Diplomatie

Maroc – France : Quel dégel ?

Emmanuel Macron a annoncé officiellement, la fin de l’opération Barkhane et le retrait des soldats français du Sahel. C’est un échec cuisant parce que, depuis 8 ans, la France pensait ce dispositif vital pour la lutte antiterroriste. Cinq pays africains étaient concernés. Mais dès que les putschistes maliens se sont retirés, suivis par leurs homologues burkinabés, la fin de l’opération était scellée. Pourtant, jamais l’activité terroriste n’a été aussi meurtrière dans cette région. Cet aveu d’échec français, sur une question stratégique parce qu’elle menace l’Europe, est d’autant plus difficile à avaler que ce sont les mercenaires russes de Wagner qui prennent place.  

Ce n’est pas la seule déconvenue de Paris dans le continent africain. La Chine la supplante dans les investissements en infrastructures, ses entreprises perdent pied dans des pays francophones qu’elles pensaient chasse-gardée. L’Afrique a changé, elle ne veut plus rester le réservoir à matières premières pour l’ancien colonisateur, recherche un vrai partenariat de développement. Les discours n’ont rien changé à l’approche de la France sur le terrain. Paris paie cette erreur cash ! C’est dans ce contexte qu’il faut situer le froid dans les relations entre le Maroc et la France. Le Maroc est très clair dans ses choix. Il est ouvert à tous les partenariats d’égal à égal qui respectent sa souveraineté, y compris quand il développe des partenariats avec d’autres puissances, pas nécessairement amies de Paris.

Lire aussi | Mohamed Tazi : « Je suis persuadé que dans 10 ans, le nombre d’étudiants qui vont en France sera en baisse constante! »

La vision marocaine du co-développement est tout aussi claire, depuis qu’elle a été exposée par le Roi à Abidjan en 2008. Le Maroc y prend pleinement sa part et n’a besoin de l’autorisation de personne pour le faire, y compris quand cela concerne le secteur financier de l’hexagone. Une fois ce contexte établi, nul ne peut nier l’importance du partenariat entre les deux pays. Mais il faut rénover ce partenariat  en tenant compte de tous les bouleversements cités plus haut. Evidemment qu’il y aura nomination de nouveaux ambassadeurs. Mais ce dégel ne peut relever de symbole. Le Maroc ne pose pas de préalable mémoriel réglé parfois de manière puérile, comme l’atteste, la tragi-comédie de l’histoire des crânes. Les revendications du Maroc concernent les principes qui doivent régir toute coopération à l’avenir.

Lire aussi | Driss Herrati : « Dans le secteur du transport et de la logistique, le besoin est énorme en personnel qualifié »

La France a besoin de reprendre pied en Afrique, non par philanthropie mais parce que l’espoir de croissance de ce continent est sans nul entre pareil et que les nouveaux équilibres en gestation mettront ce continent dans une place centrale pour l’Europe et ses économies. Le Maroc n’est pas uniquement la porte d’entrée géographique de l’Afrique, c’est déjà un hub incontesté. Une coopération d’égal à égal serait profitable à tous. Mais il faut respecter la souveraineté et les intérêts marocains. Le dégel coulera de source ensuite, pas avant.

 
Article précédent

Mohamed Tazi : "Je suis persuadé que dans 10 ans, le nombre d’étudiants qui vont en France sera en baisse constante!"

Article suivant

Challenge : N°858 • Du 18 au 24 novembre 2022