Economie

Un premier semestre délicat pour les cimentiers

 Alors que les capacités de production ont doublé en dix ans, l’heure est désormais à la baisse des ventes du secteur du ciment. Les sociétés cotées viennent de publier des résultats semestriels en net repli pour les trois premiers mois de 2013. 

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ême si les cimentiers cotés à Casablanca ne sont pas tenus de publier leurs réalisations semestrielles, le hasard a voulu que leurs maisons mères respectives soient cotées dans des places européennes où, tous les trois mois la diffusion du résultat est obligatoire. Et cette année, le marché attendait particulièrement les chiffres des trois premiers mois de l’année. Il se trouve que Ciment du Maroc et Lafarge ont été fortement touchés par une baisse de leurs ventes. Les réalisations de Holcim n’ont pas encore été rendues publiques. 

Concernant le leader Lafarge,  les chiffres diffusés font état d’une baisse de 17,9% durant les trois premiers mois de l’année 2013, comparativement à la même période de 2012. Cette régression s’explique notamment par un recul des ventes de 20,1% en volumes et un rattrapage sur les prix qui a permis une amélioration de 2,2% de ces derniers. 

Du côté de Cimar également, les ventes pointent du nez. Les revenus de la filiale d’Italcimenti ont baissé de  12,4% en s’établissant à quelque 80,1 millions d’euros d’après la communication financière de la maison-mère, soit près de 888,5 dirhams. Mais là également, les marges subissent des reculs moins prononcés. En effet, le résultat brut d’exploitation n’a reculé que de 7,6% à 420 millions de dirhams et le résultat d’exploitation diminue de 10% à près de 320 millions de dirhams. 

Il faut dire que ces chiffres n’ont pas tout à fait été une surprise, dans la mesure où les données fournies par l’Association des producteurs de ciments prédisaient une très forte baisse des réalisations. Il ne restait cependant qu’à déterminer quels sont les acteurs qui étaient les plus touchés. Et visiblement, le leader ne s’en sort pas très bien. Le secteur a de nouveau diffusé ses réalisations pour les quatre premiers mois et le redressement attendu n’est toujours pas à l’ordre du jour, même si le rythme de la baisse a connu un certain ralentissement. «Au terme des quatres premiers mois de 2013, les ventes de ciments affichent une baisse de 16,49% à 4,99 millions de tonnes», rappellent les analystes de BMCE Capital. Et pour le mois d’avril, les écoulements de ciments ont baissé de 2,64% par rapport à la même période en 2012 pour s’établir à 1,38 million de tonnes. 

Cette diminution s’explique par des facteurs conjoncturels, mais il y a aussi une tendance de fond qui se dessine sur les derniers mois, voire depuis 2011. En effet, s’il est vrai que la pluviométrie plus forte qu’en 2012 a occasionné des arrêts de chantiers, il n’en demeure pas moins que les retards des mises en chantiers ont aussi impacté l’activité du BTP et de l’immobilier, d’où la baisse des ventes de ciments. Ce n’est là que l’explication conjoncturelle. Mais on observait déjà que la consommation de ciment était en train de s’essouffler depuis 2011. Avec un ralentissement suivi d’une très légère baisse en 2012. Ce n’est donc pas étonnant que ce début de l’année 2013 soit marqué par un repli. Et de toute évidence, les chiffres du mois d’avril montrent parfaitement que la tendance baissière est bien à l’ordre du jour même si l’on exclut l’effet de la pluie. 

Il faut noter en plus de cette baisse, que le secteur a vu sa capacité de production augmenter de manière considérable durant les dernières années. Elle a doublé durant la dernière décennie, passant de près de 10 millions de tonnes à quelque 20 millions de tonnes. Il y a eu d’une part, les investissements des quatre opérateurs historiques que sont Lafarge, Ciment du Maroc, Holcim, Asment Temara, auxquels s’ajoutent les deux nouvelles cimenteries des Ciments de l’Atlas, le nouvel entrant. Ce dernier est décidé à gagner rapidement des parts de marché et cela ne peut se faire sans tirer les prix vers le bas, ce qui risque de réduire sensiblement la capacité bénéficiaire des industriels. On peut d’ailleurs constater qu’à travers les résultats publiés en 2012, il y a une nette régression de 25% du bénéfice cumulé des trois sociétés cotées en 2012 par rapport à 2011. Cette forte baisse ne s’explique pas par un recul des ventes et l’impact de la hausse de la fiscalité n’est pas  très déterminant. Donc, il ne reste que l’explication d’une guerre des prix qui, si elle se poursuivait, pourrait compromettre le retour sur investissement des nouvelles capacités. Il faut notamment rappeler qu’il a fallu investir 15 milliards de dirhams entre 2000 et 2010 pour arriver aux 20,6 millions de tonnes de capacité installées. 

Heureusement qu’aujourd’hui, on note une certaine remontée des prix. Ce qui devrait permettre aux opérateurs de limiter l’effondrement de leur marge.  

 
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