Coopération

Maroc-UK: le Global Britain commence à produire des effets

La politique étrangère britannique (Global Britain), qui considère le Maroc comme un allié stratégique, commence à produire ses effets au plan économique, comme en témoigne notamment le lancement des liaisons maritimes réfrigérées par DP World et Samskip entre les deux Royaumes. Tour d’horizon d’une coopération géopolitique et géoéconomique…

La coopération Maroc–Royaume-Uni post Brexit revers d’une vitalité énorme. Au premier trimestre 2025, les échanges commerciaux entre les deux pays ont enregistré une hausse significative de 16,4% en glissement annuel, frôlant la barre symbolique des 6 milliards de dollars (4,4 milliards de livres sterling), selon les dernières données du Department for Business and Trade britannique publiées le 1er août.

Dans les détails, derrière cette performance, une dynamique largement portée par les exportations marocaines, qui s’imposent comme moteur de cette relation bilatérale. Elles ont atteint 2,7 milliards de livres (environ 3,5 milliards de dollars), tirées par les secteurs de l’agroalimentaire, des produits agricoles, du textile et de l’automobile. À ces flux de biens s’ajoute une montée en puissance des services, notamment grâce à l’essor du tourisme. Pour la petite histoire, le Bréxit a été le point de départ de cette nouvelle politique étrangère du Royaume-Uni.

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En effet depuis cette date historique, le pays dans sa diplomatie a redéfini ses objectifs plus larges en matière de politique étrangère et d’action au-delà de l’Europe. Les mémoires se souviennent du fameux discours du 2 février 2020 de Boris Johnson, ou il présentait ou il présentait le « Global Britain », cet ambitieux programme qui fixait les objectifs du gouvernement à l’horizon 2030. Un épais document portant sur la sécurité, la défense, le développement la politique étrangère et présenté par lui-même comme « le plus important exercice de géopolitique depuis la Guerre froide ». Dans l’un de ses rapports récents, l’IMIS s’est penché sur cette nouvelle diplomatie en analysant son versant Afrique.

« L’Afrique de l’Ouest, comme vu précédemment, occupe un rôle pivot pour la nouvelle stratégie de Global Britain du Royaume-Uni. Le continent offre en effet des ressources énergétiques prometteuses, et rassemble des perspectives d’investissement particulièrement attractives, malgré un coût du risque, notamment en matière de financement, qui reste surévalué selon de nombreux experts, dont certains spécialistes de la Banque de France.

Dans ce cadre, le Royaume du Maroc, jouissant à la fois de la stabilité macroéconomique, institutionnelle, et d’une ouverture commerciale inédite dans la région, dispose de plusieurs atouts pour se positionner en tant qu’interface privilégiée entre le Royaume-Uni et le continent africain. », explique les experts de l’IMIS dans un rapport sur le sujet.

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Le Maroc occupe une position d’autant plus stratégique pour les intérêts britanniques que le Royaume Chérifien est perçu comme l’un des nouveaux “connecteurs” de la mondialisation, selon l’agence d’information économique de référence Bloomberg. À ce titre, le pays est devenu une interface du commerce international bénéficiant tant d’une position géographique et logistique avantageuse que de son non-alignement dans le contexte de guerre commerciale et de rivalité géostratégique entre l’Est et l’Ouest. Plus qu’un hub du commerce international, statut de longue date du Maroc du fait de capacités portuaires et aéroportuaires avantageuses, le pays constituerait une porte d’entrée critique pour les investissements, les importations et les exportations de et vers l’Afrique.

Mais les évolutions du contexte géopolitique et géoéconomique mondiale, les nouveaux intérêts du Royaume-Uni post-Brexit et la position stratégique consolidée du Royaume comme point d’entrée de l’Afrique et plaque tournante du co-développement entre le Nord et le Sud, appellent à hisser ces relations bilatérales, tant diplomatiques que économiques à un niveau plus ambitieux”, explique Hicham Kasraoui, expert à l’IMIS.

Zoom sur l’investissement

L’investissement dans le développement des services est un jalon important pour renforcer les liens entre le Maroc et le Royaume-Uni. Depuis le Brexit, les institutions financières britanniques cherchent à s’implanter en Afrique, où le Maroc peut jouer un rôle stratégique grâce à son secteur tertiaire développé et à Casablanca Finance City (CFC). « 48% des 202 entreprises-membres que comptait la place financière en janvier 2024 étaient des professionnels des services aux entreprises (finance, conseil, juridique, audit) dont Boston Consulting Group, Deloitte, ainsi que plusieurs des plus éminents cabinets d’avocats britanniques, dont DLA Piper et Clifford Chance», note le rapport.

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Quant au secteur des énergies renouvelables, le Maroc, avec son potentiel en énergie solaire et éolienne, pourrait devenir un exportateur net d’énergie renouvelable, tandis que le Royaume-Uni bénéficierait de cette énergie à faible coût, diversifiant et sécurisant son approvisionnement. La coopération pourrait également s’étendre à l’industrie automobile, notamment dans la mobilité électrique, avec l’exportation de véhicules et la production de batteries à haute valeur ajoutée, renforcée par les réserves de phosphate du Maroc. Cette collaboration pourrait stimuler la croissance économique, créer des emplois et promouvoir le développement durable dans les deux pays. Un partenariat ambitieux et rénové ne peut être que tourné vers l’avenir et vers les secteurs de l’avenir.

C’est dans cette logique que le policy paper de l’IMIS explore notamment les secteurs des énergies renouvelables, de la santé, de l’éducation, de l’industrie militaire et des services aux entreprises. Prenons l’exemple des énergies renouvelables, le Maroc s’est déjà positionné comme un champion mondial de la transition énergétique en réalisant notamment des projets phares de parcs solaires et éoliens et en formalisant rapidement une Offre Maroc pour encourager les investissements dans l’Hydrogène Vert.

Le Royaume-Uni, également décidé à être leader de cette transition, dispose de cadres réglementaires favorables au développement des énergies propres. Les opérateurs britanniques ont donc tout à gagner à intensifier leurs investissements au Maroc, notamment dans nos Provinces du Sud qui regorgent de potentiel énergétique, afin de renforcer leur sécurité énergétique et atteindre leurs objectifs de décarbonation.

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Dans la même logique, les entreprises britanniques cherchant à se développer dans les marchés africains, à rapprocher leurs chaines de valeurs et réduire leur dépendance à l’Asie, trouveront naturellement dans le Royaume Chérifien des avantages concurrentiels uniques dans notre région.

Vers une consolidation stratégique des relations bilatérales

Le Maroc confirme ainsi son attractivité en tant que partenaire stratégique pour le Royaume-Uni. Cette trajectoire ascendante pourrait ouvrir la voie à des coopérations plus ciblées dans des domaines à fort potentiel comme l’énergie, la finance verte ou la recherche appliquée. Ce renforcement des échanges s’inscrit dans une stratégie plus large de rapprochement entre Rabat et Londres.

Les deux capitales multiplient les initiatives diplomatiques, commerciales et financières pour institutionnaliser leur coopération. Le développement de partenariats dans les énergies renouvelables, la finance verte ou encore l’éducation figure parmi les axes prioritaires. Le cap franchi au premier trimestre 2025 pourrait ainsi n’être qu’une étape vers une relation économique encore plus structurée, équilibrée et tournée vers l’avenir.

 
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