Dossier

Parafiscalité : un lieu non visité par les Assises de la fiscalité

Pire que la fiscalité locale, c’est la zone fiscale la plus opaque par excellence. Elle mérite d’être bien connue par les citoyens. Malgré les difficultés d’accès à l’information, Challenge a tenté de faire une incursion dans ce terrain inconnu, partant du principe le plus élémentaire en démocratie, le droit du citoyen de savoir comment l’argent public est collecté et est dépensé.  

La parafiscalité fait partie de la «préhistoire fiscale». C’est aussi une «fiscalité en miettes». Le cadre juridique est hybride, malgré la définition adoptée dans la dernière Loi organique des finances (LOF), en 2015.

En effet, d’après ce texte fondamental, considéré comme étant une «mini-constitution» dans le domaine des finances, «les taxes parafiscales, perçues dans un intérêt économique ou social au profit d’une personne morale (PM) de droit public autre que l’Etat et les collectivités territoriales (CT), ou d’une PM de droit privé chargée de missions de service public, sont établies par décret, pris sur proposition du ministre intéressé et du ministre chargé des finances » (art. 67 de la LOF).

Ainsi, à la différence de l’impôt dont la création, la modification ou la suppression relèvent exclusivement de la loi (principe de légalité/consentement/art. 39 de la Constitution de 2011), les taxes parafiscales peuvent être créées, modifiées ou supprimées par voie réglementaire. Or certaines taxes parafiscales ont été instituées par voie législative (Taxe spéciale sur le ciment, Taxe spéciale sur le fer et le béton, Taxe spéciale sur le sable…), certes avant la LOF de 2015. D’autre taxes sont affectées à la fois à des établissements et des entreprises publics (EEP) et d’autres à des comptes d’affectation spéciale (CAS) (Taxe aérienne pour la solidarité et la promotion touristique, quote-part de la Taxe professionnelle versée aux Chambres professionnelles, surtaxe d’abattage, Taxe sur la promotion du paysage audiovisuel national…).

Auparavant, même les taxes parafiscales étaient soumises à l’autorisation parlementaire (Loi organique des finances des années 1962 et 1972). Néanmoins, les taxes parafiscales sont à classer parmi les «prélèvements obligatoires», concept beaucoup plus large englobant aussi bien les impôts que les cotisations sociales.

Les taxes parafiscales dérogent cependant au trois principes budgétaires fondamentaux de l’impôt que sont l’universalité, l’équilibre et la sincérité.

Au niveau du ministère de l’Economie et des Finances (MEF), c’est normalement la Direction du Budget qui est censée consolider toute l’information concernant les taxes parafiscales. Pour l’instant, ce n’est guère le cas. Il existe donc un état de dispersion dans la gestion de ces taxes, avec une multiplicité d’intervenants. Ce qui est source de complexité et surtout d’opacité. L’information contenue dans certains documents, tels que les rapports des établissements et des entreprises publics, est sommaire, partielle et disséminée.

Les taxes parafiscales conformes à la définition de la LOF de 2015 sont au nombre de 22 bénéficiant aux EEP, et 8 profitant à des PM de droit privé chargées de missions de service public.

A ces taxes, il y a lieu d’ajouter 4 prélèvements affectés à des EEP institués par des lois de finances (LF) et par la loi sur la fiscalité locale. Il s’agit de la Taxe aérienne pour la solidarité et la promotion touristique, créée par la LF de l’année 2014. Cette taxe est de 100 dirhams par billet de la « classe économique » et de 400 dirhams pour la « première classe ou business classe». Les recettes collectées sont réparties à égalité entre le CAS intitulé « Fonds d’appui à la cohésion sociale » et l’Office national du tourisme (ONMT) ; la Taxe sur la promotion du paysage audiovisuel national (TPPAN), créée par la LF 1996/97. A la charge des abonnés au réseau d’électricité pour usage domestique ou professionnel, le produit de cette taxe est affecté à hauteur de 60% à la SNRT et de 40% au CAS intitulé « Fonds pour la promotion du paysage audiovisuel, des annonces et de l’édition publique »; 10% de la Taxe professionnelle sont affectés aux Chambres professionnelles dont le mode de gouvernance est actuellement critiqué au niveau national par les associations et les syndicats des commerçants; la surtaxe d’abattage, créée en 1989, affectée à raison de 20% à l’Entraide Nationale.

Lire la suite dans votre magazine Challenge disponible dans tous les points de presse.

 
Article précédent

La DGI met fin aux chèques de garantie

Article suivant

Afem : bataille à couteaux tirés