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Le premier parfum marocain entre dans l’Histoire

Le premier parfum 100% marocain vient de faire son entrée à l’osmothèque de Versailles en France, le seul conservatoire mondial qui archive plus de 3000 parfums et qui retrace l’histoire de la parfumerie au fil des siècles. Malgré la concurrence du marché parallèle de la contrebande et de la contrefaçon, le business marocain du parfum demeure porteur. 

Consécration internationale, le premier parfum 100 % marocain vient de faire son entrée à l’osmothèque de Versailles en France, l’unique conservatoire mondial qui possède une antenne à New York-, et qui retrace l’histoire de la parfumerie. Le sanctuaire du parfum, en quelque sorte, avec plus de 3000 parfums « archivés », du passé et du présent, conservés dans leur formulation originale à une température constante.  Un lieu unique voué à la mémoire des odeurs, sorte de bibliothèque olfactive qui recense et rassemble les parfums d’autrefois comme les actuels, et qui permet de retrouver  la trace de certains grands parfums disparus et les faire renaître. «Soir de Marrakech», création de l’unique nez marocain et marrakchi Abderrazzak Benchaâbane entre donc dans le saint des saints et vient prendre place au milieu des raretés historiques que contient l’osmothèque, comme le Parfum royal des rois Parthes décrit par Pline l’Ancien au 1er siècle, des eaux médiévales de toilette du XIVème siècle comme « L’eau de Hongrie » d’Elisabeth de Pologne, des poudres du XVIIIème siècle comme « La poudre de Chypre », « L’eau de Cologne Impériale » créée par Guerlain pour Eugénie de Montijo en 1853 ou encore « L’eau de Cologne » créée pour Napoléon en 1815 pendant son exil à Sainte-Hélène. «L’entrée du parfum que j’ai créé en 2004 dans les collections d’une telle prestigieuse institution est une reconnaissance internationale pour le Maroc, explique Abderrazzak Benchaâbane, le Maroc qui fait entrer par la grande porte son art de vivre dans l’univers feutré du marché du luxe ».

Abderrazzak Benchaâbane, fondateur de la sociéte «Les parfums du soleil».

Diplômé en biologie-botanique, Benchaâbane crée sa propre entreprise en 2002 qu’il baptise Les parfums du soleil et signe dans la foulée une première eau de toilette 100% marocaine, « Jardin Majorelle » à la demande de Pierre Bergé et Yves Saint Laurent qui souhaitent redonner sa splendeur d’antan aux jardins du même nom qu’ils viennent d’acheter. « Ma première leçon de parfumerie, je la dois à Yves Saint Laurent qui m’a confié la création d’une eau de toilette, raconte M. Benchaâbane, et la porte de l’univers enivrant et magique des parfums s’est ouverte devant moi. » Depuis, les créations de Benchabaâne s’enchaînent : Soir de Marrakech, Mogador, Les matins bleus d’Agadir, Imilchil parfum des cimes, Casablanca, Sultane des cœurs, Fès Jardin d’épices… au total 14 parfums appartiennent  aux Parfums du soleil, sans compter la nouvelle gamme de cosmétique lancée cette année, – elle représente déjà 30% du chiffre d’affaires- qui se décline avec des produits végétaux bio comme l’huile d’argan, le ghassoul, la pierre d’alun, l’eau de rose et le dernier né à base de figue de barbarie. Une ligne de produits à succès que la marque compte bien valoriser et faire grimper sur les marches de la cosmétique haut de gamme internationale, avec une stratégie marketing qui surfe sur les tendances actuelles. «Nous avons lancé cette ligne de cosmétique pour répondre aux attentes d’une nouvelle clientèle constituée de femmes jeunes, exigeantes et dynamiques pour lesquelles un packaging léger, écolo et pratique convient parfaitement », ajoute le parfumeur. Au Maroc, le marché du parfum est estimé à environ 250 millions de DH par an, avec une demande soutenue aussi bien par les particuliers que par les entreprises qui ont opté pour ce produit de luxe comme cadeaux à offrir à leurs partenaires et clients, particulièrement au moment des fêtes de fin d’année où les distributeurs réalisent 40% de leur chiffre d’affaires. La fin de l’année est donc une période faste pour un secteur qui se maintient malgré la crise et qui reste un marché porteur au Maroc avec des prix qui oscillent entre 700 et 900 DH pour des coffrets comprenant parfum ou eau de toilette, lotion, crème ou gel-douche. Quant au parfum de marque haut de gamme, il peut grimper en boutique jusqu’à 2000 DH, un prix ajusté sur l’évolution des prix des matières premières, huiles essentielles ou essences. L’eau de toilette s’affiche en moyenne entre 500 et 800 DH. Si les importations de parfums –en majorité de France, la patrie des grands parfumeurs-, ont quasi doublé entre 2005 et 2010, passant de 698 millions de DH à 1,4 milliard, elles ont enregistré une légère baisse pour cause de crise générale en 2012 pour atteindre 1,1 milliard, selon des statistiques communiquées par les professionnels, les chiffres de 2013 n’ayant pas encore été dévoilés. Parfumeur de niche, c’est-à-dire qu’il distribue lui-même ses créations dans sa boutique spécialisée de Marrakech et dans quelques points de vente comme les aéroports marocains, mais aussi à Paris et à Berlin, Abderrazzak Benchaâbane est relativement protégé de la contrefaçon qui touche davantage la production industrielle, bien qu’il ait été informé récemment d’une tentative de copie du parfum qui vient justement de faire son entrée à l’osmothèque de Versailles. « Je ne suis pas très inquiet, dit-il, parce que parmi les produits de luxe, mon parfum est difficilement imitable étant donné la complexité du processus de sa fabrication qui est entourée du plus grand secret. » Avec 14 références de sa création, 3 parfums d’ambiance et une vingtaine de références de cosmétiques et de soins du corps, Abderrazzak Benchaâbane se félicite d’être le premier parfumeur marocain à être entré au Panthéon du parfum, ce qui a d’ailleurs boosté sa marque à l’international puisque les ventes ont carrément explosé depuis l’annonce de cette distinction, dépassant les pics habituels enregistrés lors des fêtes européennes comme Noël, Pâques, la fête des mères ou le Nouvel An. 

 
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