Des caméras de surveillance dotées d’intelligence artificielle (IA) bientôt dans les écoles publiques marocaines.
Après la mort de l’enseignante Hajar, le nouveau ministre de l’Education nationale, Mohamed Saad Berrada, a décidé de mettre en place des caméras de surveillance dotées d’IA dans les établissements scolaires. De ce fait, on aura des caméras de surveillance presque partout, dans les rues, les jardins et autres espaces publics, les terrains de foot, les espaces commerciaux (…), et dans toutes les étapes de la vie. «Nous avons constaté une hausse inquiétante des cas de violence à l’école», a déclaré le lundi 28 avril, à la Chambre des représentants, M. Saad Berrada, ministre de l’Education nationale. Il s’agit bel et bien du constat d’une réalité, mais qui ne date pas d’aujourd’hui. Solution préconisée : agir avec «fermeté et lucidité». Concrètement, il s’agit de mettre en place des caméras de surveillance dotées d’IA, permettant la détection en temps réel des actes de violence et l’alerte immédiate des responsables et des autorités compétentes.
De nouveaux marchés publics en perspective. Mais il semble que ce dispositif existe déjà et est en «phase expérimentale», en vue de renforcer la sécurité à l’intérieur et aux abords des établissements scolaires, en coordination avec les services de sécurité. C’est donc une reproduction de l’approche sécuritaire dans l’espace scolaire, qui a d’ailleurs toujours prévalu. «Surveiller et punir», comme a dit Michel Foucault. Le monde serait ainsi divisé en bons et en méchants, d’un côté le bien, de l’autre le mal. Un combat éternel. Mais le fait de mettre en avant l’aspect sécuritaire révèle un énorme déficit de prise de conscience quant aux véritables causes structurelles de la violence dans l’espace scolaire. Les cellules de veille psychosociale ne devraient pas être limitées aux «écoles pionnières». Elles devraient être mobilisées avec la mise en place de mécanismes d’intervention garantissant leur présence sur l’ensemble du territoire national. L’autre levier réellement prioritaire à mettre en avant est certainement le développement des activités parascolaires. Ce qui nécessite des investissements importants mais indispensables, si l’on veut renforcer la qualité des prestations d’éducation. Et, au-delà de l’espace scolaire, il est impossible de tourner le dos aux «fractures sociales», principales sources de la violence dans les écoles. Car traiter l’école de manière isolée, c’est continuer à «verser de l’eau dans du sable».
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L’école est l’une des institutions centrales dans toute formation sociale. Elle fait partie, qu’on le veuille ou non, du projet de société. Est-ce actuellement un espace d’apprentissage de la citoyenneté ? L’école est-elle suffisamment connectée à son environnement externe? N’est-ce pas cet état de déconnexion entre l’école et la réalité sociale qu’il faudrait rompre en toute urgence ? Combien d’écoles publiques organisent des sorties et des visites sur des sites historiques, des sites naturels, des entreprises ? (…). Combien d’écoles publiques organisent des tournois ou compétitions entre différents établissements scolaires dans des villes ou régions différentes ? Quels mécanismes de soutien sont mis en place au profit d’enfants vivant dans la précarité, pas seulement matérielle, et éprouvant des difficultés d’adaptation ? Combattre la pauvreté et l’injustice sociale dans leurs racines est le point de départ d’un changement sociétal profond. Changement qui, pour réussir, nécessite une volonté politique réelle de réhabilitation de l’école publique, avec un respect moral et matériel des enseignants, en leur garantissant une protection intégrale de leur dignité.