Portrait

Une volonté de manager dans un gant de geek

C’est un cérébral-né, mais ce “nerd” assumé cache un “leader” qui s’est formé dès ses débuts à la direction générale de l’entreprise familiale au “monde des affaires”. Entre sacerdoce sociétal et militant de l’entreprenariat des jeunes, Omar Naanaa est un idéaliste qui compte faire avancer la cause de son association à Casablanca.  Par  Noréddine El Abbassi

Si Omar Naanaa était un archétype, ce serait sans doute celui du “über geek”. Mince et élancé, un sourire doux et une voix qu’il n’élève point. Des caractéristiques de sa personnalité d’informaticien réservé, habitué du monde des chiffres. Une sorte d’icône de l’ingénieur à l’américaine, qu’on imagine plus dans une start-up de la Silicon Valley que dans le monde des affaires casablancais. “Je suis assez réservé de nature, mais s’il est une chose que le Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), m’a apporté, c’est m’initier à prendre la parole en public et m’exprimer face à un auditoire”, explique-t-il, sans faux semblants. Sans jamais rien dissimuler,  jusqu’à affirmer “être ce qu’il est, et faire ce qu’il a à faire”, selon la célèbre formule du philosophe Allemand Friedrich Wilhelm Von Nietzsche,  “deviens qui tu es”.
Il est né en 1979, à Casablanca. Il est le quatrième d’une fratrie dont il est le benjamin et le seul garçon de la famille. Ses parents, qui ont d’abord travaillé pour le pétrolier Shell, se sont mis à leur compte depuis. Dans la famille, on a la fibre des affaires, dont il héritera lui même. Avec trois soeurs, Omar grandit dans un foyer uni, entouré de l’affection de quatre “mamans” et à sa disposition, une bibliothèque de Fantasy et de science fiction, bien fournie. “A l’image de mon père, je suis réservé et à l’écoute des autres. Au CJD, on m’a défini comme rationnel et logique, proche de ma famille et soucieux de mon bien être. Je dois dire que dans le fond, le CJD est un peu pour moi, une deuxième famille”, explique-t-il dans de longs moments d’introspection, parlant à toute vitesse, comme si les idées s’enchaînaient tout naturellement, les unes après les autres. Tout en lui respire la spontanéité d’un “nerd”, les compétences techniques en plus.
Ses trois soeurs présentent pour lui, l’avantage de mettre à sa disposition les ressources de la famille. “J’ai eu mon premier ordinateur à 7 ans. Mais à cet âge, c’était plutôt mes soeurs qui l’accaparaient. J’ai néanmoins commencé à programmer dès 11 ans,” explique-t-il, assumant son identité “technophile”. Scolarisé à la “Mission française”, Omar est bon élève, qui passera de classe en classe, sans difficulté. «Je n’avais alors que quatre amis, mais qui le sont restés jusqu’à ce jour».

Programmeur “depuis le berceau”

Nous fréquentions les fans “amateurs de Hard Rock”, et qui restaient isolés entre eux. Autrement, j’étais déjà réservé,” se remémore-t-il. On imagine volontiers le garçon sage, peut être trop sage, et qui, dans un sens, l’est resté. Sa culture musicale a débuté dès son plus jeune âge, ses parents l’ayant inscrit au Conservatoire pour l’initier au piano. Une sorte de tradition familiale, mais qu’il sera le seul, avec une soeur à avoir poursuivi.
“J’ai obtenu mon Bac en 1997, en option internationale (OIB). Mais pour continuer mes études en France en classes prépa, la condition était l’internat, et dans un « bon» lycée”, expose-t-il doctement, les yeux rêveurs. On l’imagine volontiers en jeune étudiant studieux, penché sur un clavier d’ordinateur. Cette image lui collera à la peau, et même en école d’ingénieur, qu’il décroche trois années plus tard, il restera un passionné d’informatique. “Comme j’aimais programmer, je passais mes étés à dessiner en 3D ou à préparer le programme de l’année suivante. En vacances, je passais facilement jusqu’à 8h devant un écran d’ordinateur”, développe-t-il, comme une image vivante d’un type de jeune de l’époque, aujourd’hui bien plus “cool”. Les nouveaux héros sont les personnages de la série “the Big Bang Theory”, aujourd’hui où l’intellect et la capacité à apprendre sont plus valorisés que par le passé.
Lorsque Omar obtient son diplôme en 2003, il arrive sur le marché du travail en pleine crise de la “bulle informatique”. Il est alors difficile de trouver un emploi pour lui, fraîchement émoulu de l’école comme “ingénieur généraliste”, avec cependant un accent sur la monétique. Discipline en plein essor au début des années 2000.

Des débuts difficiles, un retour triomphant

Omar est inscrit en japonais, a été responsable de la programmation des machines dans un club de robotique, et a tout du parfait “geek”. Et malgré cela, il se heurte aux résistances du marché de travail. Mais le “plafond de verre” ne décourage pas le “battant” qu’il est. Il finit par trouver à s’employer dans une SSII, GFI Consulting. Il décroche une première mission auprès de la Caisse d’Epargne française, en tant que responsable de qualité des distributeurs de billets de banque. L’année suivante, en 2005, Omar est affecté à BNP Paribas, chargé de mettre en place un observatoire de la qualité de la maintenance. C’est cette expérience qui lui dévoilera les dessous d’une multinationale, et le fonctionnement d’un grand groupe. L’année suivante, on le rappelle à la Caisse d’Epargne, où il mettra en place les guichets automatiques bancaires du groupe dans les DOM TOM.
Le virage s’opère en 2007, lorsque sa soeur, alors Directrice Générale de l’entreprise familiale, Siatra, est appelée à Abu Dhabi. “Nous n’avions de choix que de vendre l’entreprise, ou que j’en reprenne la gestion. Je suis donc rentré et j’ai débuté mon apprentissage du métier de chef d’entreprise”, expose-t-il, sans état d’âme. Parallèlement et dès le départ, il s’investit dans le CJD de Casablanca. La mission de cette association est diverse et variée, qui englobe un travail d’enquête pour sonder le monde des affaires,  le partage des connaissances et des expériences, mais surtout la découverte de “jeunes” dirigeants. “C’était une mission sociétale. Je voulais connaître les jeunes entrepreneurs, et savoir comment “sont les marocains”. Ma première “claque” a été la rencontre avec les jeunes de l’ENCG. Depuis, je suis devenu “Mr Business Games”. J’allais dans les écoles mettre en place des jeux, pour initier les lycéens au monde de l’entreprenariat”, dévoile-t-il. Il participe à la commission “Expérimentation de la Gouvernance en Entreprise” en 2008, puis entre 2008 et 2010, à la commission “Education”. Depuis le 1er juillet, Omar Naanaa a été élu président du CJD de Casablanca, signe que sa passion l’a mené à devenir un leader, geek ou pas! Un jour les geek domineront le monde, mais pas demain.

 
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