Sport

Le Mondial et le Cheval

La 15ème édition du Trophée Hassan II des arts équestres traditionnels (Tbourida) s’est déroulée au Royal Complexe Dar Es-Salam à Rabat, comptant pour le championnat du Maroc 2014.

L’événement est planétaire. Il l’était déjà dans les années 50, au siècle dernier, quand la retransmission satellitaire n’avait pas encore connu cette explosion cosmique qui fait désormais parvenir l’image, en temps réel, dans les moindres interstices de notre vie. Démodé et désormais dépassé, le bon vieux poste T.V qui trônait dans le salon où se réunissait, religieusement, autour de lui la famille et où une seule chaine dictait le programme que l’on dégustait sous l’autorité farouche du papa.

Aujourd’hui, la télé, si elle a perdu de sa sacralité, a gagné en diversité et en expansion. L’image se décline sur les P.C., tablettes, portables, montres, lunettes, elle peut vous suivre partout, que vous soyez dans une grande métropole urbaine ou au milieu du désert de Gobi, dans un duplex au bord de la mer, ou en mission dans les fjords norvégiens ou, mieux encore, en exploration sur la calotte polaire avec les ours blancs, vous pouvez rester branché et suivre les événements.

Et cette semaine, et depuis un bon moment déjà, l’événement c’est la Coupe du Monde.

En calculant, selon les méthodes anciennes, qui délimitaient l’audimat par le nombre de foyers qui regardent telle émission à un moment donné, on a chiffré à un milliard de téléspectateurs, les terriens qui auraient suivi l’ouverture du Mondial 2014, hier 12 Juin avec le match Brésil – Croatie. 

Maintenant, ces statistiques de l’audimat habituel vont devoir être revues à la hausse, car comme on l’a dit plus haut, les satellites « arrosent » tous les points du globe et l’image n’est plus captée par la seule parabole domestique plantée sur les toits et fenêtres d’immeubles, mais véritablement partout.

Alors, par quel moyen peut-on recenser tous ceux qui ont pu avoir accès à la retransmission ? Bien sûr, il y a les données scientifiques qui font le lit des discussions pour déterminer le coût des droits (pour le mondial 2014 les droits télé ont grimpé jusqu’à 1.9 milliard d’euros), mais qui pourra dire si, à l’avenir, puisque les moyens de recevoir les images, s’étant multipliés et … « démocratisés » (un pirate aguerri peut, grâce à internet, décoder n’importe quel système) on ne va pas voir se développer une nouvelle politique de diffusion où les grands opérateurs et groupes, les « networks » qui négocient et achètent les droits, ne vont pas devoir partager et céder une partie de leur pouvoir, plutôt que de le voir dilapider alors qu’ils espéraient en tirer bénéfices et considération ?

Mais tout cela est une réflexion qui va nous emmener trop loin, pour l’instant, concentrons-nous sur les images de 2014.

Pour notre zone géographique, appelée en anglais, MENA (Middle East, North Africa) c’est la chaine Qatarie « Be in » (Al Jazirah) qui détient les droits du Mondial brésilien et les diffuse à ses abonnés moyennant un abonnement spécial.

Qu’elle ait été contournée par des tas d’autres chaines que le commun des mortels, même sans le précieux sésame du code, a pu suivre gratuitement ou presque, n’est pas le problème.

L’essentiel, c’est que l’engouement pour le spectacle de la Coupe du Monde existe, qu’il est bien réel, qu’il est ravageur, dominateur et qu’il va vous prendre la tête pendant un bon moment en ce début d’été.

On l’a déjà dit, les 32 pays qui participent à ce magnifique raoût galactique ont bien de la chance. Ils sont détaillés sous toutes les coutures, se faisant ainsi connaitre dans tous les coins de la planète.

Notre pays aurait pu en être, il aurait même dû y être, tous les moyens matériels ont été mis à la disposition des coachs nationaux, mais ceux-ci n’ont rien pu réussir.

