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L’assurance maladie pour étudiants fait sa rentrée

La rentrée universitaire 2015-2016 restera dans les annales. Pour la première fois, les étudiants vont bénéficier, pour une grande partie d’entre eux à titre gratuit, de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO), «un acquis historique» selon le département de la Santé. Quelles sont les véritables dimensions de ce nouveau régime et quelles en sont les clés du succès ? par Abdelfettah Alami

Depuis son entrée en vigueur en 2005, le régime de l’AMO n’a pas cessé d’évoluer aussi bien au niveau des paniers des prestations assurées que de l’extension des populations éligibles à ce système. Aujourd’hui, ce sont les étudiants qui en seront les principaux bénéficiaires et ce, à partir de l’année universitaire 2015-2016. En effet, la Chambre des Représentants a approuvé, le mercredi 22 juillet 2015 en séance plénière, le projet de loi 116.12 qui assure une couverture médicale au profit des étudiants de l’enseignement supérieur et de la formation professionnelle, dans les secteurs public et privé, qu’ils soient marocains ou étrangers. Environ 260.000 étudiants bénéficieront de la couverture médicale, sur un total de 900.000 étudiants qui accéderont aux universités marocaines lors de la prochaine rentrée universitaire pour un coût global de 100 millions de dirhams, en grande partie à la charge de l’Etat.
Ce projet, qui renforce la base de la population marocaine bénéficiant de l’assurance maladie puisque, après que 34% de la population a bénéficié de l’assurance maladie obligatoire (AMO) lancée en 2005 et après la généralisation du Régime d’Assistance Médicale (RAMED) en 2013 dont ont bénéficié 8,5 millions de personnes, soit l’équivalent d’environ 28% d’habitants, avec l’intégration de la population des étudiants dans ce régime, le nombre de bénéficiaires de la couverture médicale atteindrait 62%, selon les chiffres communiqués par le ministère de la Santé.

Une justice dans les critères d’éligibilité

Selon l’article 3 de la loi 116-12, les étudiants des établissements de l’enseignement supérieur de l’Etat, ceux des classes préparatoires des établissements publics ou privés, de l’enseignement technique et ceux poursuivant leurs études dans des institutions privées de formation professionnelle sont assujettis à l’AMO jusqu’à l’expiration de la durée de leur cursus et au plus tard, jusqu’à l’âge de 30 ans. Pour bénéficier de cette couverture, les étudiants concernés ne doivent être ni affiliés, ni bénéficiaires d’aucun autre régime d’assurance maladie de base de quelque nature que ce soit.
L’AMO pour étudiants est financée pour l’essentiel par la subvention du budget de l’Etat et par les cotisations d’une certaine catégorie d’affiliés. Ainsi, celui-ci ne prend en charge que les étudiants des universités, des instituts supérieurs d’enseignement publics et des établissements de la formation professionnelle qui pourraient, en cas de nécessité, être appelés à cotiser à ce régime (Art. 10). Même si, comme signalé précédemment, une enveloppe budgétaire de 100 millions de DH est prévue pour financer ce nouveau régime, la brèche introduite par cet article 10 laisse comprendre, contrairement à ce qui a été relayé par certains organes de presse, que la couverture médicale pour étudiants ne serait pas complètement gratuite ! Il aurait été plus juste d’instituer cette gratuité pour les étudiants issus de familles ayant un revenu inférieur à un plafond déterminé ; les autres pourraient s’acquitter d’une cotisation nivelée en fonction des revenus fiscaux de chaque foyer.
En tous cas, en introduisant un système payant pour les établissements privés, censés abriter les étudiants de familles solvables et un régime non cotisant pour ceux poursuivant leurs études dans des établissements publics, la loi 116-12 institue une certaine justice dans la répartition des charges de ce régime. D’ailleurs, s’agissant des étudiants dans les établissements supérieurs privés, la cotisation sera, en totalité à leur charge. Ils acquitteront leur cotisation en même temps que les frais d’études. Celle-ci, qui sera versée par les établissements assujettis à l’Agence Nationale d’assurance Maladie-ANAM- est calculée de manière à assurer l’équilibre financier du régime.
De par les dispositions de la loi précitée, les étudiants marocains pourront bénéficier d’un panier de soins similaire à celui d’assurance maladie obligatoire (AMO) dont jouissent les fonctionnaires, dont les soins préventifs et médicaux en rapport avec les programmes prioritaires et inscrits dans le cadre de la politique médicale de l’Etat et les services de la médecine générale, les spécialités médicales et chirurgicales, les laboratoires d’analyses médicales, la radiologie et les échographies.
Les étudiants pourront également bénéficier de soins fonctionnels, des poches de sang humain et de ses dérivés, des lunettes de vue, des soins dentaires et également des services de rééducation fonctionnelle et de réadaptation médicale et des services paramédicaux. Selon un communiqué du département de la Santé, toutes ces prestations seront réalisées dans les hôpitaux publics et les cliniques privées.
Tel que prévu dans la loi 12-116 récemment adoptée, c’est la Caisse Nationale des Organismes de Prévoyance Sociale (CNOPS) qui sera chargée de traiter les dossiers des étudiants.

Activer la mise en place du régime

A noter, que pour une meilleure transparence de ce dispositif et pour se prémunir contre le risque d’amalgame, l’AMO destinée aux étudiants sera individualisée dans les comptes de la CNOPS par rapport aux autres régimes gérés par celle-ci. Mieux, les réunions du Conseil d’Administration de la Caisse réservées aux questions relevant de cette couverture sont exclusives à ces dernières et ne peuvent traiter d’autres aspects de la gestion de la CNOPS.
Les détails logistiques, juridiques et techniques des modalités de son application ont été discutés et finalisés mardi 4 août 2015 lors d’une réunion du Comité ministériel de pilotage de la réforme du régime de la couverture médicale de base, présidée par le Chef du gouvernement Abdelilah Benkirane. Intervenant lors d’une réunion consacrée à l’examen des aspects juridiques, techniques et organisationnels de la mise en place du régime de couverture médicale au profit des étudiants et des modalités de son application, le Chef du gouvernement Abdelilah Benkirane a affirmé que cette réunion constitue le lancement de la mise en œuvre de ce chantier, appelant à l’organisation d’une campagne de communication, sous l’égide du ministre de la Santé, pour permettre à l’ensemble des parties prenantes (départements gouvernementaux, établissements et étudiants …) d’adhérer pleinement à ce processus.
Notons que la continuité du succès de l’AMO pour étudiants est tributaire de la capacité à transcender les contraintes et à mettre en place des mécanismes de contrôle à priori et à postériori et à établir les paramètres capables d’assurer l’équilibre financier du régime. n

 
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