Tribune et Débats

Les mathématiques, outil d’aide à la décision

Albert Camus disait à propos de la peste « On croit difficilement aux fléaux lorsqu’ils vous tombent sur la tête». Nous nous sommes retrouvés dans une situation tout à fait exceptionnelle où le décideur a besoin d’une visibilité dans l’immédiat.

En se basant sur plusieurs considérations, la décision sur le début du confinement, qui n’est pas facile, était prise. Nous avons vu de grandes puissances dans l’hésitation pour prendre une telle décision. Reste la décision, encore plus difficile, sur la fin du confinement et qui doit optimiser entre ces trois contraintes, la maitrise de l’épidémie, l’économie et le social. Bien que les mathématiques pourraient intervenir sur plusieurs aspects dans la compréhension de ce virus, sur sa nature par l’analyse de l’ADN, sur son impact économique et social à travers les statistiques elles sont capables de nous projeter sur l’avenir en faisant des prévisions sur l’évolution de la propagation du virus. Par conséquent, nous donner de la visibilité sur les actions à mener et les décisions à prendre. Finalement, c’est une aide à la décision. La question est, comment peut-on faire ces prévisions ? Pour faire des prévisions, il faut appliquer des modèles d’équations qui décrivent la loi à laquelle obéit cette propagation, s’il y en a une. Les modèles d’équations donnent le lien entre les
différentes grandeurs agissant sur le phénomène, comment elles interagissent et comment elles sont connectées avec les paramètres influents sur cette propagation. Les données collectées sont injectées dans les équations et c’est la solution des équations qui donne les prévisions. Les modèles sont approximatifs et leur résolution se fait par des méthodes d’approximation. Les études mathématiques faites sur l’estimation d’erreur, concernent l’erreur entre la solution approchée fournie par la méthode d’approximation et la solution exacte du modèle, mais ne concernent pas l’erreur du modèle en soi. Le problème est qu’on est face à un phénomène tout à fait nouveau, face à un problème de recherche par excellence. Les modèles connus tels que Kermack McKendrick epidemic model (SIR) qui ont été validés sur la propagation d’autres virus, ne peuvent être appliqués tels quels les processus aléatoires ou encore les méthodes d’extrapolation. Si on met l’accent sur les méthodes d’extrapolation, il est certain qu’on ne peut pas extrapoler un désordre total. Et il est certain aussi, qu’on ne peut pas extrapoler tout de la même façon et avec les mêmes outils, un simple ajustement peut mener dans tous les sens. Si l’évolution de l’épidémie suit une loi, alors cette loi va apparaitre sur l’allure des courbes traçant cette évolution, que ça soit la courbe des nouveaux cas enregistrés ou celle des cas cumulés. Après une forme de stabilisation, les différents paramètres agissant sur l’évolution seront implicitement contenus dans ces courbes, y compris le fameux R0 (nombre moyen qu’une personne contaminée peut infecter). Dans ce cas, l’extrapolation sera capable de suivre cette allure et par conséquent, fournir des informations sur cette évolution. La nouveauté de la situation exige l’apport de nouveaux outils où le choix du sous espace d’approximation est basé sur l’hypothèse que les épidémies commencent, s’accélèrent, passent par un maximum de transmissibilité, décroissent et finissent par disparaitre. Bien évidemment, comme tous les résultats scientifiques, ceux des mathématiques entre autres, ils doivent passer par tout un rouage et une procédure de vérification et de reviewing avant d’être validés. Croire que les prévisions issues de n’importe quelle approche vont être tranchantes au point que tous les événements vont s’adapter pour coller à leurs courbes, serait de la naïveté scientifique et spirituelle. Elles ne peuvent fournir qu’un intervalle où le décideur pourrait optimiser.

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