Blog de Jamal Berraoui

La tragédie Egyptienne

La comptabilité macabre n’est pas mon exercice préféré. Le nombre de manifestants tués en Egypte, des centaines selon les militaires, des milliers selon les Islamistes n’a pas grand intérêt. Ce qui choque le plus ce sont les déclarations des pseudo-démocrates. « L’Egypte à la tête haute », « les militaires ont appliqué la volonté du peuple » « Le peuple veut l’épuration ». Même chez nous, certains sur internet, ne cachent pas leur joie, anti-intégriste je le suis, démocrate aussi. Alors, sans ambages je suis avec les Frères musulmans, contre l’armée Egyptienne.

Les pseudo-démocrates perpétuent une erreur tragique, celle qui consiste à s’allier aux sécuritaires contre l’Islam politique. Ben Ali et Moubarak ont bénéficié de ce soutien et ont pu se maintenir pendant 30 ans, en agitant le spectre de l’islamisme. C’est l’une des raisons du vote massif en faveur des intégristes après les révoltes. Ils sont identifiés comme le courant qui a affronté la dictature et qui en a payé le prix.

Si ceux qui avaient manifesté le 30 juillet, s’étaient maintenus Place Tahrir pendant un mois, ils auraient probablement obtenu le départ de Morsi. En se cachant derrière, ils ont perdu toute légitimité. Les Islamistes ont démontré leur force de conviction, leur capacité d’organisation et accessoirement leurs moyens financiers, qui dépassent largement ceux d’un parti politique. Il faut être aveugle et sourd pour croire qu’ils vont rentrer chez eux et accepter le fait accompli. Une partie choisira la violence. La guerre civile est déjà enclenchée. Cela signifie que l’armée restera le pivot des institutions en Egypte puisqu’elle est la garante de l’ordre. Les pseudo-démocrates en acceptant, pire en réclamant, la répression des Frères musulmans ont été les fossoyeurs de la révolution. Un régime militaire saupoudré de prétendus démocrates, une guerre civile, des tensions confessionnelles, c’est le futur immédiat de l’Egypte.

Certains s’empressent d’importer le débat. Un chercheur spécialisé voit dans ce qui se passe au Caire le début de la fin des Islamistes. Des politiques adhèrent à cette thèse. Cette rapidité en dit long sur l’incapacité à comprendre l’histoire. L’Islam politique a échoué dans la gestion des affaires publiques. C’est un constat loin d’être partagé parce que la durée est trop courte et que les Islamistes accusent des forces occultes de sabordage.

L’Islam politique est né et a prospéré dans des sociétés traversées par des secousses identitaires, subissant une modernisation sans lien avec la modernité. Tant que ces conditions existent, l’Islamisme fleurira. Libre à ceux qui veulent s’appuyer sur la répression pour le réduire, ce n’est pas mon cas. Combattre l’intégrisme n’a de sens qu’autour d’un projet de société laïque, moderniste, sans concessions aucune à la religion qui doit quitter le champ public. L’autonomie des sphères est le combat qui vaille. Les raccourcis ne sont que des impasses parce qu’encore une fois on ne change pas une société par Dol. En finir avec l’Islamisme ? Mille fois oui, mais pas l’action politique et dans le respect des valeurs démocratiques. 

 
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