Recherche Scientifique

Hydrogène: le Maroc s’active dans la recherche…

Au Maroc comme en Afrique du Sud, les universités prennent leur place dans l’industrie naissante de l’hydrogène. Leurs initiatives traduisent la volonté de relier recherche, formation et production afin de renforcer la valeur ajoutée locale. Décryptage.

Inauguré en janvier 2017, le premier campus de l’UM6P, dans la ville verte de Benguérir, est l’un des symboles clés du nouveau Maroc esquissé dans le modèle de développement. Orientée vers la recherche appliquée et l’innovation, l’UM6P, présidée par le polytechnicien Hicham El Habti, ambitionne de former des leaders capables de répondre aux grands défis que doit relever le royaume, mais aussi tout le continent, tels que la sécurité alimentaire, le développement durable, la croissance démographique ou encore les changements climatiques.

Dans le chantier du climat et de la durabilité, la technologie de l’hydrogène est une véritable priorité pour le Maroc. Sur le continent, l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) fait partie du cercle ferme des universités qui prennent leur place dans l’industrie naissante de l’hydrogèneEn février 2025, Oort Energy, Chariot et l’université ont activé au Royaume-Uni un électrolyseur solaire de 1 MW conçu conjointement avec l’UM6P. En avril 2024, OCP et Fortescue ont lancé une coentreprise visant à produire et commercialiser hydrogène vert, ammoniaque et engrais, accompagnée d’un centre de recherche qui serait installé à l’UM6P.

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Rappelons d’ailleurs qu en août 2023, les trois partenaires avaient déjà annoncé une collaboration pour tester un électrolyseur de 1 MW au Maroc. Par ailleurs, en mars 2023, l’UM6P s’était associée à 247Solar pour explorer l’usage de technologies solaires avancées dans la production d’hydrogène et d’ammoniac verts. Au cote du Maroc, se trouve l’Afrique du Sud qui lui aussi mise sur la recherche pour développer son industrie. Récemment la Vaal University of Technology d’Afrique du Sud a inauguré son Centre of Excellence for Hydrogen Energy, avec l’appui de Standard Bank. Ces initiatives rappellent le rôle croissant des universités africaines dans la structuration de la filière hydrogène, en amont des projets industriels et des exportations.

L’enjeu de la RD

En 2021, la Hydrogen Society Roadmap rappelait que « pour atteindre une chaîne de valeur hydrogène compétitive, un investissement continu en R&D est nécessaire », tout en mettant en avant l’importance des partenariats publics-privés pour transformer la recherche en projets concrets. Le nouveau centre de Vaal University s’inscrit donc dans cette logique, en associant université et finance pour accélérer la mise en œuvre. Les deux pays partagent la même conviction, à savoir que miser sur la recherche appliquée et le développement du capital humain est essentiel pour ancrer localement une partie de la valeur de la filière hydrogène. Ils cherchent ainsi à réduire leur dépendance technologique et à transformer leurs ressources en leviers industriels.

À terme, si ces centres parviennent à accumuler compétences, brevets et partenariats, ils pourront positionner leurs pays comme acteurs à part entière de la production d’hydrogène et comme exportateurs de technologies et de savoir-faire. La question reste de savoir si cette dynamique s’étendra à d’autres nations africaines qui cherchent également à se positionner sur le marché de l’hydrogène.

Contacter par challenge l’expert en Energie Said Guemara, explique que le développement de la RD passe par le lancement de projet pilote. ‘’ il s’agit de mettre en place 5 projets pilote de 20 MW EnR chacun, au niveau des cinq zones de production du Sud du Maroc. Ces projets seraient financés conjointement par Masen et les développeurs, en contrepartie les données de production de l’hydrogène seraient en Open Data, et mis à la disposition des investisseurs et des chercheurs, qui vont travailler sur une multitude de thématiques. L’hydrogène produit serait vendu sous forme de NH3 à OCP dans le cadre d’un PPA longue durée, Le coût global de ce projet serait entre 240 et 280 M$.