Pourtant, ils s’y étaient mis à plusieurs et depuis plusieurs années. Cela a commencé par Gerets et son adjoint Cuperly en 2010-2012 avant que de se poursuivre en 2013 avec l’inénarrable Rachid Taoussi et son quatuor d’assistants (Baddou, Regragui, etc…). On aura espéré, espéré, et puis après avoir beaucoup attendu et dépensé (gaspillé ?) on a dû se résigner à notre déception, hélas !

Encore une, après toutes celles que nous subissons depuis 1998. 

Triste tableau.

Pourtant, on aurait tort de sombrer dans la sinistrose.

Le Mondial et le foot, tout souverainement médiatiques qu’ils soient, ne sont pas le plus important dans une vie sociale et sportive.

Le Royaume du Maroc a d’autres atouts dans sa manche, et si, par la force des choses et celles de médias trop braqués sur le ballon rond, ceux-ci (les atouts) ont pu passer inaperçus, ils n’en existent pas moins.

Il y a d’autres sports dans notre pays qui sont en train de combler leurs fans en attendant d’être découverts à leur juste mesure par un public plus large.

On en a souvent parlé dans votre hebdomadaire « Challenge » mais toutes les occasions sont bonnes pour en rappeler l’importance.

Il s’agit bien entendu du golf, de l’athlétisme, du tennis, du jet ski et de tous les sports liés à l’eau, mais aussi, last but not least, des sports équestres.

Et là, il s’agit de tirer un grand coup de chapeau à ce qui se passe dans la FRMSE que Moulay Abdallah Alaoui pilote dorénavant, depuis la disparition de la regrettée Lalla Amina, d’une main aussi sûre que celle qui prévaut lorsque l’on tient les rênes des meilleurs purs-sangs.

Sport de l’élégance, sport dynastique, sport historique, car lié à la tradition la plus ancrée et la plus ancienne de notre culture et de notre civilisation, le sport équestre ne ressemble à aucune autre discipline sportive. D’abord, il fait appel à un autre être vivant – le cheval – et la domestication de ce magnifique équidé est considérée comme la plus noble conquête de l’homme.

Noblesse, distinction, maitrise, rigueur, voici, en outre, les qualités requises pour ce sport, qualités dont Moulay Abdallah président averti, a fait la réussite considérable du «Trophée Hassan II des arts équestres traditionnels ».

Rien que le libellé de cette manifestation nous plonge dans les arcanes profondes de notre mémoire. « Arts traditionnels », car il s’agit bien d’artistes, animés d’un savoir-faire exceptionnel venu de la nuit des temps.

Ce sont six troupes qui sont venues, à cheval comme de bien entendu, pour disputer la finale de ce que le bon peuple connait sous le vocable populaire de « Tbourida ».

Une « Tbourida » qui n’est en rien un simple baroud d’honneur comme d’aucuns le supposent, car la compétition est déterminée par des critères techniques très précis.

Les juges notent tout, de la qualité des costumes à celle de l’harnachement des montures, sans oublier la précision de la cavalcade où le maniement habile de la « mqohla » (fusil) doit aboutir à la synchronisation parfaite de la salve finale « talqa »

Dimanche dernier à Dar Es Salam, la troupe « sorba » Benkhada de la région Chaouia-Ouardighia a pris le meilleur, après des galops acharnés, sur l’association Harith Fantasia (région Grand Casablanca).

Les formations de Marrakech Tensift, Tadla Azilal, Chaouia-Ouardighia et Grand Casablanca se sont partagé les places d’honneur.

Si on vous dit que les dotations en primes ont dépassé le million et demi de dirhams, réparties entre cavaliers seniors et juniors, vous comprendrez que les sports équestres et leurs pendants des arts traditionnels, sont en train de franchir un sacré cap économique.

Certes, on est loin des milliards qui arrosent le sport roi, ce sacré ballon rond.

Mais il ne faut jamais désespérer.

Un jour prochain, on comprendra qu’il y a des disciplines sportives qui sont naturelles chez le Marocain, et qu’il y a dans celles-ci, des perspectives d’avenir jonchées de trophées et d’exploits.

A bon entendeur… 

 
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