Barcelone s’est transformée en capitale mondiale de la tech à l’occasion de la Tech Catalyst Week organisée du 06 au 10 Octobre, un événement signé Glovo, figure emblématique de la foodtech européenne. L’objectif : créer des passerelles entre startups émergentes et investisseurs internationaux, favoriser les synergies entre continents et montrer comment la technologie peut transformer les villes et stimuler l’économie locale. Cette année, le Maroc s’y est distingué comme le pays le plus représenté, avec six startups invitées au siège mondial de Glovo, le Yellow Park, pour une semaine d’immersion au cœur de l’innovation.
L’événement, pensé comme une expérience de mentorat et de co-création, a rassemblé de jeunes entrepreneurs venus d’Europe, d’Afrique et d’Asie dans une atmosphère où se mêlaient ambition, curiosité et énergie contagieuse. Dans ce lieu où tout respire la créativité, Glovo a orchestré une série d’ateliers, de sessions de mentorat et de rencontres d’affaires destinées à nourrir l’esprit entrepreneurial.
« Nous avons nous-mêmes vécu les joies et les difficultés du lancement d’une startup », confie Sacha Michaud cofondateur de Glovo. «Aujourd’hui, nous voulons partager cette expérience et tendre la main à la nouvelle génération d’entrepreneurs ».
Le Maroc au cœur du programme
Au centre de cette dynamique, le programme “Glovo Startup Lab”, lancé en partenariat avec le Ministère marocain de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration, 212 Founders, Startgate et Technopark, s’impose comme un levier d’internationalisation pour les startups marocaines. Durant cinq jours, les participants ont pu bénéficier d’ateliers spécialisés animés avec Impact Hub, de séances de mentorat individuel avec les équipes de Glovo, de visites immersives chez des acteurs comme Tech Barcelona, Norrsken ou Barcelona Activa, et d’une journée de pitchs devant des investisseurs. L’objectif affiché : renforcer les capacités, élargir les réseaux et faciliter l’accès au financement.
Lire aussi | Financement: Les startups gagnent en envergure, mais doivent franchir un nouveau cap
Pour Glovo, il ne s’agit pas d’une simple vitrine, mais d’un programme de long terme destiné à créer des ponts concrets entre Barcelone et Casablanca. « Ce programme s’inscrit dans la durée : il ouvre des marchés, transmet des savoir-faire et contribue à l’émergence d’une génération de startups internationales issues du Maroc », souligne l’équipe organisatrice.
Glovo : dix ans d’audace et de vision
La semaine a aussi été marquée par les interventions des deux cofondateurs de Glovo, Oscar Pierre et Sacha Michaud, venus partager leur expérience d’entrepreneurs. Oscar Pierre est revenu sur une décennie de défis et de réussites.
« Au début, personne ne commandait. Le marché, c’était la food, nous l’avons découvert avec les clients », raconte-t-il. Pour accélérer, Glovo crée une équipe de “launchers”, jeunes talents formés à Barcelone et envoyés ouvrir de nouveaux pays. « Nous avons bâti Glovo sur la conviction qu’exécuter vite et bien vaut souvent plus qu’avoir la meilleure idée », résume-t-il. La stratégie se traduit par une expansion rapide mais disciplinée : ouvrir, tester, ajuster, puis fermer si nécessaire. « Nous avons appris à fermer vite les marchés qui ne fonctionnaient pas. Au final, Glovo est présent là où nous sommes numéro un ou très proches du leader ».
L’entrepreneur rappelle aussi, que la culture d’entreprise a été un pilier fondamental du succès. « La culture n’est pas un poster au mur : c’est un outil de management concret, une boussole pour recruter, évaluer et faire grandir nos équipes. » Aujourd’hui, Glovo compte plus de 30 millions d’utilisateurs actifs, 150 000 partenaires et opère dans 22 pays. La vision de Pierre Oscar se projette déjà vers l’avenir : « Le vrai potentiel est dans la livraison de courses et de produits du quotidien. Ce que nous rêvions il y a dix ans devient enfin réalité ».
Lire aussi | La startup Z.Systems retenue pour connecter 50.000 détaillants d’ici 2030
Pour Oscar Pierre, l’histoire de Glovo dépasse celle d’une simple scale-up. Elle incarne un modèle d’innovation européenne résiliente. « L’Europe n’a pas besoin de copier la Silicon Valley. Nous avons nos propres atouts : la diversité, la proximité entre villes et la capacité à créer des entreprises profondément ancrées dans leur tissu social. »
Interrogé sur le futur du commerce, il souligne que la rapidité restera un enjeu central : « La livraison instantanée n’est pas un luxe, c’est une évolution naturelle du comportement client. Mais elle doit être soutenable, inclusive et technologiquement responsable. »
Pour lui, l’avenir de l’e-commerce se jouera sur trois piliers : la logistique intelligente, l’intégration des commerces de proximité et la collaboration entre startups et institutions publiques. «C’est là que des pays comme le Maroc ont un rôle clé à jouer : construire des modèles hybrides, ancrés localement mais connectés globalement».
