Ressources hydriques

Eau. Consécration d’une vision royale et stratégique 

La question de l’eau est le meilleur exemple pour illustrer les vrais défis auxquels l’humanité est appelée à faire face en ce 21ème siècle. C’est en effet, une question où le local et le global sont indissociables. Compte tenu de l’importance vitale de cette ressource, il est donc tout à fait normal qu’il s’agisse d’une priorité stratégique de l’Etat.

L’eau a toujours été une substance rare, malgré l’apparence trompeuse de sa disponibilité dans certaines régions du monde. Elle est aussi  répartie de manière inégale. Quelques chiffres révélateurs : si le volume de la planète Terre est de 1 083 320 000 000 km3, et si l’eau recouvre 71% de la surface du globe, il ne  s’agit en fait que d’une «fine pellicule». En effet, le volume total d’eau représente 1 386 000 0000 km3, soit à peine 0,12% du volume de la Terre. L’eau douce liquide est encore beaucoup plus rare et ne représente, en volume, que 10 633 450 km3, soit 0,76% du volume total d’eau. Et le volume d’eau douce des rivières et des lacs, soit 93 113 km3, ne représente que 0,87% de l’eau douce liquide.

Au moment où les océans et les mers représentent 96,5% du total de l’eau terrestre. 9 pays dans le monde concentrent  presque 60% des réserves d’eau douce (Russie dans le lac Baïkal, avec 23 000 milliards de m3; Canada et Etats Unis d’Amérique ; Brésil, Colombie, Pérou, Chine, Inde et Indonésie). 1/3 de la population mondiale ne dispose pas d’eau potable. Si la consommation moyenne par habitant et par jour est de 250 litres en Amérique du Nord, elle est de 150 litres, en Europe, et de 10 litres, en Afrique Subsaharienne. 

Le Maroc est dans une zone où le stress hydrique est extrêmement fort (entre 4 et 5). La situation des ressources hydriques au niveau national n’a pas cessé de se dégrader pour passer d’une moyenne de 2 560 m3 d’eau douce, par habitant et par an, en 1960, à presque 600 m3, en 2024, soit une baisse à moins de 25%, en 64 ans. En 2020, le potentiel hydrique a été évalué au Maroc à 22 milliards de m3, dont 18 milliards de m3 en eaux superficielles et à 4 milliards de m3, en eaux souterraines. 50% de cette eau est située au nord du Maroc.

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A la fin de l’année 2024, le taux de remplissage des barrages ne dépassait pas 25%, contre 51%, en février 2021. En plus du réchauffement climatique, premier facteur mondial dans la baisse et l’irrégularité des pluies dans le temps et dans l’espace, les ressources hydriques font aussi face à une surexploitation, surtout au niveau des eaux souterraines/nappes phréatiques. L’agriculture, à elle seule, consomme presque 89% des ressources hydriques disponibles. De ce fait, le déficit en eau est devenu structurel. 

Face à cette situation chronique qui ne cesse pas de s’aggraver, le Souverain a défini des orientations stratégiques lors de son discours du 14 octobre 2022 pour la préservation des ressources hydriques et le développement du secteur de l’eau.  Ces orientations peuvent être regroupées autour des principaux axes suivants: accélération de la réalisation des projets du Programme national prioritaire de l’Eau 2022-2027; l’achèvement de la construction des barrages programmés, la mise en place d’interconnexions hydrauliques, et la réalisation des stations de dessalement de l’eau de mer.

Ainsi que la consolidation de l’orientation visant à assurer l’économie de l’eau, notamment en matière d’irrigation; le lancement des initiatives et de projets plus ambitieux, par le recours aux innovations et aux technologies nouvelles, dans le domaine de l’économie de l’eau et de la réutilisation des eaux usées et épurées ; l’exploitation rationnelle des eaux souterraines et la préservation des nappes phréatiques, en mettant fin au phénomène de pompage illégal et au creusement de puits anarchiques; garder à l’esprit que la question de l’eau n’est pas l’affaire  exclusive d’une politique sectorielle isolée, mais qu’elle constitue une préoccupation commune à de nombreux secteurs;  prendre en compte le coût réel de l’eau à chaque étape  de la mobilisation de cette ressource, avec tout ce que cela implique en termes de transparence et de sensibilisation aux différents aspects de ce coût.

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Le 9 mai 2023, le Souverain a présidé une séance de travail au cours de laquelle le Programme national de l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation (2020-2027) a été actualisé et renforcé, autour des points suivants: développement de l’offre ; gestion de la demande, économie et valorisation de l’eau ; renforcement de l’eau potable en milieu rural ; réutilisation des eaux usées après traitement; communication et sensibilisation.

