Tribune et Débats

Quel nouveau paradigme pour la migration ? Le message du Roi du Maroc au Sommet de l’UA [Lahcen Haddad]

Sa Majesté le Roi Mohammed VI, leader africain sur la question de la migration, ne prône jamais les sentiers battus, les méthodes désuètes, les approches aux résultats mitigés. Au 35ème Sommet ordinaire de l’Union africaine qui se tient à Addis-Abeba, par la voix du ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération Africaine et des Marocains Résidant à l’Etranger, M. Nasser Bourita, Sa Majesté a présenté un rapport sur l’état d’avancement de la mise en place de l’observatoire Africain des Migrations au Maroc. 

C’était l’occasion de faire l’état des lieux sur la migration, considérée par le Souverain chérifien, comme une source d’opportunités pour les africains, une aubaine pour les économies africaines en quête d’intégration et de complémentarité. 

Sa Majesté souligne l’impact négatif de la pandémie sur les migrants et leur mode de vie, surtout ceux et celles en situation illégale. Vivant d’activité informelle, les migrants ont vu leur situation se vulnérabiliser davantage avec l’arrêt de l’activité économique due aux fermetures successives des pays d’accueil, que ce soit en Afrique ou ailleurs.  Des pays comme le Maroc, ont adapté leur programme d’aide socioéconomique destiné aux populations impactées par le confinement pour en faire bénéficier migrants et réfugiés, mais le cas des migrants en situation illégale demeure précaire et souvent inquiétant en Europe, en Afrique, au Moyen Orient et ailleurs. 

Néanmoins, la pandémie a révélé, souligne le Souverain marocain, le visage humain, voire, bénéfique et solidaire de la migration. Les transferts des migrants africains ont grimpé au pic de la crise : bien que la situation économique dans les pays d’accueil se caractérisait par les licenciements, le chômage et l’amenuisement des opportunités, les migrants ont démontré leur vrai sens de solidarité en faisant plus de sacrifices pour leurs familles et leurs communautés. Comme dit le dicton arabe : «c’est en temps de crise que les vrais liens d’amitié ou de parenté se testent. »

Le Roi du Maroc réitère ainsi sa position exprimée en 2017, de la nécessité de développer une Vision africaine de la migration. Les migrants sont porteurs de richesses, de compétences, de savoir-faire, de cultures et sources de diversité et de métissage culturel et autre. Les stigmatisations et les stéréotypes, sources de racisme et de discrimination doivent être combattus pour être supplantés par une vision de la migration comme une condition sine qua non de l’existence humaine.

Lire aussi | Mehdi Hijaouy : «Le Renseignement est le bras armé de la Souveraineté Sanitaire»

Mais la migration est surtout interafricaine. Les pays africains accueillent la plupart des migrants africains. La migration africaine ne représente que 14% de la population totale des migrants internationaux, et la plupart des migrants se déplacent à l’intérieur du continent africain et au sein de leur région d’appartenance. Elle est source de mélange de cultures et de skills partout en Afrique. C’est ce qui rend des villes comme Bamako, Dakar, Abidjan, Libreville, Johannesburg, Cape Town, Nairobi, Kinshasa, et récemment Casablanca et Tanger multi-ethniques, multiculturelles, et cosmopolitaines, vibrant au rythme de la pluralité des langues, des sons, des musiques et des cuisines africaines. 

Le deuxième message du rapport de Sa Majesté Le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, est que l’opérationnalisation de l’Observatoire Africain revêt une triple dimension: pour le Maroc, l’Afrique et pour la coopération entre le Maroc et l’Afrique, a indiqué M. Bourita. En effet, a dit le ministre, l’Observatoire Africain des Migrations est né de la Vision de Sa Majesté le Roi pour la migration en Afrique. Cette proposition a fait son chemin institutionnel au sein de l’Union Africaine et a été portée par les efforts soutenus du Royaume pour créer les conditions nécessaires à son opérationnalisation. Ce processus a culminé avec l’inauguration officielle de l’Observatoire Africain des Migrations à Rabat, le 18 décembre 2020, coïncidant symboliquement avec la Journée internationale des migrants. Cette inauguration est l’une des nombreuses matérialisations concrètes du Mandat de Sa Majesté le Roi, que Dieu L’assiste, a souligné le ministre.

Quelques années seulement après son retour à l’Union Africaine, le Maroc abrite déjà une institution de l’Union Africaine. Car, comme l’avait dit Sa Majesté le Roi, «Dès que le Royaume siègera de manière effective, et qu’il pourra apporter sa contribution à l’agenda des activités, son retour concourra à fédérer et à aller de l’avant», s’est réjoui le ministre. C’est ce à quoi s’attelle l’Observatoire, en tant qu’institution de l’Union Africaine articulée autour d’une triple fonction de compréhension, d’anticipation et d’action. Il sert de moyen de connaissance du phénomène migratoire, d’aide à la conception de politiques migratoires informées, et d’instrument de coordination et de mise en réseau, a noté M. Bourita.

Enfin, le troisième message du rapport de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, est que l’Afrique est le précurseur de la nouvelle gouvernance migratoire voulue par le Pacte de Marrakech, a dit le ministre. Alors même que la migration africaine est stigmatisée et associée à des conceptions binaires, le rapport de Sa Majesté le Roi Mohammed VI démontre que l’Afrique s’est positionnée comme un acteur central de la mise en œuvre du Pacte de Marrakech, a relevé le ministre.

Lire aussi | Marché des capitaux. Comment Nezha Hayat veut en faire un instrument pour la relance

D’une part, l’Observatoire est une déclinaison directe du Pacte, et en particulier de son objectif premier, qui est de collecter et d’utiliser des données précises qui serviront à l’élaboration de politiques fondées sur la connaissance des faits. D’autre part, comme l’avait proposé Sa Majesté le Roi lors du 33ème Sommet de l’Union Africaine, le Maroc a organisé, conjointement avec les organes impliqués, la Réunion intergouvernementale pour l’Examen Régional Africain du Pacte de Marrakech, a ajouté M. Bourita.

En somme, et comme l’a conclu Sa Majesté Le Roi, que Dieu L’assiste, nous devons faire en sorte que «les migrants ne soient pas les oubliés du développement et des pandémies mais au contraire, le centre de gravité de politiques migratoires responsables, solidaires et conformes aux 23 objectifs du Pacte de Marrakech», a conclu le ministre qui représente SM le Roi Mohammed VI à ce 35ème Sommet ordinaire de l’Union africaine.

 
Article précédent

Chakib Alj : « Il est nécessaire de donner un nouveau souffle à l'accord commercial et d’investissement Maroc-UE »

Article suivant

Crédit bancaire. Les entreprises non financières privées ont capté plus de 400 milliards de DH en 2021