De son côté, lors de son intervention, Sacha Michaud a replacé la mission de Glovo dans une perspective plus large : celle d’un acteur technologique profondément urbain. « Le commerce en ligne change de standard : hier, 48 heures suffisaient, aujourd’hui les consommateurs la veulent en 30 minutes. C’est cette promesse d’instantanéité qui nourrit la croissance du quick commerce ».
Lire aussi | Du terrain à la tech, le pari audacieux de Tachrone.ma
Il insiste sur le fait que Glovo, au-delà de son application, participe à la transformation des villes : « Nous soutenons les petits commerces, nous les aidons à franchir le cap du numérique. D’ailleurs, 90 % de nos partenaires sont des PME locales ».
Mais il voit plus loin. « L’Afrique et l’Europe du Sud ont le potentiel pour devenir les nouveaux moteurs de l’innovation digitale. Et le Maroc a toutes les cartes pour être le hub reliant les deux continents ».
Les startups marocaines, un vivier d’idées et de talents
Cette édition 2025 a consacré une nouvelle génération de startups marocaines à fort potentiel. Leurs représentants ont incarné la diversité et la maturité croissante de l’écosystème du royaume.
Youssef Kanouni, CEO d’Estaly, a présenté une entreprise d’assurance intégrée qui distribue des produits de protection directement dans le parcours d’achat des retailers et e-commerçants. « Notre enjeu, explique-t-il, c’est de distribuer à grande échelle et d’engager les vendeurs partenaires. Glovo a vécu ces problématiques : son retour d’expérience vaut de l’or. »
Mehdi Bekkali, cofondateur de Upfund, a dévoilé une approche data qui permet aux enseignes de choisir les meilleurs emplacements grâce à un scoring intelligent. « Lier cette intelligence au réseau Glovo peut aider des milliers de commerçants à ouvrir au bon endroit et au bon moment », indique-t-il, avant d’ajouter qu’il prépare une levée de fonds d’1,5 million d’euros pour étendre son modèle à l’international.
Mohammed Ait Elorf, fondateur d’Orderly Solutions Logistics, a quant à lui mis en avant un système de gestion des commandes nouvelle génération destiné à fluidifier les livraisons dans les grandes villes. « Nous repensons les flux intraville pour livrer mieux, en émettant moins. Notre ambition est de contribuer à une logistique plus verte et plus efficace », souligne-t-il.
Saad Kemmou, de Hsabati, a insisté sur la nécessité d’accompagner les petites entreprises dans leur structuration et leur accès au financement. « Structurer pour grandir, puis financer vite : notre mission est d’aider les TPME à mieux collaborer avec des partenaires comme Glovo », explique-t-il.
Amin Medjber, fondateur de Black Service Solutions (BFRET), a pour sa part mis en avant le rôle de la logistique dans la transformation numérique. Sa startup développe des solutions de transport et de livraison qui répondent aux besoins des entreprises de grande consommation et du e-commerce. « Nous sommes là pour comprendre comment un acteur comme Glovo a su structurer une logistique de précision et un réseau mondial de partenaires. Cet événement est une opportunité d’apprendre et de bâtir des synergies concrètes avec un acteur international », explique-t-il.
Enfin, Imad Moujahid, fondateur de Dashy, a séduit l’audience avec une solution de paiement intégrée à WhatsApp. « Nous digitalisons tout le parcours de la vente — de la prospection au paiement sécurisé — et les synergies avec Glovo sont évidentes, au Maroc comme à l’international », assure-t-il.
Ces jeunes entrepreneurs partagent un même optimisme. Ils voient dans cette initiative non seulement un tremplin vers de nouveaux marchés, mais aussi une reconnaissance du dynamisme marocain. Leur participation illustre la montée en puissance d’une génération de startups ambitieuses, structurées et ouvertes sur le monde.
Au-delà du networking, la Tech Catalyst Week agit comme un accélérateur bidirectionnel : les startups y gagnent en méthodes, en visibilité et en crédibilité, tandis que Glovo renforce son rôle d’acteur fédérateur. L’entreprise détecte des synergies concrètes (paiements, logistique, assurance, data) et favorise l’émergence de nouveaux modèles urbains.
« Nous voulons être un catalyseur », résume Sacha Michaud. « Aider les entrepreneurs, les petites entreprises, les villes et les talents à accélérer leur transformation digitale. C’est ainsi que l’Europe et l’Afrique du Nord pourront écrire leur propre success story technologique. »
Le pari de Glovo est réussi : faire de Barcelone une porte d’entrée vers l’Europe pour les talents africains, et du Maroc un partenaire stratégique de cette ambition.
Comme le résume Oscar Pierre, « l’important n’est pas d’avoir l’idée parfaite, mais de l’exécuter, de tester, d’ajuster, d’apprendre. C’est ce qui fait la différence ».
La Tech Catalyst Week a tenu sa promesse : celle de relier les énergies, de croiser les talents et de rappeler qu’entre Barcelone et Casablanca, une nouvelle génération d’innovateurs est déjà à l’œuvre.