Santé

Plus de deux futurs médecins sur trois prévoient de quitter le Maroc

Alors que le gouvernement multiplie les mesures pour former plus de médecins et même attirer les médecins étrangers vers le Maroc pour faire face à la pénurie criarde de praticiens, plus des deux tiers des étudiants en dernière année de médecine dans les facultés du Royaume, ont l’intention de faire carrière à l’étranger, selon une étude réalisée par cinq chercheurs de la Faculté de médecine et de pharmacie relevant de l’Université Hassan II de Casablanca. Leur destination de prédilection est l’Allemagne. Les détails.

Le Maroc parviendra-t-il à atteindre son objectif de mettre chaque année sur le marché de la santé 3300 nouveaux médecins ? A en croire une étude réalisée par cinq chercheurs (AK Sylla, S El Ouadih, K Barknan, S Hassoune, S Nani) de la Faculté de médecine et de pharmacie relevant de l’Université Hassan II de Casablanca, la réponse est non. En effet, d’après ce rapport intitulé « Migration intention of final year medical students », plus des deux tiers d’étudiants en dernière année de médecine dans les facultés au Maroc (71,1%) envisagent de quitter le pays, dont 61,6% sont des femmes.

Les raisons qui poussent ces étudiants en médecine à quitter leur pays sont multiples. «Parmi les raisons évoquées par les étudiants ayant répondu favorablement à la migration, on trouve l’ambition de faire carrière à l’étranger, en raison de meilleures opportunités de développement (97,6%), de meilleures conditions de travail (99%) et une meilleure qualité de vie dans le pays d’accueil (97,2%).

En outre, 95,2 % de ces étudiants ont exprimé leur insatisfaction quant à la qualité de formation actuelle et au salaire (97%). Selon eux, les médias ont également leur part de responsabilité dans leur intention de quitter leur pays. En effet, 83,6% préfèrent émigrer à cause de ce qu’ils perçoivent comme du mépris et de la sous-estimation de la valeur du médecin dans les médias.
A noter, que l’étude réalisée en 2021 et publiée cette semaine dans la revue scientifique «European Journal of Public Health » (Oxford Academys), s’est basée sur un échantillon de 251 étudiants de dernière année de médecine à la Faculté de Casablanca.

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S’agissant des destinations, l’Allemagne est le pays le plus cité par les futurs médecins, 34% d’entre eux rêvent d’y évoluer alors que les médecins marocains optaient principalement pour la France durant la dernière décennie.

En 2018, les facultés de médecine et de pharmacie du pays ont formé 2 282 médecins , contre seulement 1715 en 2007, soit une progression de 25%. En dépit de cette hausse significative, le retard à rattraper est de l’ordre de 1018 médecins. Ce déficit qui se creuse à cause de l’émigration, principalement en France, du départ à la retraite et de la retraite anticipée, risque de s’accentuer davantage. Plus de 8 000 médecins marocains nés dans le Royaume exercent actuellement dans l’Hexagone. Selon une étude du Conseil national de l’Ordre des médecins en France, les praticiens nés au Maroc représentent la deuxième communauté de médecins nés à l’étranger.

Au Maroc, le déficit en personnel de santé est estimé à un peu plus de 32 000 médecins et 65 000 infirmiers. Un déficit qui s’est le plus fait sentir avec la crise sanitaire due à la Covid-19. En plus, le Royaume met actuellement en place sa stratégie de généralisation de la couverture sociale universelle qui consacre une place de choix à l’amélioration de son système de santé, à l’horizon 2035. La réussite de ce projet passe par l’atteinte du ratio médecin par habitant dont la moyenne mondiale est de 13 médecins pour 10 000 habitants, et 7 pour 10 000 au Maroc.

Conscient de la situation, le gouvernement multiplie les mesures pour former plus de médecins et même pour ouvrir la porte aux médecins étrangers pour exercer la profession au Maroc. Le 17 février dernier, l’Exécutif a décidé de modifier la période de formation en médecine et d’augmenter le nombre de places pédagogiques ouvertes aux étudiants dans les Facultés de médecine, de pharmacie et de médecine dentaire. Ainsi, la durée de formation des médecins au Maroc passera de 7 à 6 ans. C’est l’information contenue dans une note du ministère de l’Enseignement supérieur signée il y a dix jours, à l’endroit des présidents des universités publiques. Cette mesure est présentée comme une solution pour gérer le déficit de professionnels dans le pays. « Le rythme de formation des cadres médicaux tel qu’il est actuellement, ne permettra pas à notre pays d’atteindre ses objectifs », informe le document.

 
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