Fiscalité

Réforme fiscale. Vers une nouvelle logique incitative

Dorénavant, les dérogations fiscales devront être des exceptions justifiées, bien encadrées et évaluées systématiquement en termes d’impacts pas seulement budgétaires. C’est ce que prévoit le projet de loi cadre (PLC) portant réforme fiscale. Quant aux exonérations fiscales déjà en vigueur, sources de dépenses fiscales, elles devront être passées dans un tamis très fin pour ne retenir que celles réellement pertinentes.

Chaque année, les dépenses fiscales (DF) représentent un manque à gagner budgétaire d’une moyenne de 33 milliards de DH1. C’est presque ce que représente le montant récolté à travers le « Fonds anti-Covid 19 », créé en 2020, pour faire face à la crise sanitaire, dans ses débuts. Depuis 15 ans, l’évaluation des DF est restée exclusivement budgétaire, sans être étendue aux impacts économiques, sociaux et environnementaux.

Pourtant les compétences ne manquent pas au ministère des Finances. C’est surtout une question de volonté politique. L’évaluation autre que budgétaire aurait surtout révélé la logique de rente étendue au domaine fiscal. De nombreuses incitations fiscales accordées sont souvent synonymes de privilèges, au sens quasi-féodal du terme.

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Face aux chantiers stratégiques actuellement lancés par le Souverain en vue d’entamer la construction d’un Maroc solidaire, équité fiscale et justice fiscale sont devenues des sœurs jumelles, inséparables. La révision du contrat fiscal est par conséquent devenue un acte préalable incontournable pour pouvoir créer un environnement favorable à l’émergence d’un nouveau contrat social.

Cependant, cette réévaluation autre que budgétaire des DF en vigueur, ne figure pas explicitement parmi les 10 mesures prioritaires définies dans le PLC portant réforme fiscale et programmées pour les 5 prochaines années. Parmi ces « mesures prioritaires et urgentes », figure la mise en place de nouvelles incitations favorables au développement des entreprises innovantes, notamment les startups (…), les structures de soutien, dites incubateurs et accélérateurs (…) et les entreprises ayant pour objet le regroupement des auto-entrepreneurs.

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C’est là une mesure positive qui va, certes, arrêter l’hémorragie financière due à de nombreuses DF injustifiées. Néanmoins, les grands chantiers stratégiques imposent aussi une action rétroactive urgente pour remettre en cause les dites DF injustifiées provenant d’exonérations fiscales en vigueur. Ces chantiers, notamment la généralisation de la protection sociale, pour connaître un succès, nécessitent non seulement un mode de gouvernance basé sur la transparence et l’efficience, mais aussi de nouvelles ressources financières, dans l’immédiat.

Où trouver les ressources nécessaires, stables et pérennes sans aggraver la situation d’endettement public, si ce n’est à travers l’impôt ? Au cours des prochaines années, l’État devra faire face à cette équation et y apporter des solutions urgentes et équitables, sans aggraver la pression fiscale.

 (1) NB. Les dépenses fiscales, spécifiques aux dérogations en matière de fiscalité locale, n’ont jamais fait l’objet d’une quelconque évaluation.

 
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