Immobilier

Logement social : La Cour des comptes identifie les failles

Dans son rapport global rendu public mercredi dernier, la Cour des comptes s’est penché, entres autres, sur les dysfonctionnements du logement social. Une mission de contrôle a été réalisée visant l’évaluation de la conception et la mise en place de deux dispositifs.

Le premier dispositif de logement social pour la promotion d’un produit à 140.000 DH TTC a été mis en place sur une période allant de 2008 à 2012. Par la suite, en 2010 un autre dispositif à 250.000DH HT a été instauré à l’horizon 2020, l’accent a été davantage mis sur l’augmentation de la production de logements sociaux selon des caractéristiques techniques spécifiques. Des ajustements et des aménagements ont été par la suite opérés dans différentes lois des finances en termes de spécifications techniques, de conditions d’exonérations fiscales, etc.

Voici les principales observations mises en avant dans le rapport d’évaluation de la Cour des comptes :

  • Logement social : un produit qui n’est défini que par des dispositions fiscales

Prises comme le principal mode d’intervention sur l’offre des pouvoirs publics pour le développement du LS, les incitations fiscales sont ainsi devenues si intégrées au système de production de LS et aux attentes des promoteurs. Il en découle que la production de logement social dans ses différents segments est devenue alors tributaire des avantages fiscaux, ceci se manifeste par la réorientation des promoteurs, sous l’effet des incitations fiscales, vers la production des segments les plus rentables et avantageux en termes de fiscalité, dont spécialement celui de 250.000DH.

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  • Absence d’études préalables à la mise en place des dispositifs.

Lancés respectivement en 2008 et 2010, au profit des ménages ne pouvant pas se loger via le marché immobilier, la mise en place aussi bien du dispositif de logement à faible valeur immobilière (FVI)que pour celui à 250.000 DH n’a fait l’objet d’aucune étude préalable de conception, de définition des besoins et des déficits en logement, tant quantitatif que sa nature, et les spécifications de ce logement.

  • Finalités mal définies et insuffisance de cohérence avec les autres programmes d’habitat

La pertinence de toute approche d’intervention pour répondre à la problématique de logement destiné aux personnes à revenu faible et irrégulier, et la réussite de la politique gouvernementale dans ce domaine dépendent des finalités sur lesquelles repose son action. Toutefois, et à défaut d’une précision par les autorités gouvernementales des finalités assignées aux dispositifs de LS, il est difficile de les situer dans la politique gouvernementale en matière d’habitat et de déterminer la vocation que les acteurs ont cherché à leur donner.

  • Dispositifs qui peinent à coexister

L’analyse des différents dispositifs initiés par l’Etat en matière de logement social permet de soulever leurs ressemblances en termes de nature de produits, de modes d’intervention et de leurs caractéristiques techniques. Des dispositifs qui coexistent sans rapports logiques entre eux en termes de complémentarité ou d’homogénéité.

  • Déphasage entre les objectifs et la nature des besoins, et modulation inadaptée des incitations fiscales

Lancés respectivement en 2008 et 2010, des objectifs de production ont été définis pour les dispositifs de LS à 140.000 DH et 250.000DH. Il s’agit respectivement de produire 130.000 logements sur la période 2008-2012 pour le premier et 300.000 logements à l’horizon 2020 pour le second. Ces objectifs semblent aujourd’hui consensuels et constituent la référence de la politique gouvernementale en matière de LS. Toutefois, Il est délicat de retracer avec précision sur quelle base ces objectifs ont été fixés. Des objectifs qui ne concordent pas avec la nature et le volume des besoins identifiés, tels qu’ils ressortent des résultats de «l’enquête logement 2012». Cette enquête a montré que l’essentiel des besoins en logements se situe au niveau du segment à140.000 DH. Quel que soit le scénario retenu6, la région ou la ville, c’est le besoin pour cette catégorie qui prédomine avec «49% pour le scénario 3 à 64% pour le scénario 1 des besoins globaux au niveau national», alors que le produit à 250.000 ne représentait que 10 à 15% en fonction des scénarii précédents.

  • Absence de mécanismes de régulation de l’offre cause des déséquilibres dans la production de LS

Les dernières données disponibles sur le secteur immobilier en général en termes de déficits et de besoins en logements (enquête logement 2012), de demandes en logement (études sur la demande 2016) et les données issues du recensement national de la population et de l’habitat 2014 permettent de préciser et d’anticiper les situations urbanistiques, la taille et la nature des logements nécessaires pour répondre à la demande potentielle des ménages. Cependant, ces données n’ont pas été exploitées et l’analyse des besoins locaux à travers le croisement des données des études et enquêtes précitées n’a pas été réalisée afin de caractériser la nature et l’emplacement desdits besoins, à même d’aboutir à un meilleur pilotage de la politique publique de logement social au niveau local et régional.

 
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