Ainsi, le coût global du programme a été revu à la hausse, pour atteindre 143 MMDH, avec activation de la commission nationale de l’eau qui comprend : le Chef de gouvernement; le ministère de l’Equipement et de l’eau ; le ministère de l’Economie et des finances ; le ministère de l’Intérieur ; le ministère de l’Agriculture (…); et l’ONEE. Les inflexions majeures de la politique de l’eau ont ainsi été construites autour de trois leviers afférents aux eaux conventionnelles, aux eaux non conventionnelles et au mode de gouvernance des ressources hydriques.

Le 1er levier concerne les grands barrages ; les moyens et petits barrages; le projet de transfert d’eau; la collecte des eaux pluviales et le «désenvasement» des barrages. Le 2ème levier a trait à la construction de stations de dessalement de l’eau de mer; la réutilisation des eaux usées après épuration et la recharge artificielle des nappes. Le 3ème levier  vise l’amélioration du rendement du réseau d’approvisionnement en eau potable, l’amélioration du rendement des canaux et conduits multiservices ; le programme d’efficacité hydraulique de l’ensemble des usages de l’eau ; et les «contrats de nappes». Enfin, transversalement, l’ensemble des projets devront être accompagnés par des actions de sensibilisation et de communication sur l’économie de l’eau. 

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Ainsi, en plus des «eaux conventionnelles » dont il est question de consolider les acquis et les bonnes pratiques, la construction des stations de dessalement de l’eau de mer est une action stratégique, compte tenu de l’importance du littoral maritime du Royaume qui s’étend sur 3500 kilomètres. Déjà, en 2021, 12 stations de dessalement de l’eau de mer ont été opérationnelles avec une capacité de production de 145 millions de m3/an. Cette capacité de production est passée à 192 millions de m3/an, en 2023.

Le projet Douira SWRO à Agadir, d’un budget de 3 MMDH, permet de traiter environ 75 millions de m3 d‘eau dessalée/an, soit une capacité journalière de 450 000 m3. A Casablanca, le projet de dessalement d’eau de mer en cours de réalisation, prévoit une capacité de production de 250 millions de m3/an d’eau dessalée, d’ici 2030. Au total, l’objectif est d’atteindre une capacité de production de presque 1,5 milliard de m3/an, en 2030. Le 14 juillet 2025, a été inauguré le 1er ouvrage au Maroc à permettre le transfert d’eau dessalée, sur une distance de 203 km, grâce à l’OCP Green Water.

Il s’agit d’un projet de dessalement d’eau de mer et de transfert de 80 millions de m3 dédié à Khouribga, dont presque les 2/3 sont destinés à couvrir les besoins industriels, 25% à l’irrigation agricole et 12,5% aux besoins en eau potable de la population de la ville. De ce fait, l’objectif d’autonomie totale du Groupe OCP en matière d’eau non conventionnelle pourra être atteint dès cette année, en 2025, au lieu de 2027. 

A cela, s’ajoutent les projets de réutilisation des eaux usées après traitement dont la réalisation a été accélérée, en vue d’atteindre un objectif de 100 millions de  m3/an, pour l’arrosage des espaces verts, à fin 2027. 

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Le 16 janvier 2024, une nouvelle séance de travail sur la problématique de l’eau, présidée par le Souverain, a permis l’adoption et la mise en œuvre d’un plan d’action d’urgence. Ledit Plan d’action d’urgence, présenté devant le Souverain, et décliné au niveau des différents systèmes hydrauliques du Royaume, prévoit une diversité de mesures comprenant, à court terme, la mobilisation optimale des ressources au niveau des barrages, des forages et des stations de dessalement existantes, la réalisation d’équipements urgents d’adduction et d’approvisionnement de l’eau, et, là où la situation l’exige, des mesures éventuelles de restriction de l’eau d’irrigation ou des débits de distribution.

Parmi les principales actions mises en œuvre, il y a lieu de signaler notamment, la réalisation  de la tranche urgente du transfert de Sebou vers le Bouregreg, au profit de la région de Casablanca-Settat, région connue pour son taux élevé d’urbanisation et la concentration des activités économiques. C’est aussi le cas des régions de Tanger-Tétouan-El Hoceima et de Souss Massa, régions en pleine expansion, avec des projets de transfert de plus de 100 millions de m3, du barrage Oued El Makhazine au barrage Dar Khroufa (…). Ces actions doivent surtout préparer et faciliter la mise en œuvre des actions structurelles sur la base de solutions pérennes et durables dans la gestion de l’eau. 

 
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