Collectivités territoriales

Face au marasme économique, les Collectivités Territoriales appelées à se serrer la ceinture

La crise sanitaire, qui a touché toutes les couches de la société, n’a pas épargné les collectivités territoriales. Celles-ci devront faire face à un amenuisement de leurs ressources. Et face aux demandes d’exonération de taxes des sociétés d’affichage, des restaurants et cafés touchés par les nombreuses restrictions, la cure d’amincissement risque d’être sévère. Le pragmatisme des autorités devant les difficultés des acteurs économiques locaux et la rationalisation de leurs dépenses est désormais plus qu’une nécessité.

Les cafés, les restaurants, les afficheurs urbains n’ont pas attendu assez longtemps avant de tirer la sonnette d’alarme. Entre confinement général, déconfinement graduel, mesures restrictives sur les activités, reconfinement partiel et de certaines villes, ces acteurs ont vu leurs chiffres fondre comme neige au soleil. Et rien ne semble permettre d’envisager le moindre rattrapage sur ces mois perdus. Les afficheurs par exemple, font face à des annulations de contrat, à des arrêts de facturation par des clients qui estiment (à raison !) qu’avec le confinement, leurs panneaux n’ont été visibles pour personne. Les cafés et restaurants, sommés de pratiquer la distanciation sociale dans leurs surfaces et de n’accueillir que 50% de leur capacité, ont connu une fréquentation limitée. Pour anticiper les difficultés, l’ensemble de ces acteurs (afficheurs, cafés, restaurants, bars, …) qui exploitent le domaine public ont, à travers leurs représentations associatives respectives, adressé des courriers aux autorités locales pour demander une exonération de taxes locales entre mi-mars et fin décembre 2020. Un courrier jusqu’ici resté sans réponse.

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Appel des contribuables au pragmatisme de l’État

Pour ces acteurs, la redevance d’occupation du domaine public devrait tout simplement être abandonnée, au vu de l’arrêt d’activité qui a caractérisé leurs activités depuis mi-mars. Ceux-ci estiment que les communes devront faire preuve de compréhension devant cette situation inédite et donner l’opportunité à ce type d’entreprises de se refaire une santé, sans les assommer de taxes sur des chiffres qu’ils n’ont pas réalisés. Les demandes, introduites depuis un moment, restent encore lettres mortes. Et les acteurs du domaine public ne savent pas encore à quelle sauce ils seront mangés. Le manque de visibilité dans le business, couplé à celui entretenu par les autorités communales, n’est pas de nature à donner des perspectives reluisantes à leurs activités. Les Collectivités Territoriales et les élus locaux sont-ils prêts à écouter ces appels à la “raison“ ? Rien n’est moins sûr, tant la baisse des recettes impacte tous les compartiments de la société. Pour l’instant, le Ministère de l’Intérieur évalue ses forces et compte ses pièces et billets.

Tel est l’objet de la lettre adressée par le ministre de l’Intérieur aux agents d’autorités et aux représentants élus des collectivités territoriales. Pour comprendre la démarche, il faut se référer à la Loi de Finances Rectificative 2020 adoptée récemment par les élus de la Nation. Celle-ci a prévu une baisse importante des ressources dont bénéficient les collectivités territoriales auprès de l’État central, au titre de transferts entre ce dernier et ses démembrements. Le message principal de ces coupes attendues dans les budgets semble être que « le moment est venu pour les économies », si ce n’est que le manque d’argent et la nécessité de faire des sorties sur le marché international pour s’endetter, contraignent désormais à une plus grande rationalisation de la dépense publique.

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Le temps d’une cure d’amincissement général ?

Par type de ressource, la Loi de Finances Rectificatives 2020 a prévu une baisse dans les produits de la TVA que reçoivent les collectivités locales. Ainsi, le Compte d’Affectation Spéciale (CAS) qui porte la « Part des Collectivités Territoriales dans le produit de la TVA » est prévu pour connaître une chute de son montant de 22,71%.

Les régions ne sont pas en reste de ce mouvement général de baisse des ressources. Celles-ci tirent leurs principales sources de financement de l’Impôt sur les Sociétés, l’Impôt sur le Revenu et la Taxe sur les Assurances. À ce niveau également, ces recettes redistribuées aux Collectivités Locales devraient baisser de 10,31%. Aussi, le « Fonds de Solidarité Inter-régionale », autre Compte d’Affectation Spéciale, subira une révision à la baisse de sa dotation de 10,32%. En temps normal, ce CAS apporte annuellement et en moyenne 80% des recettes fiscales des Collectivités Territoriales.

Serait-ce l’occasion pour le grand mammouth de l’administration territoriale d’opérer une cure d’amincissement, un régime devant lui tailler une taille plus ou moins fine ? Ou ces baisses, conjoncturelles, reprendront-elles leur forme initiale, une fois la crise sanitaire déclarée terminée ? Pour le moment, seul le constat d’un tel dégraissage est donné.

En dehors des transferts aux Collectivités Territoriales dans le cadre des CAS, d’autres impôts constituent la manne financière de fonctionnement de ces démembrements de l’État. Ceux-ci relèvent de la fiscalité locale et n’ont aucun lien, en principe, avec le revenu, le chiffre d’affaires ou le bénéfice. En réalité, l’impact de la crise sanitaire sur l’ensemble des activités, par effet d’écoulement ou en cascade, a touché toutes ces taxes. Et compte tenu de la fermeture des locaux et de la baisse d’activité, des difficultés pourront apparaître au niveau du recouvrement et générer un important contentieux fiscal. Ces trois impôts sont la Taxe sur les services communaux (3,5 milliards en 2019), la Taxe Professionnelle (2,71 milliards en 2019) et la Taxe d’Habitation (300 millions en 2019).

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Rationalisation des dépenses

Enfin, la fiscalité spécifique aux Collectivités Territoriales devrait également ressentir les effets de la crise. Même si elle rapporte moins de 15% des recettes fiscales des Collectivités Locales, elle est intimement liée aux activités dans le territoire. Au premier rang de cette fiscalité locale figure la Taxe sur les terrains non bâtis qui a rapporté, en 2019, quelque 1,36 milliards de dirhams. Sur cette taxe spécifique, force est de noter que les Collectivités Locales continuent de rencontrer beaucoup de difficultés lors de la collecte de cette taxe. Le taux de recouvrement de la taxe sur les terrains non-bâtis, s’il est amélioré, devrait rapporter beaucoup plus aux Collectivités. La taxe sur les débits de boisson dont s’acquittent les établissements de café, bars, restaurants, … devrait également payer un lourd tribut aux nombreux mois de fermeture et d’arrêt de leur activité et aux exigences nouvelles sanitaires préventives et restrictives. Et la taxe de séjour, liée à l’activité touristique fera également un plongeon en termes de recettes. L’année dernière, elle avait généré 245 millions de recette.

Dès lors, le pragmatisme s’impose aux autorités locales et une rationalisation des dépenses est à attendre d’eux. En fait, la rationalisation maximale des dépenses semble être la seule solution à court terme.

 
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