Alors que les prévisions du Haut-Commissariat au Plan (HCP) annoncent une reprise économique soutenue pour 2025 et 2026, une question cruciale persiste : cette croissance bénéficiera-t-elle à tous ?
Si les indicateurs macroéconomiques se redressent, l’impact réel sur les conditions de vie, l’emploi, la réduction des inégalités et l’accès aux services essentiels demeure incertain. Le Maroc se trouve aujourd’hui à un tournant : faire de cette dynamique économique un moteur de cohésion sociale.
Malgré les efforts de régionalisation et de développement intégré, les disparités territoriales restent importantes. Les grandes métropoles comme Casablanca, Rabat ou Tanger concentrent l’essentiel des investissements et des services. À l’inverse, les régions rurales et de l’intérieur continuent de souffrir d’un accès limité à la santé, à l’éducation, aux infrastructures et aux services numériques.
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«La régionalisation avancée, bien qu’ambitieuse sur le papier, se heurte encore à des contraintes budgétaires et institutionnelles. Une véritable relance territoriale suppose un transfert plus effectif de ressources et de compétences vers les collectivités locales, avec des plans d’investissement ciblés et une gouvernance de proximité renforcée», souligne Abdeslam Touhami, économiste.
Avec près de 35 % de chômage chez les 15-24 ans, et des pics dépassant les 45 % dans certaines zones, l’emploi des jeunes demeure une urgence nationale. Les diplômés sont particulièrement touchés, tandis que les secteurs les plus porteurs en emplois (BTP, agriculture, commerce informel) restent peu qualifiés et précaires.
Des programmes comme «Awrach» ou «Forsa» apportent un soutien ponctuel, mais une stratégie globale de formation, d’accompagnement et d’insertion professionnelle fait encore défaut. Il s’agit non seulement de créer des emplois, mais de préparer les jeunes aux métiers de demain : économie verte, digital, services à forte valeur ajoutée.
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La généralisation de la protection sociale, engagée depuis 2021, constitue une avancée structurante. Mais son déploiement reste progressif et dépend de plusieurs facteurs : élargissement réel de l’assurance maladie obligatoire, mise en œuvre du Registre social unifié, financement des retraites, du chômage et des allocations familiales.
Pour Adnane Bencherki, économiste, «cette réforme devra également s’adapter à l’évolution du marché du travail, avec la montée des statuts indépendants, du télétravail et des plateformes numériques».