Après la France et le Canada, l’Université Mohammed VI Polyrechnique (UM6P) s’installe aux États-Unis. A l’heure où les plaques tectoniques dans le domaine de la formation sont en pleine recomposition, le Maroc est en train de faire sa place sur ce terrain stratégique. Décryptage.

«Incontestablement, on assiste aujourd’hui à l’émergence de nouveaux pôles de savoir, tels que l’Espagne, la Chine, la Turquie, le Maroc, où on retrouve de grandes communautés d’étudiants…», nous confie d’entrée Mohamed Tazi, Directeur Général du cabinet de conseil Archimède. Au cours des dernières années, le Maroc a mis sur pied une véritable offre dans le domaine de l’éducation. Et dans ce vaste paysage de formation qualitative, l’UM6P a su se hisser en tant que porte-étendard de l’offre de formation marocaine.

Inauguré en janvier 2017, le premier campus de l’UM6P, dans la ville verte de Benguérir, est l’un des symboles clés du nouveau Maroc esquissé dans le modèle de développement. Orientée vers la recherche appliquée et l’innovation, l’UM6P, présidée par le polytechnicien Hicham El Habti, ambitionne de former des leaders capables de répondre aux grands défis que doit relever le royaume, mais aussi tout le continent, tels que la sécurité alimentaire, le développement durable, la croissance démographique ou encore les changements climatiques.

À observer de loin, on peut comprendre que l’enjeu est de faire émerger un MIT continental, pour donner les moyens à tous les étudiants du continent de se réaliser. «La plupart des cadres marocains ont été formés par les grandes universités marocaines. Et nos diplômés arrivent à intégrer les grandes écoles étrangères. Cela montre que notre formation est de qualité. Le Maroc est une destination importante pour un certain nombre d’étudiants du Sud », explique Tazi.

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Aujourd’hui, l’UM6P est en train de construire un véritable label dans le domaine de la formation. Le 24 janvier dernier, à Paris, était inaugurée l’antenne française de l’Université. Juste après cette implantation, l’institution a ouvert une antenne au Canada durant cette même année. Et recement le groupe s’est attaqué au marché américain avec l’ouverture de son nouveau Global Hub aux États-Unis, visant à connecter les talents et les écosystèmes de recherche africains avec des partenaires académiques, entrepreneuriaux et industriels à l’international.

Derrière ce mouvement, il ne s’agit pas seulement de l’implantation d’une institution académique à l’étranger, mais bien d’une vision affirmée dans le champ de la formation et de la recherche appliquée. À l’heure où les États-Unis, la Chine et l’Europe rivalisent d’attractivité pour capter les talents, le Maroc ambitionne, via son pôle connaissance, de se positionner comme une plateforme africaine incontournable, ouverte sur les flux mondiaux de technologie, de recherche et d’entrepreneuriat. ‘’ Cette opération confirme la réussite de cette multinationale dont l’enjeu aujourd’hui est de créer un couloir ou encore un réseau entre les talents marocains. Cette dynamique facilitera le retour des compétences’’, nous confie l’économiste de l’Istiqlal Adnane Benchekroune.

Un hub aux États-Unis : la passerelle Afrique-Amérique

L’inauguration officielle du hub américain de l’UM6P, à New York et Cambridge (Massachusetts), marque un tournant stratégique. La symbolique est forte : New York, capitale diplomatique et financière, et Cambridge, berceau de l’excellence académique, offrent à l’université marocaine une double légitimité – internationale et scientifique. Lors de la cérémonie, le président Hicham El Habti a insisté sur cette vision : « faire du hub un pont bidirectionnel, capable de relier les talents africains aux écosystèmes mondiaux, tout en adaptant les innovations globales aux réalités africaines ». Derrière ces mots, une ambition claire : positionner le Maroc comme médiateur de connaissances entre l’Afrique et le monde.

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Dans les détails, le Global Hub américain de l’UM6P répond à trois besoins spécifiques de l’écosystème d’innovation africain. Il met la recherche et l’entrepreneuriat africains en dialogue avec les circuits mondiaux du savoir, permettant aux acteurs africains de co-définir problématiques et solutions. Il mobilise la diaspora africaine comme ressource opérationnelle, en mobilisant le capital intellectuel et entrepreneurial présent en Amérique du Nord pour travailler sur des défis africains. Enfin, il propose un mécanisme pour adapter les avancées technologiques mondiales aux applications concrètes en Afrique.

«Nous saluons à la Fondation Tamkine avec force et admiration l’implantation de l’Université Mohammed VI Polytechnique au cœur même du paysage académique américain, là où les prestigieuses Ivy Leagues dominent depuis des siècles. Cette implantation constitue bien plus qu’une extension géographique : elle donne en fait lieu à un nouveau modèle, celui d’un campus planétaire, une véritable première; c’est également une consécration. Celle d’un nouveau modèle pédagogique audacieux, fondé sur l’innovation, la recherche appliquée et la témérité intellectuelle, qui a su convaincre au-delà des frontières marocaines et européennes. En franchissant ce nouveau pas, l’UM6P ne se contente pas de rejoindre un cercle restreint, elle y apporte une vision nouvelle, faite de transversalité, de courage prospectif et d’une confiance absolue dans la capacité de l’Afrique à contribuer aux grandes recompositions du savoir», explique Dr. Abdelilah Kadili, président de la Fondation Tamkine exerçant dans l’éducation.

Et d’ajouter: «Cette avancée marque également le rayonnement du Maroc, l’ouverture de ses institutions, qui affirme sa légitimité sur un terrain jadis considéré comme l’apanage exclusif des puissances académiques occidentales. C’est la preuve que notre pays n’a rien à envier à ces institutions de référence : il a les moyens, la vision et le talent pour rivaliser et enrichir la scène mondiale de la connaissance. L’UM6P démontre que l’éducation marocaine peut être à la fois universelle et singulière, enracinée dans sa terre tout en étant ouverte sur le monde, et qu’elle est aujourd’hui appelée à jouer un rôle moteur dans la redéfinition des équilibres intellectuels globaux».

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De son côté, Hamid Ben Elfadil, président de Jadara Foundation et Fondateur de Y.E.S Africa, déclare: «Le marché mondial de l’enseignement supérieur et de la recherche est extrêmement compétitif et la guerre des talents est une composante fondamentale de l’expression de la puissance des nations. Le développement international de l’UM6P est une option stratégique majeure du Maroc dans ce contexte. L’UM6P y avance sans aucun complexe. Nous devons tous en être fiers».

Pour rappel, depuis son inauguration, l’UM6P poursuit sa mission de promotion de l’apprentissage, la recherche et l’innovation centrés sur l’Afrique. L’université se concentre sur des domaines tels que l’agriculture durable, les énergies renouvelables et la transition verte, l’intelligence artificielle et la science des données, la sécurité de l’eau et l’innovation industrielle. Sa communauté académique compte aujourd’hui près de 7.300 étudiants, issus de 40 nationalités, dont 1.000 doctorants. Avec 80 % des étudiants bénéficiant de bourses, dont 60 % à plein financement, l’UM6P fait de l’inclusion et de l’accessibilité le cœur de sa mission. Son écosystème entrepreneurial a accompagné plus de 1.000 fondateurs et porteurs d’idées, contribuant à transformer la recherche en entreprises viables.