Interview

Li Changlin :«La nouvelle route de la soie approfondira constamment la coopération entre le Maroc et la Chine»

Au cours des deux derniers siècles, le Royaume du Maroc et la République Populaire de Chine ont dû faire face aux tentatives de destruction coloniale. Dès le lendemain de l’indépendance, le Maroc a reconnu la République Populaire de Chine, sur la base du principe « une seule Chine » et a appuyé son droit légitime à disposer du siège permanent au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU. Les deux pays ont aussi fait le choix du non alignement, un choix qui s’est révélé par la suite tout à fait pertinent. Les relations de coopération entre les deux pays ont d’abord été construites sur un socle humanitaire où les échanges dans les domaines de la santé et de la culture enracinent solidement l’amitié entre les peuples. C’est cet ancrage historique et ce socle humanitaire qui expliquent la forte résilience des relations entre les deux pays dans le contexte actuel de la crise sanitaire mondiale. Aujourd’hui, aussi bien dans un cadre bilatéral que dans un cadre multilatéral, les deux pays s’apprêtent à donner un nouveau souffle à leurs relations et à relever les grands défis de l’après-Covid. Li Changlin, Ambassadeur de la République Populaire de Chine au Maroc, revient sur le partenariat entre les deux pays. Par M. Amine

Challenge : la coopération entre le Royaume du Maroc et la République Populaire de Chine, a connu un grand essor avant la crise sanitaire mondiale due au Covid-19. Cette pandémie, qui dure depuis plus de 2 ans, a relativement perturbé la coopération entre les deux pays.  Quels sont d’après vous, les domaines qui ont le plus souffert de cette perturbation ?

Li Changlin : Depuis l’établissement du partenariat stratégique entre la Chine et le Maroc, annoncé par  S.E.M. le Président chinois XI Jinping et Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en 2016, la coopération sino-marocaine  est entrée dans une phase rapide et a donné des fruits abondants dans divers domaines, parmi lesquels on peut citer la signature du mémorandum d’entente sur La Ceinture et la Route, l’accroissement continu des investissements chinois, l’arrivée massive des touristes chinois, le lancement d’une liaison aérienne directe Casablanca-Beijing, l’inauguration du Centre culturel de Chine à Rabat, etc.

Il est vrai que la Covid-19, survenue avec une grande soudaineté, a eu un impact majeur sur les échanges des personnes et la coopération pragmatique entre la Chine et le Maroc. Le tourisme, est l’un des secteurs ayant le plus souffert. Avant la crise sanitaire, le Maroc a accueilli, en 2018, environ 180.000 touristes chinois et compte même en attirer 500.000 par an. Avec l’éclatement de l’épidémie et les  restrictions imposées sur les voyages internationaux, le nombre de Chinois visitant le Maroc a fortement diminué, la ligne directe a été suspendue, l’année touristique et culturelle sino-marocaine  a été reportée. Malgré tout cela, je pense que ces difficultés sont passagères et nous les vaincrons avec la confiance et dans la solidarité.

Challenge : dans le monde, la Chine est le pays qui a fait preuve de plus de résilience face à la crise sanitaire mondiale. Elle a aussi fait preuve de solidarité, en particulier avec l’Afrique, dont le Royaume du Maroc. Quelles ont été les principales actions de coopération solidaire entreprises dans ce contexte sanitaire exceptionnel ?

Face à la Covid-19, la Chine et l’Afrique se sont soutenues mutuellement et ont engagé un combat solidaire et vigoureux contre l’épidémie. En juin 2020, le Sommet extraordinaire Chine-Afrique sur la solidarité contre la Covid-19 s’est tenu avec succès. La Chine, est le premier pays au monde à avoir organisé avec l’Afrique un Sommet consacré à la réponse sanitaire. La Chine a fourni à 53 pays africains et à l’UA, 120 lots d’aide d’urgence en matériel médical, dont kits de test, combinaisons de protection, masques, visières, respirateurs. Elle a partagé activement ses expériences avec les pays africains, envoyé à 17 d’entre eux des groupes d’experts médicaux ou des équipes médicales, en mission de courte durée. 

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Dès la mise sur le marché de ses vaccins, la Chine a commencé à fournir des dons de vaccins à l’Afrique et appelé à faire des vaccins un bien public mondial. Jusqu’en janvier dernier, elle a fourni à 45 pays africains et à la Commission de l’UA plus de 200 millions de doses de vaccins et a développé avec les pays africains, des projets de production conjointe. Lors de la 8e Conférence ministérielle du FOCAC tenue fin novembre 2021, le Président XI Jinping a annoncé que la Chine fournirait à l’Afrique un milliard de doses de vaccins supplémentaires, dont 600 millions sous forme de don et 400 millions sous forme de production conjointe.  Il s’agit du plus important projet d’assistance en vaccins destinés à l’Afrique. 

La coopération sino-marocaine dans la lutte contre la Covid-19 en constitue un bon exemple. La Chine a commencé, dès le début de l’année dernière, à livrer des vaccins au Maroc malgré les difficultés dans l’approvisionnement pour sa propre population, et a remis avant l’échéance la totalité des vaccins commandés par le Maroc. À l’heure actuelle, nous travaillons sur le projet de mise en seringue des vaccins Sinopharm, un projet qui contribuera au renforcement de la souveraineté sanitaire marocaine.

Challenge : Quels sont les domaines de coopération actuellement les mieux avancés entre le Maroc et la Chine ?  Nos deux pays se préparent à l’après-Covid. Quels sont les axes prioritaires de relance de la coopération bilatérale ?

Je dois vous dire que la coopération sino-marocaine, perturbée par la Covid-19, a fait preuve d’une forte résilience, et a fait de nouvelles percées dans plusieurs domaines. Dans le domaine du commerce, selon les statistiques des douanes chinoises, les échanges commerciaux entre la Chine et le Maroc, en 2021, ont connu une croissance de 36,6%  pour se chiffrer à 6,5 milliards de dollars, battant un nouveau record historique. Ce chiffre confirme une fois encore, la place de la Chine en tant que principal partenaire commercial du Maroc.

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Dans le domaine de l’investissement, après ses deux premiers projets d’une valeur totale de 350 millions d’euros, le Groupe Citic Dicastal vient de lancer, le 16 février, la construction de sa 3ème usine avec un investissement de 1,8 milliard de dirhams et la création de 760 nouveaux emplois. À ma connaissance, plusieurs entrepreneurs chinois sont également en train de chercher des opportunités d’investissement au Maroc. D’ailleurs, la coopération sino-marocaine dans les domaines de l’infrastructure, de l’énergie et de la pêche, progresse  régulièrement.

En janvier dernier, la Chine et le Maroc ont signé la convention relative au Plan de la mise en œuvre conjointe de la Ceinture et de la Route. Le Maroc, est le premier pays d’Afrique du Nord à signer cette convention avec la Chine. Cet événement approfondira constamment la coopération bilatérale dans les domaines des infrastructures, de l’économie, du commerce et de l’investissement et favorisera la synergie des stratégies de développement des deux pays.

 
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