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Les revenus de la vente de l’ammoniac seraient en 17 et 20 M$/an. Les projets pilote, sont la seule solution qui va nous permettre de promouvoir les grands projets hydrogène à l’image du Chili qui a adopté une approche prudente.  Les retombées sur notre recherche scientifique sont également très importantes, le résultat est visible, le Chili compte 75 projets hydrogene, l’agence CORFO co-finance les projets pilote, en contrepartie de l’Open data, ce qui explique le grand nombre de projets au Chili. ‘’

Et de poursuivre : ‘’ Mon souhait est que tous les projets actuels et futurs du Maroc, voient le jour en GW, le chemin en R&D est encore long avant d’arriver à un cout hydrogène acceptable. Pour cela, il est impératif de connaitre la production de l’hydrogène a petite échelle au niveau des cinq zones climatiques de nos régions sud visées par la production de l’hydrogène, avec une montée exceptionnelle de la R&D Marocaine’.

De son cote l’expert en PowerToX Yassine Zegzouti declare :’’ Le Maroc s’est engagé activement dans la production d’hydrogène vert dans le but de décarboner son économie. Cependant, cet engagement ne pourra être véritablement efficace que si un accompagnement approprié de la recherche scientifique est mis en place. Cette recherche doit répondre aux besoins spécifiques du pays, notamment dans des secteurs comme les fertilisants, l’acier et d’autres industries, tout en tenant compte des conditions climatiques particulières du Maroc, caractérisé par un climat semi-aride. Dans ce cadre, plusieurs initiatives ont été déployées par des institutions, des universités et des centres de recherche, tels qu’IRESEN. Ce dernier a lancé plusieurs projets de recherche portant sur des éléments clés de la chaîne de valeur de l’hydrogène, tels que les électrolyseurs, les techniques de stockage, les sources d’eau et le transport.

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Au-delà de ces éléments, des projets pilotes et des plateformes de recherche sont également en cours pour optimiser ces technologies en fonction des conditions marocaines spécifiques.
L’université marocaine participe également activement à cette dynamique en lançant des thématiques de recherche sur l’hydrogène et ses dérivés. Des établissements tels que l’Université Mohammed VI Polytechnique (UMP6), l’UIR de Rabat et l’Université Ibn Tofail, ainsi que d’autres institutions, concentrent leurs efforts sur l’innovation dans ce domaine. Cette participation universitaire est essentielle pour assurer la pertinence des recherches dans le contexte national.

Cependant, pour que cette recherche soit productive et bénéfique à long terme, il est indispensable de valoriser les résultats obtenus et de les amener à un stade semi-industriel, voire industriel. Cela comprend la possibilité de breveter les innovations et de les valoriser financièrement. Les thématiques de recherche doivent être choisies en fonction des besoins des acteurs industriels du pays, tout en couvrant plusieurs aspects de la chaîne de valeur de l’hydrogène et en s’alignant avec la vision stratégique du Maroc. De plus, il est impératif de mettre en place les moyens nécessaires pour équiper les laboratoires de recherche avec des équipements de pointe. l est également essentiel de former des techniciens et des ingénieurs qualifiés, capables de maintenir les équipements utilisés dans ces recherches et d’assurer la qualité des résultats’’.

Et d’ajouter :’’ En parallèle, il convient d’informer les centres de recherche et les laboratoires des éventuels obstacles liés à l’importation de matériel (équipements), en particulier ceux relatifs à la conformité des produits, comme c’est souvent le cas pour l’hydrogène et ses dérivés, tels que l’ammoniaque.
Enfin, au-delà des aspects techniques de la recherche, il est également important de lancer d’autres recherches qui considèrent l’impact socio-économique de la filière hydrogène.

Il est nécessaire d’évaluer la valeur ajoutée des projets d’hydrogène vert sur l’économie nationale, notamment en termes de création d’emplois. La perception de la population à l’égard de cette filière doit également être prise en compte afin de mesurer l’acceptabilité sociale des politiques publiques liées à l’hydrogène. Cela permettra non seulement de mieux comprendre l’impact de ces projets, mais aussi d’anticiper et de gérer leur intégration dans la société’’.

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