Entreprises & Marchés

La Caisse de compensation, frein à l’emploi

Ruineux, inéquitable, le système de compensation actuel est un vrai handicap pour le développement et l’emploi.

Notre confrère Andaloussi a proposé, dans le numéro de Challenge de la semaine dernière, à partir d’un chiffrage précis des bénéfices qu’il retire de la Caisse de Compensation, des mesures concrètes pour permettre à l’Etat de récupérer ces sommes. Dans la tranche supérieure de la classe moyenne, ils sont nombreux à déclarer, et depuis longtemps leur disposition à subir une taxe redistributive. Le principe est que, si l’on devait maintenir tel qu’il est le système de compensation, imposer ceux qui en profitent indûment à hauteur de leur consommation. C’est cela ou à l’inverse, soutenir les plus pauvres directement, par le modèle de la bolsa familia et libérer les prix. C’est cette deuxième option qu’avait choisi le gouvernement Benkirane à son arrivée, il a reculé par crainte de remous politique.

Les adversaires de la réforme, affirment mordicus que le coût social, politique serait énorme et que l’Etat pourrait mobiliser l’argent ailleurs, sur les niches fiscales par exemple. Selon les calculs les plus objectifs la dépense fiscale est de l’ordre de 30 milliards de dirhams. C’est effectivement important même si cela ne couvre qu’une partie du budget de la compensation. Et surtout, parce que certaines niches fiscales doivent être maintenues pour des raisons économiques.

On a voulu faire de ce débat une question technique où les chiffres valsent sans que l’on précise ce qu’ils recouvrent dans la réalité de tous les jours. Tout ce que l’on sait, c’est qu’il s’agit de soutenir les prix pour éviter l’exposition sociale. Juin 1981 et les tumultes qui ont accompagné le programme d’ajustement structurel ont marqué les esprits.

Parlons chiffres : le budget de la compensation pour l’année en cours est de 62 milliards de dirhams. Pour ne pas le dépasser, le gouvernement a mis en place le système de l’indexation, celui-ci est censé fixer le niveau de l’intervention de l’Etat. Il ne baisse pas son engagement même quand les prix à la pompe flambent. Mais il ne répond pas à la demande d’équité. Celui qui a trois voitures de luxe, bénéficie toujours d’un soutien exorbitant des pouvoirs publics.

Car, ce qu’il y a de pervers dans le système, c’est que ce sont ceux qui consomment le plus qui en profitent le plus. Les différenciations sociales sont telles, que l’on peut dire que seule une part estimée à 20 % du budget de la Caisse de Compensation va à la moitié de la population qui a besoin de soutien, en y incluant quelques activités.     

                                 

Inverser le problème

Pour sortir du dilemme, il faut poser la question différemment. Que perdent les citoyens par le maintien du système actuel ? Grevé par de tels montants, le budget de l’Etat qui n’est pas extensible à souhait, oblige à des arbitrages. Ce sont les secteurs sociaux qui en pâtissent en premier. La Caisse de Compensation est financée au détriment du budget d’investissements et donc de la qualité des services publics. Ce sont des milliers d’emplois en moins chaque année.

Raboter les niches fiscales et récupérer ne serait-ce que la moitié des dépenses de la Compensation se traduirait, au minimum, par l’investissement de 50 milliards de dirhams en plus chaque année, toutes choses restant égales par ailleurs.

En restant au milieu du gué, l’exécutif tente de soigner le cancer avec de l’aspirine. Les deux hausses du prix du carburant ont suscité des mécontentements mais n’ont pas baissé le niveau des engagements de l’Etat. De très grandes exploitations agricoles utilisent le GPL, la butane, parce que c’est fortement subventionné (cela aurait pu être interdit simplement). Les hausses creusent les inégalités, parce qu’elles touchent plus les démunis proportionnellement à leur pouvoir d’achat.

Donner à l’Etat les moyens de ses fonctions régaliennes, passe par une réforme fiscale et un système de compensation juste et fiable. Si les politiques n’ont pas le courage nécessaire pour imposer l’aide directe, alors la taxe redistributive est la solution. Sinon, il faut accepter le délabrement des hôpitaux, la faillite de l’école en contrepartie de la baguette de pain à 1,20 dh. C’est juste une question de calcul. 

 
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