Dans un monde où la compétition économique repose sur la recherche et l’innovation, le Maroc doit inventer de nouveaux modèles de financement pour soutenir ses universités et ses chercheurs.
Les budgets publics, limités, ne suffisent plus à nourrir l’ambition d’un pays qui aspire à rejoindre le peloton des nations technologiques.
Or, le Royaume dispose d’un atout rarement évoqué : la Zakat, pilier de l’islam, et les dons charitables. 
Ces ressources, traditionnellement orientées vers l’aide sociale et les œuvres religieuses, pourraient devenir un moteur de médecine, de la science et de l’industrie. 
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Quand la tradition rencontre la modernité
La Zakat a pour vocation de réduire les inégalités et d’améliorer le bien-être collectif. 
Mais qu’y a-t-il de plus collectif que la recherche scientifique appliquée à la santé, aux énergies propres ou à l’intelligence artificielle ?
Aucun texte religieux n’interdit d’investir dans le savoir. 
Au contraire, l’histoire islamique regorge d’exemples où la charité finançait bibliothèques, universités et hôpitaux.
Imaginez un Fonds national de Zakat pour la science : un mécanisme transparent où les dons viendraient soutenir directement des laboratoires universitaires, financer des bourses de doctorants et créer des pôles d’innovation.
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Des modèles à adapter au contexte marocain
Pour concrétiser cette vision, plusieurs pistes sont envisageables :
Fondations dédiées : un «Fonds Zakat & Innovation», inspiré du waqf, dont les bénéfices alimenteraient durablement la recherche.
Incitations fiscales : encourager les entreprises à orienter leur Zakat vers la science en échange de réductions d’impôt.
Crowdfunding islamique : des plateformes en ligne permettant aux citoyens d’investir leur Zakat dans des projets universitaires précis.
Mobilisation des mosquées : les imams et les oulémas pourraient expliquer que financer un laboratoire ou une bourse d’étude est une sadaqah jariyah – une charité continue dont les fruits profitent à toute la société.
Quand la science devient industrie
Les grandes universités internationales ont déjà montré la voie : Stanford a donné naissance à la Silicon Valley, Oxford au vaccin AstraZeneca, Harvard et le MIT aux révolutions biotechnologiques.
Pourquoi le Maroc n’imaginerait-il pas des universités incubatrices de startups, où la recherche financée par la Zakat produirait brevets, entreprises et emplois ?
Un exemple concret : un laboratoire marocain financé par la Zakat pourrait développer des technologies de diagnostic médical accessibles aux hôpitaux publics et commercialisés auprès du secteur médical libéral. 
Ces innovations créeraient un cycle vertueux : la science nourrit l’industrie, l’industrie réinvestit dans la science.
Les défis d’une révolution tranquille
Bien sûr, cette transformation suppose des garde-fous. 
Transparence, bonne gouvernance, lutte contre la corruption seront les conditions de réussite.
Il faudra aussi dépasser certaines résistances culturelles : pour beaucoup, la Zakat reste associée uniquement à la pauvreté et à l’assistance directe.
D’où l’importance d’un discours clair, porté par les oulémas et les universitaires, affirmant que soutenir la recherche est une forme moderne de justice sociale.
Un modèle marocain à inventer
Le Maroc a l’opportunité d’être pionnier dans ce domaine : bâtir un modèle de financement scientifique où foi et innovation avancent ensemble.
Un «Fonds Zakat pour la Science » libérerait les chercheurs des contraintes budgétaires, renforcerait la souveraineté technologique du pays et donnerait un nouvel élan à la jeunesse universitaire.
Car au fond, investir la Zakat dans le savoir, c’est honorer la spiritualité tout en construisant l’avenir.
 
			         
														 
								 
								 
								 
								 
								