Alors que le Président des États-Unis, Donald Trump, voit dans la réévaluation des accords de libre-échange avec les autres pays un levier pour appuyer les entreprises américaines, le royaume, relativement épargné, pourrait bien profiter de ce revirement pour avancer ses pions. Surtout au moment où les États-Unis considérant l’inde, la Chine ou la Russie comme leurs principaux adversaires commerciaux et économiques, cherchent à limiter les options de contournement qu’utilisent les investisseurs de ces pays pour échapper aux taxes imposées par Washington à un certain nombre de produits.
Si l’instabilité internationale, les changements de dernière minute de l’administration Trump ajoutées aux faibles marges de manœuvres économiques incitent à la prudence, le royaume est bien dans une période où les vents favorables soufflent sur Rabat à partir de Washington. A quelque chose malheur est bon. Dans les coulisses, de nombreux opérateurs américains voient désormais le royaume comme le partenaire idéal pour faire des affaires, que ce soit dans le sens d’activités commerciales censées mettre les produits américains à la portée des consommateurs marocains ou le contraire : faire du royaume un fournisseur exclusif de marchandises.
D’après le site Africaintelligence, généralement bien informé, «le géant américain de la grande distribution Target fait les frais de la bataille commerciale qui oppose l’administration de Donald Trump au gouvernement indien de Narendra Modi. La compagnie, présidée par Brian Cornell, prospecte depuis cet été au Maroc pour son approvisionnement. Une délégation dirigée par les équipes de Don Liu, chargée du volet juridique et de la conformité, et par Jill Sando, responsable des achats, s’est ainsi rendue au royaume fin juin».
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On apprend ainsi, que les responsables de la multinationale ont été reçus par le ministère de l’Emploi, des responsables des fédérations sectorielles, tels que le Président de la Fédération nationale de l’agroalimentaire (Fenagri), Abdelmounim El Eulj, ou encore le Directeur de l’Association marocaine des industries du textile et de l’habillement (Amith), Mohamed Belghali.
Les secteurs ciblés concernés étant l’agroalimentaire et le textile, les discussions ont porté essentiellement sur la conformité des produits Marocains avec une législation très contraignante, surtout en ce qui concerne les droits syndicaux des travailleurs, l’interdiction absolue de faire travailler des enfants et la garantie de la traçabilité des produits. Mais c’est la délégation dont l’arrivée dans le royaume est programmée pour le mois d’octobre qui sera chargée de passer aux choses sérieuses en nouant des partenariats avec les acteurs économiques sous la supervision du patronat marocain.

Pourquoi cet intérêt subi des américains pour le royaume? Il n’y a pas de secrets : la surtaxe de 50 % sur les exportations indiennes par Donald Trump qui, par la même occasion, cherche à arracher à l’Union européenne une imposition de 100% des droits de douane à l’Inde, ont mis en grande difficultés des multinationales comme Target qui dépend en grande partie pour ses approvisionnements à sa filiale indienne, Target Sourcing Service India Private Limited. Or, le royaume fait partie des rares pays à échapper au courroux de l’administration Trump en se voyant imposer un taux fixé pour l’heure à 10%.
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Pris à la gorge, le géant américain de la distribution, malgré ses 100 milliards de dollars de revenus en 2024, est ainsi contraint de rechercher d’autres sources d’approvisionnement.
En tout cas, dans sa dernière lettre aux actionnaires , Brian Cornell, le PDG de Target a tenu à rassurer sur les choix stratégiques de la direction en rappelant qu’au cours des cinq dernières années, «cette stratégie différenciée a généré une croissance du chiffre d’affaires de près de 30 milliards de dollars».