée sur la base des recommandations des troisièmes Assises nationales sur la fiscalité, organisées en 2019. De même, il est important de souligner la parfaite concordance des mesures de la loi-cadre avec les orientations du Nouveau Modèle de Développement relatives au domaine fiscal.

Cette convergence permet de dire que les contours de la réforme fiscale sont le résultat de la concertation avec l’ensemble des acteurs économiques, politiques et sociaux concernés. Quoique certaines mesures fiscales des lois de finances 2020 et 2021 se soient inspirées des recommandations des Assises fiscales, la LF de 2022 constitue le 1er jalon de la mise en œuvre de la loi-cadre portant réforme de notre système fiscal.

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En effet, l’article 19 de ladite loi-cadre prévoit que l’Etat s’engage à édicter les textes nécessaires pour la mise en œuvre des mesures prioritaires prévues aux articles 4, 9 et 13 dans un délai de cinq ans, à compter de sa date d’entrée en vigueur (date de sa publication au Bulletin Officiel). C’est dire, que les mesures fiscales de la LF 2022 constituent la première étape du processus de réforme fiscale, étant entendu que les mesures fiscales des prochaines LF s’inspireront de cette loi-cadre qui constitue désormais, le seul référentiel qui encadre la politique fiscale de l’Etat. 

Challenge : Dans le cadre du chantier de la réforme du système fiscal, quelles sont les priorités de cette réforme à décliner au cours des trois prochaines années ? 

En vue d’opérationnaliser les objectifs de cette réforme fiscale, les dispositions de l’article 19 de la loi-cadre prévoient comme il est souligné ci-dessus, l’engagement de l’Etat d’édicter les textes nécessaires pour la mise en œuvre des mesures prioritaires prévues aux articles 4, 9 et 13 dans un délai de cinq ans, à compter de la date d’entrée en vigueur de ladite loi-cadre.

Ces mesures prioritaires s’articulent principalement autour des axes suivants: En matière de taxe sur la valeur ajoutée, la réforme fiscale vise la consécration du principe de la neutralité de la TVA à travers l’élargissement de son champ d’application, la réduction du nombre de taux et la généralisation du droit au remboursement. S’agissant de l’impôt sur les sociétés, la loi-cadre prévoit la convergence progressive vers un taux unifié concernant notamment les activités industrielles, l’amélioration de la contribution des sociétés exerçant des activités régulées ou en situation de monopole ou d’oligopole.

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En ce qui concerne l’impôt sur le revenu, la réforme fiscale porte sur le réaménagement du barème progressif des taux de l’impôt et l’adaptation et l’amélioration du régime des contribuables à revenu modeste pour accélérer l’intégration du secteur informel. Enfin, la loi-cadre prévoit diverses mesures prioritaires dont notamment, la baisse progressive des taux de la cotisation minimale, la mise en conformité du système fiscal avec les règles de bonne gouvernance en matière de fiscalité internationale et la refonte des règles relatives à la fiscalité des collectivités territoriales en vue de leur harmonisation avec les dispositions régissant les impôts d’Etat. 

Challenge : En matière de gouvernance administrative de l’impôt, quelles ont été les principales réalisations au cours des dernières années et quels sont les principaux défis à relever dans le mode de gestion administrative de l’impôt ? 

A cet égard, il est important de rappeler que les principales dispositions de la loi-cadre édictées en matière de gouvernance, concernent la dispense d’un service de qualité aux contribuables. Pour ce faire, il est recommandé de poursuivre le processus de modernisation et de digitalisation des services de l’administration fiscale, de renforcer le professionnalisme et les capacités des ressources humaines et de développer les relations de coopération avec les partenaires de l’administration fiscale et enrichir les bases de données.

Par ailleurs, la loi-cadre met en évidence l’importance de la consolidation de la relation de confiance entre l’administration fiscale et les contribuables à travers notamment, la clarification et l’amélioration de la lisibilité des textes fiscaux, le renforcement de l’assistance et du conseil aux contribuables et l’amélioration des moyens de communication et d’information en vue d’inciter les contribuables à s’acquitter spontanément de leurs obligations fiscales.

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Sur le plan de la dématérialisation, l’administration fiscale est pionnière en matière de digitalisation des services publics en procédant depuis plus de 15 ans, à la mise en place et au développement de systèmes informatiques performants et adaptés de manière permanente aux besoins d’amélioration de la gouvernance administrative. La digitalisation a été érigée en règle légale insérée dans le Code général des impôts imposant au contribuable d’accomplir toutes ses obligations déclaratives et de paiement par voie électronique et à l’administration de délivrer par procédé électronique, les demandes, attestations et autres services demandés par les contribuables.

Cette digitalisation à double facette, a permis de concrétiser les projets qui entendaient associer la modernisation de l’administration et l’introduction d’innovations managériales, en reconfigurant la relation des agents de l’administration avec le public. La disponibilité d’une information immédiate, exhaustive et fiable a permis d’améliorer considérablement la gouvernance administrative dans le domaine du contrôle, grâce aux nouvelles méthodes basées sur la gestion du risque et à une surveillance accrue du comportement fiscal.

Enfin, conscient qu’un système fiscal basé sur la confiance et le consentement à l’impôt constitue l’un des piliers de la réforme fiscale, l’administration fiscale s’est impliquée dans l’effort permanent de simplification de la législation et des procédures, des programmes ciblés en matière de communication et de services aux contribuables, des systèmes de traitement automatique des déclarations et des paiements, notamment pour la relance immédiate et systématique des défaillants.

 
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