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Le dernier rapport de la BAD : ce qui est passé inaperçu

Si le rapport de la BAD (Banque Africaine de Développement) sur les Perspectives économiques en Afrique en 2018 paru la semaine dernière a été largement relayé et commenté par la presse nationale, il n’en demeure pas moins que de larges pans de ce rapport de haute facture sont passés inaperçus chez les différents organes qui se sont principalement focalisés sur le volet de l’analyse prospective de la situation socio-économique du Maroc en 2018 et 2019 et par, ricochet, sur les facteurs positifs et négatifs qui sous-tendent la performance socio-économique du pays.

Or certaines informations, certes disséminées dans un fouillis de données statistiques remontant aux années cinquante pour certaines, que ce rapport a charriées sont des plus édifiantes quant à l’origine du manque de compétitivité de l’économie marocaine et de l’insuffisance de sa croissance et de son caractère peu inclusif. Aussi, y apprend-on qu’en matière d’élasticité de l’emploi par rapport au PIB (indicateur qui mesure le rapport entre le taux de croissance de l’emploi et le taux de croissance du PIB) au cours de la période 2000-2014, notre pays affiche un taux médiocre de 0,3 contre 0,55 pour l’Égypte, 0,9 pour la Côte d’Ivoire et le Cameroun et 1,25 pour le Liberia. Sachant que l’élasticité souhaitable pour les pays en développement est d’environ 0,7 (un chiffre basé sur l’élasticité en République de Corée au cours des années 1970, lorsque le pays avait un niveau de développement et de ressources comparable à celui de certains pays africains), on peut facilement deviner pourquoi la croissance économique au Maroc est très peu créatrice d’emplois.

Par ailleurs, les économistes de la BAD nous expliquent que lors des périodes d’accélération de la croissance que le Maroc a connues depuis son indépendance (et elles sont au nombre de quatre, soit une des occurrences les plus élevées du continent), l’effet théoriquement positif de la réaffectation du travail de l’agriculture vers d’autres secteurs a été atténué par le fait que ce facteur de production a rejoint essentiellement le secteur des services dont la production est souvent faible. Enfin, un autre indicateur qui traduit également le manque d’efficience de notre économie est celui de la part des étudiants marocains dans les programmes d’ingénierie, de fabrication et de construction qui était de 12% en 2014 contre plus de 20 % en 2014 en Autriche, en Allemagne, en Malaisie et au Mexique. Au demeurant, on ne le répétera jamais assez, mais tant que l’industrie continuera de représenter la part congrue de notre économie (à peine 15% aujourd’hui), il n’y aura pas vraiment de décollage économique ni de résorption durable du chômage. Et ça même un géant comme l’Inde qui est devenu le « bureau du monde » après avoir misé sur les services à l’export (quand bien même à forte valeur ajoutée dans les métiers d’ITO et de BPO), l’a bien compris en mettant en place depuis quelques années une stratégie d’industrialisation au pas de charge, dénommée « Make in India » et dont la composante de formation d’ingénieurs et diversification des filières (assez concentrées jusqu’alors sur les NTIC) est un point nodal.

Le Plan d’Accélération Industrielle (PAI) mis en place par le Maroc en 2014 vise justement à ériger, enfin, le secteur secondaire en véritable moteur de création de valeur économique et de postes d’emploi en hissant la part de ce dernier dans le PIB à 23% (contre à peine 14% en 2014) en créant, au passage, un demi-million d’emplois. 

 
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